Theresa May, le 23 août 2017. / POOL / REUTERS

Dans les discussions sur le Brexit, le Royaume-Uni a fait un geste de compromis mercredi 23 août. Sur la question technique mais essentielle de la compétence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), le gouvernement britannique affirme qu’il est prêt à reconnaître un rôle indirect à cette instance judiciaire. En cas de dispute entre Bruxelles et Londres après la sortie de l’UE, il propose la création d’une forme d’arbitrage, dans laquelle la cour du Luxembourg pourrait avoir son mot à dire.

Le document technique publié par Londres mercredi semble loin des annonces tonitruantes de Theresa May. La première ministre britannique a fait de la sortie de la CJUE un symbole de la souveraineté retrouvée de son pays : « Nous ne quitterons pas [l’UE] pour ensuite revenir à la juridiction de la CJUE », annonçait-elle, dès octobre 2016.

La question est brandie par les partisans du Brexit, qui ne supportent pas qu’une cour composée de « juges étrangers » puisse trancher en dernier recours certaines disputes britanniques. La CJUE, qui est chargée de faire appliquer le droit européen, peut éventuellement contredire la Cour suprême britannique. Le Brexit doit donc mettre fin à cette pratique et permettre au Royaume-Uni de « contrôler ses lois ».

La réalité juridique

Mais mercredi, Londres a été obligé de reconnaître la réalité juridique. Si le gouvernement britannique veut passer un nouvel accord commercial avec l’UE après le Brexit, il lui faudra bien accepter un mécanisme de résolution de possibles disputes. C’est le cas de tous les traités internationaux.

Dans le document publié mercredi, le gouvernement britannique a donc une approche tout en nuances. Dans la première phrase, il confirme : « Nous allons mettre fin à la juridiction directe de la CJUE. » Mais en introduisant l’adjectif de « direct » il ouvre la porte à une solution. S’il n’est plus question d’accepter l’autorité « automatique et suprême » de cette cour, celle-ci va pouvoir conserver un rôle.

Sans donner sa préférence, Londres détaille une série de solutions possibles, qui vont des différents modèles d’arbitrage international en existence à de possibles comités conjoints. Dominic Raab, secrétaire d’Etat britannique à la justice, suggère comme issue « la plus probable » un comité d’arbitrage avec un juge nommé par l’UE, un autre par le Royaume-Uni, et un troisième choisi conjointement. « Chacune des parties va vouloir garder un demi-œil sur ce que fait l’autre », explique-t-il.

Une méfiance mutuelle

Dans ce format, l’UE et le Royaume-Uni pourraient avoir recours « de façon volontaire » à la CJUE, en lui demandant d’interpréter la loi européenne. L’accord entre l’UE et la Moldavie, cité en exemple par Londres, fonctionne déjà de cette façon. De même, la jurisprudence de la CJUE sur les questions jugées avant le Brexit pourrait continuer à s’appliquer, suggère le gouvernement britannique.

Il n’est pas certain que ces propositions suffisent à rassurer Bruxelles. La commission européenne s’inquiète en particulier de la façon dont les ressortissants européens vivant outre-Manche seront traités, et elle veut conserver un œil sur les éventuelles disputes qui iraient devant les tribunaux.

Mais Londres rappelle qu’aucun accord entre l’UE et le reste du monde n’est directement sous la juridiction de la CJUE. Les accords de libre-échange avec le Canada ou le Vietnam ont donné lieu à des modèles d’arbitrage, par exemple. Il souhaite une approche similaire pour les discussions sur le Brexit.