Les syndicats attendent maintenant de voir. Comme les organisations patronales, chacun d’entre eux sera reçu, de mercredi à vendredi, par le ministère du travail avant la présentation le 31 août des ordonnances qui permettront au gouvernement de réformer le code du travail. Jean-Claude Mailly, le secrétaire général de FO, indique surveiller « ce qui se passe cette semaine comme le lait sur le feu ». « Je suis très vigilant », ajoute-t-il, insistant sur le fait que « le diable est dans les détails ».

Très remontée contre la loi travail de 2016, FO s’est jusqu’à présent montrée plutôt bienveillante envers le projet gouvernemental. Un changement de pied qui a pu surprendre. « FO a fait le bilan de son opposition à la loi El Khomri : elle a pu constater qu’elle était à la remorque de la CGT et que ce n’était pas forcément payant, d’autant que cette hostilité n’a abouti à rien », note Dominique Andolfatto, professeur de science politique à l’université de Bourgogne.

Pour la première fois depuis le début des concertations autour du projet de réforme du code du travail, premier chantier sensible du président Macron, les partenaires sociaux vont disposer d’un texte sur la base duquel discuter. Un « bout d’ordonnance » qui peut encore évoluer, assurent les différents acteurs. « On va essayer de faire bouger les lignes jusqu’au bout, tant que nous n’avons pas la dernière version, celle qui sera rendue publique le 31 août, nous continuerons à pousser », indique M. Mailly. Pour lui, il n’est d’ailleurs pas exclu qu’un consensus puisse être trouvé avec le gouvernement : « Ils connaissent nos positions, finalement tout dépendra de là où ils mettent le curseur. » Ce qui est sûr, ajoute-t-il, c’est que « si ça se passe mal, ce ne sera pas de notre faute ».

« Réforme régressive »

A la CFDT, on se dit aussi vigilant car bien que la plupart des grandes orientations soient déjà connues, « tout dépendra de la rédaction ». Le renforcement du rôle de la branche, les modalités de fusion des instances représentatives du personnel ainsi que la confirmation d’une augmentation des indemnités légales de licenciement sont au cœur des préoccupations de l’organisation réformiste réputée peu hostile à la réforme portée par la ministre du travail, Muriel Pénicaud.

La CFE-CGC, qui représente les cadres, se montre en revanche peu amène. « On ne croit à rien dans cette réforme qui est totalement idéologique, dénonce François Homméril, son président. C’est la voiture-balai de toutes les mesures les plus libérales laissées sur le côté lors des dernières lois. » Ce dernier est aussi agacé par la forme de ces rendez-vous qui se déroulent en bilatéral avec le ministère du travail. « C’est une méthode un peu suspecte, s’agace M. Homméril. Il faudrait réunir tout le monde autour de la table pour que chacun argumente sur ce qu’il défend. » Une demande formulée en vain également par d’autres syndicats, notamment la CGT.

La centrale de Montreuil, qui dénonce une « réforme régressive », compte rappeler au gouvernement les lignes rouges qu’elle ne souhaite pas voir franchir. Mais pour Fabrice Angeï, membre du bureau confédéral, « ce qui peut vraiment faire bouger les ordonnances, c’est la mobilisation des salariés ». L’organisation dirigée par Philippe Martinez appelle à manifester le 12 septembre. Un pari risqué pour la CGT qui, pour l’heure, n’a été rejointe que par SUD. Elle se voit aussi concurrencée par La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon qui a donné rendez-vous à ses partisans le 23 septembre à Paris pour s’opposer à la réforme. « Une gageure pour la CGT qui se retrouve presque obligée de réussir sa mobilisation d’autant que sur le terrain, ce n’est pas évident », souligne Guy Groux, chercheur au Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof).