LES CHOIX DE LA MATINALE

Au menu de ce week-end : plusieurs expositions à Paris et en province, avec Jean-Michel Othoniel et ses « Géométries amoureuses » à Montpellier et à Sète ; les trésors cachés du Musée Guimet à Paris ; les photographies underground du Suisse Karlheinz Weinberger aux Rencontres d’Arles ; les créations de Christian Dior au Musée des arts décoratifs à Paris ; mais aussi des paroles de conteurs sur l’île de Vassivière dans le Limousin et l’Edmond Rostand version Alexis Michalik au Théâtre du Palais-Royal à Paris.

EXPOSITION. L’art de la séduction selon Othoniel, à Montpellier et à Sète

Sous un titre unique et attirant, « Géométries amoureuses », Jean-Michel Othoniel expose simultanément à Sète (Hérault) – au Centre régional d’art contemporain – et à Montpellier (au Carré Sainte-Anne). Othoniel cultive un art de la séduction fondé sur les charmes visuels du verre coloré et d’un graphisme à la souplesse végétale.

Il montre les sculptures de verre ou d’aluminium de grandes dimensions auquel son nom est désormais associé, mais aussi d’autres verreries plus petites, qu’il faut suspendre à une hauteur telle qu’elles demeurent visibles et que la lumière les traverse. Il y a aussi des peintures sur toile et des séries d’aquarelles agrémentées de collages qui, pour la plupart, répondent aux sculptures.

Pour déconcerter encore un peu davantage, il a placé, à Sète, une pièce monumentale qui n’a que peu de rapport avec ses enchaînements de courbes tracées dans l’air par des boules de diverses couleurs, translucides ou miroitantes. Cette œuvre de 2017 se nomme La Grande Vague. Mesurant plus de 5 mètres de haut, autant en épaisseur, et 15 mètres de long, elle est faite de milliers de briques de verre, de couleur vert sombre, montées sur une structure métallique invisible. Philippe Dagen

« Géométries amoureuses », de Jean-Michel Othoniel, Carré Sainte-Anne, à Montpellier et CRAC Occitanie, à Sète (Hérault). Jusqu’au 24 septembre.

PATRIMOINE. Guimet plonge dans sa malle aux trésors, à Paris

Statue de Vishnou portant sur sa tiare, l’oiseau Garuda, la monture du dieu de la trilogie hindou. Népal, XVIe siècle, en cuivre doré. / RMN-GRAND PALAIS-MUSÉE GUIMET, PARIS / THIERRY OLLIVIER

Pour l’été, le Musée national des arts asiatiques Guimet a sorti de ses réserves une centaine de trésors en or, mais aussi un somptueux mobilier chinois – qui sera exposé en permanence non loin de là, à l’hôtel d’Heidelbach – et une sélection de paysages japonais des grands maîtres de l’estampe illustrée, d’Ho­kusai à Hasui, présentée dans la rotonde du musée.

L’occasion de découvertes inédites, car sur les 45 000 œuvres de Guimet, seules 2 000 sont montrées en permanence place d’Iéna, à Paris. Parmi les merveilles présentées, les figures majeures du panthéon bouddhiste. De l’Inde au Tibet, comme dans toute l’Asie du Sud-Est et jusqu’au Japon, le Bouddha, l’Eveillé, « qui éclaire le monde et déchire la voie de l’ignorance », est généralement sculpté en bois, doré à la feuille ou réalisé en laiton, cuivre et bronze doré.

S’ajoutent des pièces peu exposées pour leur fragilité, comme le papier et les étoffes, tels ces su­tras, enseignements de Bouddha, copiés à l’encre d’or sur papier teinté à l’indigo (Chine, XIIe siècle) ; ou ce précieux kesa japonais (XIXe siècle), châle monastique en satin de soie broché et papier doré, sorte de mandala, symbole de l’univers dont la bande centrale serait l’axe du monde. Florence Evin

« 113 ors d’Asie », Musée Guimet, place d’Iéna, Paris 16e. Jusqu’au 16 octobre. De 7 à 9,50 €.

PHOTOGRAPHIE. Les Helvètes underground de Weinberger, à Arles

Une photographie de la série « Rebels » (1962). / KARLHEINZ WEINBERGER, AVEC L'AIMABLE AUTORISATION DE LA GALERIE ESTHER WOERDEHOFF

De loin, la vie de Karlheinz Weinberger à Zurich semblait réglée comme une horloge suisse : ouvrier chez Siemens jusqu’à la retraite, il n’a jamais changé d’employeur. Il n’a presque jamais voyagé, habitait chez sa mère. Et pourtant, l’existence de ce photographe amateur, mort en 2006, et dont les images étonnantes sont présentées dans une exposition très réussie aux Rencontres d’Arles (Bouches-du-Rhône), fut tout sauf conformiste.

Chaque week-end, pendant toute sa vie, Weinberger a en effet bâti de façon obsessionnelle une œuvre d’une grande cohérence, construite autour de deux axes : le corps masculin et la marginalité. Dans le Zurich conservateur des années 1950, l’homosexualité de Weinberger faisait de lui un être en dehors des clous. Peut-être est-ce la raison pour laquelle, dans sa vie de photographe, il a toujours été attiré par les groupes en rébellion contre la société et ses codes. Sur sa carte de visite, Weinberger décrivait ainsi ses deux spécialités de photographe : « Le portrait et l’extraordinaire ». Claire Guillot

Magasin électrique, Arles (Bouches-du-Rhône). Jusqu’au 24 septembre. De 10 heures à 19 h 30. 12 €.

MODE. Le tourbillon Dior au Musée des arts décoratifs, à Paris

« Christian Dior, couturier du rêve », une exposition jusqu’au 7 janvier 2018. / MUSÉE DES ARTS DÉCORATIFS, PARIS

Il avait pour amis Dali, Giacometti, Calder, et vénérait les impressionnistes, notamment les toiles fleuries de Monet. Christian Dior (1905-1957), galeriste à ses débuts, naviguait dans un environnement artistique qui influa beaucoup sur ses créations, comme l’illustre magnifiquement l’exposition que consacre au couturier le Musée des arts décoratifs de Paris, pour les 70 ans de la célèbre maison.

Trois cents créations – robes, manteaux, tailleurs, etc. – issues de ses ateliers ainsi que des œuvres d’art sont présentées, sur 3 000 m2, dans une mise en scène étourdissante, le visiteur se voyant emporté dans un tourbillon de couleurs et de matières.

Outre les pièces créées par Christian Dior lui-même, dont le fameux spencer « Bar » (1947), taille affinée, épaules et hanches arrondies, parfaitement conçu pour mettre en valeur les courbes féminines, on peut découvrir de nombreuses silhouettes élaborées par les directeurs artistiques qui lui ont succédé à partir de 1957 – Yves Saint Laurent, Marc Bohan, Gianfranco Ferré, John Galliano, Raf Simons et Maria Grazia Chiuri. Et surtout, avoir le plaisir d’en scruter les moindres détails, beaucoup de ces pièces témoignant d’un travail d’un raffinement extrême. On rêverait de pouvoir toutes les porter, l’espace d’un instant. Sylvie Kerviel

« Christian Dior, couturier du rêve ». Musée des arts décoratifs, 107, rue de Rivoli, Paris 1er. Jusqu’au 7 janvier 2018. Du mardi au dimanche de 11 heures à 18 heures (21 heures le jeudi). De 8,50 à 11 €.

FESTIVAL. Les conteurs prennent la parole sur l’île de Vassivière

Vue aérienne des différentes structures du Festival interculturel du conte sur l’île de Vassivière autour du lac. / PAROLES DE CONTEURS

Comme chaque année en plein été, l’île de Vassivière, située au cœur du Limousin sur les communes de Beaumont-sur-Lac (Haute-Vienne) et Royère-de-Vassivière (Creuse), se transforme durant neuf jours en un royaume du conte avec le festival Paroles de conteurs, du 19 au 27 août.

Le vendredi 25 août est consacré à une journée professionnelle regroupant onze artistes qui proposent des extraits de leurs dernières créations ou un spectacle dans son intégralité. En soirée, Stéphane Guertin proposera son spectacle Eau, sortir la tempête du verre, sur les histoires et mythes autour de cette grande ressource naturelle.

Le samedi 26 sera, quant à lui, placé sous le signe de l’Afrique avec un marché d’art africain, des stands et des ateliers et même des spécialités culinaires. En soirée, le conteur et acteur Binda Ngazolo donnera une représentation de son spectacle Minkana, un voyage dans un temps ancien où l’oralité était omniprésente et l’art de la communication avec la nature essentiel. Il sera suivi de la projection du film d’Olivier Delahaye et Dani Kouyaté, Soleils, dans lequel Binda Ngazolo incarne le griot Sotigui Kouyaté (1936-2010).

Enfin le dimanche 27, la journée sera consacrée à partir de 10 heures à un grand rangement du site sur fond d’histoires racontées par les artistes présents et les conteurs amateurs, avec pour objectif de rendre l’île à ses habitantes du reste de l’année, les vaches limousines. Cristina Marino

Paroles de conteurs, 23e Festival interculturel du conte. Jusqu’au 27 août. De nombreux spectacles en journée sont en accès gratuit ou en libre participation, sinon tarifs entre 3,50 et 25 €.

THÉÂTRE. L’Edmond Rostand de Michalik au Théâtre du Palais-Royal, à Paris

« Edmond », d’Alexis Michalik. / ALEJANDRO GUERRERO / THÉÂTRE DU PALAIS-ROYAL

Distingué par cinq Molières, le spectacle d’Alexis Michalik revient à l’affiche du Théâtre du Palais-Royal pour quelques semaines. Le jeune auteur et metteur en scène a écrit sa pièce après la découverte, dans un dossier pédagogique de Cyrano de Bergerac, que la première représentation de cette pièce d’Edmond Rostand fut un triomphe inattendu.

Alexis Michalik a « voulu raconter les mois qui ont précédé », en s’offrant la liberté de « broder », de mélanger le vrai et le faux, à la manière du film Shakespeare in Love. Le dramaturge emmène son public dans une aventure, loin, très loin des pièces centrées sur l’introspection des personnages, dont l’action se déroule autour d’un canapé et d’une table basse. Son théâtre est aussi choral. A chaque fois, une dizaine de comédiens, sans têtes d’affiche, interprètent plusieurs personnages. « Je veux qu’ils soient heureux, et qu’ils aient tous des rôles équivalents. »

Son théâtre enfin est chorégraphique, voire cinématographique : les changements de décors et de costumes s’effectuent à vue dans un tourbillon d’une incroyable fluidité. Tous ces ingrédients lui permettent d’accrocher immédiatement le spectateur. Sandrine Blanchard

Théâtre du Palais-Royal, 38, rue de Montpensier, Paris 1er. Tous les jours sauf dimanche à 21 heures. De 17 à 52 €.