« War of the Chosen » introduit de nouveaux types de héros, comme un alien renégat ayant rejoint la résistance humaine. / 2K

Née en 1994, abandonnée en 2001 puis ressuscitée en 2012, la série de jeux en XCOM est un classique des combats tactiques en tour par tour, qui voit s’affronter depuis près d’un quart de siècle envahisseurs extraterrestres et résistants humains.

Le 29 août sort sur PC, PlayStation 4 et Xbox One War of the Chosen, une extension pour le dernier épisode en date, XCOM 2. Elle verra l’apparition de nouveaux réseaux de résistance ainsi que de nouvelles créatures aliens plus complexes, capables d’évoluer, comme le joueur, bataille après bataille. Pixels s’est entretenu avec Jake Solomon, en charge de la série depuis son reboot.

Est-on plus tranquille quand on sort une simple extension comme War of the Chosen plutôt qu’un nouveau jeu ?

Oui, absolument. C’est drôle parce que je n’avais jamais travaillé sur une extension auparavant. J’ai tendance à être très stressé, mais j’ai dit à ma femme : « ne t’inquiète pas, c’est juste une extension, on travaille sur un jeu que les gens aiment déjà, ça va être tranquille ». Six mois plus tard, je recommençais à devenir fou ! En fait, c’est comme n’importe quel jeu, c’est juste plus court.

On pourrait croire, près de vingt-cinq ans après le premier XCOM et à l’heure des jeux d’action hypercinématographiques, que la tactique en tour par tour serait un genre dépassé. Ce n’est pas le cas. Comment l’expliquez-vous ?

J’aimerais le savoir ! Quand j’ai commencé à travailler sur le reboot de XCOM, je crois que Civilization était le seul gros jeu en tour par tour encore populaire. Le Japon a une longue tradition du jeu en tour par tour, mais Civ était le seul succès global du genre. Mais en interne, on s’est dit que si on pouvait faire Civilization, il n’y avait pas de raison qu’on ne puisse pas faire un autre jeu du genre [Civilization et XCOM sont développés par le même studio américain, Firaxis].

Parfois c’est une bonne chose d’être naïf : on s’est dit qu’il y avait sans doute un public qui n’attendait que ça, et c’était effectivement le cas. Le XCOM original est mon jeu préféré, mais son public à l’époque ne devait pas être très important. La plupart de nos joueurs n’y ont pas joué. Et tant mieux : ça veut dire que le public moderne y a été sensible. Depuis, on voit quelques autres jeux explorer cette voie.

Jake Solomon, concepteur des deux derniers épisode de la série « XCOM ». / 2K

Nintendo et Ubisoft par exemple : on a souvent dû vous le dire mais leur Mario + The Lapins Crétins : Kingdom Battle ressemble beaucoup à XCOM ! Où étiez-vous quand il a été annoncé ?

En fait, je suis étonné qu’il n’y ait pas davantage de gens qui me posent la question (rires) ! J’étais à l’E3 [le salon du jeu vidéo de Los Angeles, durant lequel le jeu a été annoncé en juin]. J’étais à l’hôtel, avec la conférence de presse de Nintendo en fond sonore, et mon téléphone a commencé à vibrer. Je reçois plein de tweets, de SMS, je me demande ce qu’il se passe. Je regarde la conférence, et je vous jure, je n’ai jamais été aussi surpris de ma vie. C’était le même système de déplacement, les mêmes icônes pour les couvertures, on voyait Luigi courir se cacher derrière un demi-abri… J’étais KO : ils les montraient tirer, se mettre en état de surveillance… Au départ j’étais tellement surpris, j’ai cru que je faisais un AVC. Et puis après j’ai réalisé que c’était juste génial, très excitant. Je vais enfin pouvoir jouer à un jeu de combat tactique en tour par tour…

… Sur lequel vous n’avez pas travaillé !

Oui ! Et puis je vais pouvoir y jouer avec ma fille ! J’ai trois filles, de 7, 4 et 1 ans. Pour elles, XCOM est un simulateur d’habillage de soldats. Elles ne sont même pas au courant qu’on peut s’y battre, parce que ça ne serait pas très responsable de leur montrer. Maintenant je vais enfin pouvoir leur montrer !

Mario + The Lapins Crétins emprunte beaucoup à XCOM, mais peut-être que vous y trouverez aussi de l’inspiration ?

Oui, ils ont fait des choses très malines, comme le fait de pouvoir courir à travers des ennemis, attaquer sans s’arrêter avant de retourner à couvert… C’est une super mécanique de jeu. Je me dis que c’est comme ça qu’on aurait dû faire nos attaques de mêlée. Je trouve ça super. Cela va sans doute permettre des combos. Croyez-moi, j’ai étudié le truc de près.

L’objectif de « War of the Chosen » : insuffler un peu de vie dans un univers trop « froid et calme », selon ses concepteurs. / 2K

Malgré les 25 ans d’existence de la série, malgré les concurrents, comment fait-on pour continuer à proposer des nouveautés intéressantes ?

Le vrai défi, c’est de savoir jusqu’où aller. On joue à nos jeux, et on se demande où sont les trous à combler. On ne peut pas juste rajouter de nouvelles histoires et dire « voilà, c’est notre suite », parce que les gens ne jouent pas à nos jeux pour leur histoire. On ne peut pas non plus changer le décor, donner des épées à tout le monde et dire « voilà, c’est un XCOM fantasy » : il faut de nouveaux systèmes. Mais nous avons une chance : XCOM est très rejouable. J’y ai joué, évidemment, des milliers et des milliers d’heures, et je suis toujours content de relancer une partie. Ce n’est pas un mensonge ou du marketing, je m’amuse vraiment à y jouer. C’est une chance parce que l’équipe continue d’y jouer et de se demander ce qu’il serait cool d’y changer. Honnêtement j’ai tellement d’idées que je ne pourrai sans doute jamais faire tous les XCOM que j’ai en tête.

Et qu’est-ce que vous vouliez améliorer avec War of the Chosen ?

XCOM 2 raconte l’histoire des extraterrestres qui ont pris le pouvoir sur terre et de l’humanité qui tente de résister. Les enjeux sont immenses. Mais quand on joue au jeu, on ne les ressent pas. Le monde est froid, calme. Je me suis dit qu’il fallait qu’on sente qu’on n’était pas seul dans ce monde, qu’il y avait d’autres gens qui se battent, se parlent, nous parlent, parlent à l’ennemi… On a aussi rajouté des messages de propagande qu’on entend en rentrant de mission, qui essayent de minimiser ce qu’il vient de se passer, alors qu’au contraire quand on arrive au QG de la résistance, tout le monde se félicite… Ce genre de choses.

Vous le disiez, personne ne joue à XCOM pour l’histoire. Il n’y a pas un risque à amener XCOM trop loin dans cette voie ?

Nous en sommes conscients. C’est pour ça que ça nous a pris beaucoup de temps de créer des personnages ennemis, parce qu’on sait que l’histoire la plus importante dans XCOM, c’est celle que le joueur se raconte. Quand les joueurs parlent de XCOM ils ne disent pas « tu as vu ce rebondissement à la fin ? ». Ils parlent de la façon dont leurs soldats se sont battus, ou sont morts. On garde toujours ça à l’esprit : nous avons ajouté des personnages au monde, mais ce n’est pas eux dont il est question, mais de ce qu’en fait le joueur. C’est un trou que nous avons comblé, je pense.

A quand une extension Mario + The Lapins Crétins + XCOM ?

Je pense que, si j’arrivais à joindre Ubisoft…

Ils ne sont pas loin d’ici !

C’est vrai qu’ils ne sont pas loin d’ici ! Si je pouvais les joindre, ainsi que Nintendo… Dans War of the Chosen il y a trois Elus [des héros extraterrestres], trois factions, mais si je pouvais en faire une quatrième, avec des personnages de Nintendo, je mourrais heureux !