A l’époque candidate du Parti du peuple pakistanais (PPP) aux élections législatives, Benazir Bhutto a été assassinée le 27 décembre 2007, à 54 ans, par une attaque suicide, en plein meeting électoral. / ARIF ALI / AFP

La justice pakistanaise a rendu son tout premier verdict, jeudi 31 août, dans l’affaire de l’assassinat de l’ex-première ministre Benazir Bhutto. Son rival de l’époque en politique et ex-président, Pervez Musharraf, a été déclaré « fugitif », selon un responsable du tribunal.

A l’époque candidate du Parti du peuple pakistanais (PPP) aux élections législatives, Benazir Bhutto fut assassinée le 27 décembre 2007, à 54 ans, par une attaque-suicide, en plein meeting électoral à Rawalpindi.

Cinq suspects relaxés

Ce n’est que cinq ans plus tard, en août 2013, que l’ancien président Pervez Musharraf a été formellement accusé de « meurtre, complot criminel pour meurtre et d’avoir facilité l’assassinat » de sa rivale. Il est désormais le seul suspect dans cette affaire, puisque le tribunal a relaxé jeudi cinq suspects, qui devaient être libérés après plus de neuf ans en détention.

Ces jeunes islamistes, présumés proches du kamikaze qui avait perpétré l’attentat, un adolescent de 15 ans originaire du Waziristan du Sud, fief des rebelles islamistes, avaient été écroués peu après les faits et inculpés.

Deux responsable de la police de Rawalpindi ont été condamnés jeudi à dix-sept ans de prison chacun et à 500 000 roupies (4 000 euros) d’amende « pour leur mauvaise gestion de la scène du crime ». Il est reproché au chef de la police, Saud Aziz, et à son adjoint, Khurram Shahzad, de ne pas avoir assuré la sécurité de la candidate et d’avoir fait laver les lieux de l’attentat moins de deux heures après les faits.

Fuite à Dubaï

En 2010, l’ONU a accusé dans un rapport le gouvernement de Pervez Musharraf de ne pas avoir fourni une protection adaptée à Mme Bhutto, soulignant que sa mort aurait pu être évitée.

Le tribunal a ordonné que soient confisqués les biens de Pervez Musharraf, qui avait quitté son pays en mars 2016 pour recevoir des soins médicaux à Dubaï — alors que son interdiction de sortie du territoire venait d’être levée —, promettant de revenir pour affronter ses juges. Il n’a, à ce jour, pas tenu sa promesse. « Il n’y aura pas de justice tant que Pervez Musharraf ne répondra pas de ses crimes », a réagi jeudi la fille de Mme Bhutto, Aseefa Zardari.

L’ancien dirigeant nie toute implication dans l’attentat. En 2013, Heraldo Munoz, nommé en 2009 président de la commission d’enquête de l’ONU sur le meurtre de Benazir Bhutto, écrivait que l’affaire ressemblait au meurtre d’un chef de village dont tous les villageois portent, à un degré divers, une part de responsabilité.

« Al-Qaida a donné l’ordre, les talibans pakistanais ont exécuté l’attaque, éventuellement appuyés ou au moins encouragés par des éléments de l’establishment (militaires et/ou services secrets), le gouvernement de Musharraf a facilité le crime par sa négligence, les responsables de la police locale ont tenté de camoufler l’affaire, les gardes du corps de Bhutto ont échoué à la protéger, et la majorité des politiciens pakistanais préfèrent tourner la page que d’enquêter sur les acteurs derrière ce meurtre », estimait-il.