Les Rohingya, considérés comme des étrangers en Birmanie, pays à plus de 90 % bouddhiste, sont apatrides. | Bernat Armangue / AP

Les Rohingya continuent de fuir la Birmanie en masse. En une semaine, 27 400 d’entre eux sont passés au Bangladesh voisin, selon les derniers chiffres publiés par l’ONU vendredi 1er septembre. C’est 9 000 de plus qu’il y a deux jours. Sans compter les 20 000 autres qui seraient bloqués à la frontière. Ces réfugiés, principalement Rohingya – groupe ethnique de confession musulmane vivant principalement dans l’Etat d’Arakan, dans le sud-ouest de la Birmanie –, fuient les combats entre leur minorité et l’armée birmane.

Parallèlement, l’armée birmane a annoncé vendredi que les combats dans le nord-ouest du pays avaient fait environ 400 morts en une semaine, principalement des combattants Rohingya.

Dans le village de Chut Pyin, l’ONG locale, Fortify Rights, a recueilli les témoignages de survivants qui évoquent une tuerie de près de cinq heures. « D’après une liste que nous avons pu établir, au moins 130 personnes ont été tuées, dont des femmes et des enfants », a précisé à Chris Lewa, du projet Arakan, une organisation de défense des droits des Rohingya, à l’Agence France-Presse.

Dans un post sur Facebook en début de semaine, le gouvernement avait évoqué une grande opération dans cette zone. « Les troupes ont échangé des tirs avec 80 terroristes Bengalis [le terme utilisé par les autorités pour désigner les Rohingya] armés de bombes artisanales, de couteaux et de lances », avait précisé le pouvoir birman, dirigé par Aung San Suu Kyi, l’ex-dissidente et lauréate du prix Nobel de la paix.

Frontière fermée avec le Bangladesh

Vendredi, environ 150 rebelles musulmans de l’Armée du salut des Rohingya de l’Arakan (ARSA) s’étaient attaqués à des postes de police du Myanmar (nom officiel de la Birmanie), armés de couteaux et de fusils. Les violences avaient fait au moins 104 morts, dont une douzaine de policiers birmans et de nombreux rebelles.

Depuis, des centaines de villageois de l’ethnie Rakhine, bouddhistes, ont fui leurs habitations pour rejoindre des villes birmanes situées hors de la zone des troubles. Des dizaines de milliers de Rohingya ont également pris la route de l’exil vers le Bangladesh voisin. Plus de 400 000 réfugiés de l’ethnie musulmane, qui ont fui de précédentes vagues de violences, s’y trouvent déjà. Mais le Bangladesh, qui ne peut en accueillir davantage, a fermé sa frontière.

Des réfugiés Rohingya retenus par des gardes-frontières bangladais après être entrés dans le pays illégalement, le 31 août. | MOHAMMAD PONIR HOSSAIN / REUTERS

Malgré tout, nombre de Rohingya tentent leur chance sur des rafiots de pêche pour franchir la rivière Naf, qui marque une frontière naturelle entre la Birmanie et la pointe sud-est du Bangladesh.

La traversée est cependant particulièrement périlleuse en cette période de mousson en Asie du Sud. Vendredi, dix-huit nouveaux corps ont ainsi été retrouvés sur la rive bangladaise de la rivière. Ces derniers jours, ce sont 41 corps qui se sont échoués, a fait savoir un officiel de la région de Cox’s Bazar, sous le couvert de l’anonymat.

Considérés comme des étrangers en Birmanie, pays à plus de 90 % bouddhiste, les Rohingya sont apatrides, même si certains vivent dans ce pays depuis des générations. L’envoyée spéciale de l’ONU en Birmanie, Yanghee Lee, s’est dite jeudi « sérieusement préoccupée » par la situation, et a réclamé que le cycle de la violence soit « rompu de manière urgente ».