Muriel Pénicaud et Edouard Philippe  à Matignon, le 31 août, pendant la rencontre avec les syndicats, à l’occasion de la présentation des ordonnances de la loi travail. / JEAN-CLAUDE COUTAUSSE / FRENCH-POLITICS POUR LE MONDE

C’est la mesure surprise annoncée jeudi midi lors de la présentation des ordonnances réformant le code du travail. Le gouvernement prévoit en effet l’instauration, par un accord négocié dans l’entreprise, d’une « rupture conventionnelle collective ». Une mesure qui avait été écartée par l’exécutif précédent dans la loi El Khomri.

« La négociation dans l’entreprise, pour toutes les tailles d’entreprise, pourra définir un cadre commun de départ strictement volontaire, et qui devra, comme pour la rupture conventionnelle individuelle, être homologué par l’administration, détaille le texte de l’ordonnance. Il s’agit de transposer la rupture conventionnelle, mise en place après une négociation interprofessionnelle en 2008, au niveau collectif. »

L’objectif du gouvernement est de sécuriser les plans de départ volontaire, encadrés par la seule jurisprudence, en leur donnant un régime juridique spécifique. Aujourd’hui, les ruptures conventionnelles, séparation à l’amiable entre un salarié et son employeur, ne peuvent être conclues qu’individuellement, et donnent droit à l’assurance-chômage. Demain, la réforme introduira donc la possibilité, par signature d’un accord d’entreprise validé par l’administration du travail – « Une fois de plus, on fait confiance aux acteurs », argue la ministre du travail Muriel Pénicaud –, de procéder à cette rupture de manière collective, en lieu et place du plan de départ volontaire.

« Une façon d’éviter un PSE »

Une mesure qui a fait tousser quelques syndicats. Car cette mesure prive les salariés de nombre d’avantages associés au plan de départ volontaire, comme le contrat de sécurisation professionnelle, une mesure de suivi intensif pour le retour à l’emploi. La rupture conventionnelle collective introduite par le gouvernement autorise également l’employeur à réembaucher tout de suite, là où le plan de départ volontaire l’en empêchait pendant une année entière. Certains craignent, en outre, qu’elle ne soit utilisée pour cibler les seniors. Une discrimination sur laquelle le gouvernement se dit très vigilant.

« Est-ce que c’est une façon d’éviter un PSE [plan de sauvegarde de l’emploi] ? », s’est interrogé jeudi le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, pour qui cette mesure de rupture conventionnelle collective est « la mauvaise surprise » de la réforme.

Jean-Claude Mailly, numéro un de Force ouvrière, se dit quant à lui vigilant : « Les équipes creusent le dossier et essaient de voir s’il y a des loups sous cette affaire », a prévenu le dirigeant syndical.