Un homme passe devant téléviseur de rue montrant le premier ministre japonais Shinzo Abe (gauche) et le président américain Donald Trump (froite) dans un bulletin d’information sur leur conférence téléphonique au sujet de la menace de la Corée du Nord, à Tokyo, au Japon, le 3 septembre 2017. / TORU HANAI / REUTERS

Le président des États-Unis a réagi avec virulence, comme à son habitude, à l’annonce d’un nouvel essai nucléaire nord-coréen sur son compte Twitter, dimanche matin 3 septembre. En trois messages publiés de bon matin, il a dénoncé les « mots » et les « actions » d’un « Etat voyou », qui « continuent d’être très hostiles et dangereux pour les États-Unis ».

Il a commenté également sans ménagement le jeu de la Chine, allié à Pyongyang, « qui essaie d’aider mais avec peu de succès », et celui de la Corée du Sud, liée aux États-Unis par un accord de défense et dont le « discours d’apaisement avec la Corée du Nord ne fonctionnera pas ». « Ils ne comprennent qu’une chose ! », a ajouté M. Trump à l’intention des responsables nord-coréens dans une évocation à peine voilée à une option militaire.

La Corée du Nord est devenue un casse-tête pour M. Trump, avant même son arrivée à la Maison Blanche. Le 2 janvier, s’exprimant sur son canal favori, il avait répondu à des menaces de Pyongyang en réaffirmant avec détermination l’objectif poursuivi par ses prédécesseurs : empêcher que le régime puisse disposer de l’arme nucléaire. « Cela n’arrivera pas » avait-il promis.

Escalade rhétorique

Le nouveau président, cependant, ne dispose pas de meilleures cartes qu’eux pour y parvenir compte tenu du coût jugé exorbitant pour la région d’un recours aux armes. La rupture avec la « patience stratégique » vainement employée par Barack Obama pendant ses deux mandats s’est certes accompagnée d’un durcissement du ton de Washington. Mais il n’a pas produit plus de résultats comme l’a prouvé la multiplication des essais balistiques nord-coréens, avant le test nucléaire du 2 septembre.

Le 8 août, M. Trump s’est lancé dans une escalade rhétorique en promettant « le feu et la fureur » au régime de Kim Jong-un, avant de juger cette formule « pas assez dure ». « Des solutions militaires sont en place, verrouillées et chargées, au cas où la Corée du Nord agisse imprudemment. Espérons que Kim Jong-un s’engage sur une autre voie ! », avait ajouté M. Trump le 11 août, avant de mettre en garde le responsable nord-coréen qui avait évoqué des tirs de missiles balistiques à proximité de l’île américaine de Guam.

« S’il fait quoi que ce soit visant Guam, ou un autre territoire américain, ou un allié des États-Unis, il le regrettera vraiment et il le regrettera rapidement. »

Dissonance

Cette escalade avait éclipsé le succès obtenu par les États-Unis quelques jours plus tôt : le vote à l’unanimité par le Conseil de sécurité des Nations unies de sanctions contre le régime nord-coréen dont peu d’experts considèrent cependant qu’elles peuvent être de nature à peser sur la détermination de Pyongyang. Elle a souligné également des dissonances au sein de l’administration américaine.

Lorsque le régime nord-coréen avait renoncé à son projet de tirs près de Guam, le secrétaire d’Etat Rex Tillerson a assuré le 15 août que Washington est « toujours intéressé par la recherche d’une voie vers le dialogue ». Après le tir d’un missile ayant survolé le Japon avant de s’abîmer dans le Pacifique, le 28 août, M. Trump a cependant estimé, toujours sur Twitter, que « parler n’est pas la solution ». « Nous ne sommes jamais à court de solutions diplomatiques », a cependant aussitôt réagi le secrétaire à la défense, James Mattis.

Avant son départ de la Maison Blanche, le 18 août, le conseiller stratégique du président, l’ultranationaliste Stephen Bannon, avait jugé dans un entretien qu’« il n’y a pas de solution militaire » pour la Corée du Nord.

« Laissons tomber. Tant que quelqu’un n’aura pas résolu l’équation qui me démontrerait que dix millions de Sud-Coréens ne mourront pas dans les 30 minutes suivantes, tués par des armes conventionnelles, je ne vois pas de quoi on parle, il n’y a pas de solution militaire, ils nous tiennent. »

La complexité de l’équation nord-coréenne est enfin accrue par le mélange de dossiers pratiqué par le président. M. Trump ne fait pas mystère de son impatience à voir Pékin peser plus fortement sur le régime de Pyongyang. Mais il ne cesse d’accompagner cette attente d’un discours offensif visant les pratiques commerciales de la Chine, comme l’a illustré l’ouverture d’une enquête mi-août, sur les transferts de propriété intellectuelle imposés par les autorités chinoises aux entreprises américaines. Cette posture agressive n’épargne pas les alliés des États-Unis. Selon la presse américaine, M. Trump envisagerait ainsi de remettre en cause dans les prochains jours un accord commercial avec la Corée du Sud.