Dimanche 3 septembre, le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauqiez a gravi le Mont-Mézenc (Haute-Loire), un rituel politique organisé depuis 2012. / PHILIPPE DESMAZES / AFP

Même s’il reste quelques écueils et de nombreuses résistances sur sa route, Laurent Wauquiez est bien lancé à l’assaut du parti Les Républicains (LR). Dimanche 3 septembre, le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes a gravi le Mont-Mézenc (Haute-Loire), un rituel politique organisé depuis 2012. Avant cette ascension très métaphorique, le vice-président de LR a confirmé dans un discours sa volonté d’être candidat au scrutin des 10 et 17 décembre.

« C’est fini de baisser la tête, c’est fini de se taire. Nous allons faire renaître l’espoir à droite », a-t-il lancé devant 1 500 personnes, selon les chiffres communiqués par son équipe. Une prise de parole où il a remobilisé ses sympathisants après un printemps électoral sombre : « Nous avons une forte responsabilité. Je ne me résigne pas à ce que la seule opposition en France soit Mélenchon. Je vois bien le projet de Macron d’anéantir tout ce qu’il y a entre lui et les extrêmes. »

« Nous ne céderons plus »

Après avoir critiqué Emmanuel Macron – « un vide en marche mais il ne sait pas vers où » – et Jean-Luc Mélenchon « qui parle » aux « zadistes » mais pas à « la France qui travaille », M. Wauquiez a déroulé sa vision de la droite en promettant de se dresser contre les « censeurs parisiens » et les « commentateurs ».

« Je ne me renierai pas. Plaire à tout le monde est la maladie de la politique moderne. Nous ne céderons plus », a-t-il poursuivi en se faisant le porte-parole d’une droite « qui ne s’excuse pas » : « Les valeurs que nous défendons ne sont pas celles de la droite dure, ce sont les valeurs centrales de la France. »

Fidèle à sa volonté de renouer le lien avec l’électorat populaire, Laurent Wauquiez s’est placé du côté de la France des salariés en demandant le rétablissement des heures supplémentaires défiscalisées, en défendant les classes moyennes « assommées de charges », en chantant les « paysages, le terroir et les produits de notre agriculture ».

Se poser en contre-modèle de M. Macron

Dans ce discours que n’aurait pas renié Nicolas Sarkozy, M. Wauquiez s’est posé en défenseur d’une identité française qu’il estime menacée par le communautarisme et l’islam radical. « Nous ne devons plus céder un seul pouce face à l’islam radical », a-t-il déclaré en prônant une vision assimilatrice : « La France n’est pas une juxtaposition de communautés, la France c’est un destin commun. Certains ne veulent plus s’adapter mais demandent au contraire que la France s’adapte. »

Avec cette ligne politique conservatrice sur les valeurs, « enracinée », et cette politique plus sociale, M. Wauquiez espère se poser en contre-modèle de M. Macron. Ses soutiens ne cessent de répéter qu’il doit convaincre les perdants de la mondialisation attirés par le FN. Une stratégie qu’avait déjà mis en place Nicolas Sarkozy en 2007 et 2012.

Dans cette campagne interne où les militants trancheront, Laurent Wauquiez a aussi tenté de rassurer certaines personnalités de son parti qui le trouvent trop droitier et clivant pour rassembler sa famille éparpillée. « Mon obsession sera le rassemblement. Je ne répondrai à aucune polémique, à aucune caricature. (…) Je tendrai la main tout le temps et inlassablement », a-t-il promis tout en rassurant ses partisans : « Rassembler, ce n’est pas se renier. »

Voilà toute la difficulté de la campagne de Laurent Wauquiez : il n’a aucune envie de tempérer ses positions pour ne pas décevoir les militants et l’électorat frontiste mais ses idées effraient toute l’aile modérée de la droite.

Multiples attaques

Pour son premier week-end de candidat, il a déjà subi de multiples attaques. Valérie Pécresse a ouvert les hostilités, samedi, dans les colonnes du Parisien, en mettant en garde contre la droitisation de son parti. « Si la droite met les doigts dans cet engrenage-là, ça ne sera plus ma droite », a averti la présidente de la région Ile-de-France qui craint un éclatement de sa formation politique en cas d’élection de M. Wauquiez : « Le risque existe. Pour le conjurer, on doit assumer nos différences et ne pas chercher à les étouffer. »

A la Baule dans l’après-midi, au Campus des Républicains, Mme Pécresse a modéré ses propos tout en les assumant : « Certains ont peut-être mal pris mes propos de ce matin, mais c’est vrai qu’après des défaites il y a des risques de divisions », a souligné celle qui doit lancer son mouvement, Libres !, le 10 septembre. « Et pour ne pas créer de divisions, il faut qu’on se sente bien dans la famille. (…) Il faut, non pas se recroqueviller sur le noyau dur de nos militants, mais essayer de repartir à la reconquête de tous les Français. »

Le profil de Laurent Wauquiez, un homme passé de la démocratie chrétienne à la droite dure, est une des données qui complique le rassemblement autour de lui. Samedi, sur Europe 1, Laurence Sailliet, candidate à la présidence du parti, a pointé la proximité de M. Wauquiez avec Sens commun, l’émanation politique de la Manif pour tous. « Quand on cite comme partenaire de notre parti un mouvement qui exclut les autres, je ne pense pas que nous allons reconquérir le cœur des Français », a estimé cette proche de Xavier Bertrand.

Frédéric Lefebvre, ancien sarkozyste qui a quitté la parti et s’est beaucoup recentré depuis quelques années, a, lui, écrit une tribune au vitriol contre le candidat favori. Dans le Huffington Post, il évoque une dérive « sectaire » et une « emprise intellectuelle de l’école buissonnière [du nom de Patrick Buisson] qui pourrit les LR par la tête, transformant ce parti aux racines libérales, gaullistes et centristes en nid de conservateurs de tout poil ».

Le ralliement d’une proche de M. Juppé

Face à ce début de front anti-Wauquiez, pour le moment très disparate, M. Wauquiez a commencé à afficher ses soutiens ce week-end. Les représentants d’une droite dure, Brice Hortefeux et Eric Ciotti, étaient présents mais aussi Damien Abad, vice-président du groupe LR à l’Assemblée qui a commencé sa carrière à l’UDF.

Il a surtout réussi une belle prise de guerre en s’alliant Virginie Calmels. L’adjointe d’Alain Juppé à la mairie de Bordeaux a annoncé son soutien dans le JDD avant de prendre la parole au Mont-Mézenc. Elle va former un « tandem » avec M. Wauquiez, selon les termes de ce dernier.

Ce choix permet à M. Wauquiez de s’offrir une image de rassembleur. L’ancienne présidente d’Endemol France a longtemps été vue comme la dauphine de M. Juppé à Bordeaux même si elle n’est pas appréciée par tous les juppéistes qui la trouvent trop ambitieuse. Elle avait agité l’idée de sa candidature à la présidence de LR avant de rejoindre M. Wauquiez.