Casterman

Confetti d’Empire situé à 18 000 kilomètres de Paris, la Nouvelle-Calédonie fut le terrain d’une expérience insolite en matière de colonisation au début du XXe siècle. Jusque-là peuplé d’autochtones et de bagnards libérés, l’archipel s’ouvrit à une émigration volontaire, encouragée par l’Etat dans l’idée de créer une « petite France australe ».

Dans La Vallée du diable, Anthony Pastor suit Blanca, Pauline, Florentin et Félix, quatre de ces colons « honorables ». Chacun a de bonnes raisons de partir : les deux premières sont veuves, le troisième est orphelin et le dernier a perdu toutes ses illusions sur le front de la première guerre mondiale, qui s’est achevée il y a peu. La petite compagnie s’installe à Grande-Terre, l’île principale de Nouvelle-Calédonie, à l’invitation d’un propriétaire terrien vivant seul avec sa fille. Las, l’utopie d’un nouveau monde va se heurter à la violence coloniale et raciale. Leur peine purgée, les anciens détenus du bagne de Nouméa s’adonnent à des activités frauduleuses, dont sont victimes les populations mélanésiennes, refoulées dans des cantonnements.

Dignes d’une tragédie shakespearienne, des relations amoureuses contrariées entre les principaux personnages enveniment le climat explosif de cette île bien peu paradisiaque. Dessin hargneux et atmosphère délétère : Anthony Pastor nous invite à découvrir l’enfer aux antipodes.

La Vallée du diable, Anthony Pastor, Casterman, 128 pages, 20 €.