Ce week-end à Armentières (Nord), l’heure n’était pas aux préparatifs de la journée de grève du 12 septembre. Dans cette commune, socialiste depuis 1959, la population était plutôt préoccupée par la météo capricieuse, capable de gâcher la fête des Nieulles, du nom d’un petit biscuit local. « Je viens de parcourir la braderie et personne ne m’en parle, constatait samedi le maire, Bernard Haesebroeck. L’impact de cette grève devrait être limité même si, ici, la problématique liée à l’emploi est récurrente. »

Dans cette ville de 25 000 habitants, située à une quinzaine de kilomètres de Lille, la loi El Khomri avait mobilisé lycéens et syndicalistes en avril 2016. Pneus brûlés, autoroute bloquée, « épeutnaerts » (épouvantails) aux surnoms de « François le Mou » ou « Manu le banquier » incendiés devant les banques : même le siège local du PS avait subi les foudres des manifestants. « Le mécontentement était vraiment palpable dans la population, estime le maire PS. Là, moins. On est peut-être encore dans l’anesthésie de la surprise électorale des derniers mois. »

A la mairie, un préavis de grève a été déposé. Certains services, comme la restauration scolaire, seront perturbés mais le maire confirme qu’il y fera face : « C’est curieux que cela ne prenne pas, surtout avec la hausse de la CSG, la fin des emplois aidés, etc. » Il faut dire que ce 12 septembre, les syndicats partent en ordre divisé : la CGT manifestera avec Solidaires et la FSU, mais FO et la CFDT n’y seront pas.

« Il y aura un effet boule de neige »

A l’union locale de la CGT, on constate que « ça grogne doucement ». « Surtout dans les petites entreprises et chez les artisans, note Patrice Jourdain, secrétaire adjoint de l’union locale. Après la mise en place des ordonnances, quand les salariés seront impactés, il y aura un effet boule de neige. » En attendant, la CGT se félicite d’avoir rempli deux bus de cinquante personnes qui rejoindront la manifestation à Lille, l’après-midi. On reste quand même loin du petit millier de manifestants de 2010 contre la réforme des retraites.

Dans les lycées armentiérois, les syndicats savent qu’il sera difficile de mobiliser dix jours après la rentrée scolaire, « même s’il y a un fort intérêt », ajoute Catherine Piecuch, secrétaire FSU du Nord - Pas-de-Calais. Au centre hospitalier d’Armentières (CHA), le mouvement pourrait en revanche être important. « On a des gros problèmes de trésorerie et on veut nous enlever neuf RTT sur quinze, proteste David Huyghe, secrétaire général CGT au CHA. Deux semaines de moins, c’est du pouvoir d’achat en moins ». Après la diffusion de trois tracts cette semaine, l’aide-soignant espère 60 % à 70 % de grévistes sur les 1 100 agents hospitaliers.

Dans le privé, peu de mouvement. Au sein de l’usine de boulonnerie Beck Industries, il y a eu une distribution de tracts de la CGT. « Sur nos 265 salariés, on pense qu’il y en aura cinq en grève ou qui seront en journée de délégation », estime le patron, Hugues Charbonnier. Habituellement, les appels nationaux sont peu suivis dans l’entreprise.