Remise des clés d’un appartement dans le 6e arrondissement de Lyon. / Sandra Mehl pour Le Monde

Mauvaise nouvelle pour les propriétaires bailleurs : l’observatoire Clameur, qui analyse 450 000 baux d’habitation, estime que les loyers ont diminué de 0,6 % en France depuis le début de 2017. A cette période de l’année, les loyers ont plutôt l’habitude d’augmenter de 0,5 %. Le recul est donc significatif.

Les loyers baissent dans les deux tiers des villes de plus de 100 000 habitants. Et dans un quart, les loyers progressent moins vite que l’inflation. Nantes, Toulon, Saint-Etienne, Reims, Bordeaux, Angers, Grenoble, Villeurbanne, Marseille, Le Havre et Rennes voient, par exemple, les loyers moyens perdre entre 0,5 % et 3,6 %.

En revanche, à Paris, les loyers ont augmenté de 1,7 % et de 0,2 % à Lyon. Mais encore faut-il que le propriétaire fasse des travaux pour augmenter son loyer car pour des relocations sans travaux, les loyers baissent partout lors du changement de locataire, et même à Paris (- 5,5 %).

L’ampleur de la diminution dépend de la surface du logement. Les loyers des studios sont quasiment stables, quand ceux des deux et trois pièces baissent de 0,5 % à 0,9 % et ceux des quatre pièces et plus de 1,2 % à 1,7 %.

Clameur souligne la perte de pouvoir d’achat des propriétaires bailleurs. De 2013 à 2017, les loyers de marché ont certes augmenté de 0,2 % par an en moyenne, mais l’inflation se situait à 0,6 %.

Moins de travaux

Les propriétaires voient donc leurs revenus s’éroder alors que leurs charges augmentent. L’Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI) estime que la taxe foncière, acquittée par le propriétaire, a augmenté de 14,70 % en moyenne entre 2010 et 2015. De son côté, l’Association des responsables de copropriété (ARC) constate un bond de 30 % des charges de copropriété depuis les années 2000. Une partie est acquittée par le locataire, mais un tiers environ reste à la charge du propriétaire.

Pour compenser le manque à gagner, les propriétaires rognent sur les travaux. L’effort d’amélioration est au plus bas depuis 20 ans. Seuls 14,2 % des logements font l’objet de travaux entre deux locataires.

Cette conjoncture devrait s’accentuer dans les mois à venir. Selon Michel Mouillart, professeur à l’Université de Paris Ouest-Nanterre La Défense et responsable de l’observatoire Clameur, la demande locative est fragile. L’amélioration du marché de l’emploi est lente, le pouvoir d’achat n’augmente pas, les locataires ont donc peu de moyens supplémentaires à consacrer à leur loyer.

De plus, ces dernières années, les taux d’intérêts très bas ont incité tous les locataires qui le pouvaient à acheter un logement plutôt que de rester en location : « les locataires qui restent en place sont donc des ménages plus modestes, ce qui va alimenter la déflation des loyers », estime M. Mouillart.

Bien sûr, les locataires peuvent se réjouir de payer moins cher leur logement. Mais le manque d’entretien pourrait entraîner à long terme une dégradation du parc locatif privé. Et le tassement des loyers n’incite pas les propriétaires à proposer leurs logements vacants à la location, ce qui est un problème dans les zones tendues comme Paris.

Alors que le président de la République appelait, mardi 5 septembre, les bailleurs privés à faire un effort pour compenser la baisse des APL en diminuant les loyers de 5 euros, Clameur estime que l’effort a déjà été consenti par les bailleurs. Depuis le début de l’année, les loyers ont baissé de 6 euros par mois en moyenne en France, et même de 12 euros en Haute-Normandie, ou encore de 10 euros en Bourgogne.