A Flushing Meadows, Rafael Nadal a de nouveau assis sa domination sur le tennis masculin. Comme la veille dans le tableau féminin, les 23 000 spectateurs du court Arthur-Ashe ont assisté, dimanche 10 septembre, à une finale de l’US Open en sens unique. Kevin Anderson n’a pas su démentir les pronostics l’annonçant battu – sinon balayé – par un « Rafa » parti à la conquête d’un 16e titre du Grand Chelem.

Le géant de Johannesburg (2,03 m) n’a résisté que six petits jeux avant que l’Espagnol ne prenne la mesure de son adversaire et de son engagement en trois manches (6-3, 6-3, 6-4).

La partie a été à l’image de deux semaines traversées sans véritable opposition pour le taureau de Manacor : jamais il n’avait bénéficié d’un tableau aussi ouvert en majeur, son meilleur adversaire – Juan Martin Del Porto en demi-finales – occupant la 24e place mondiale. La célébration tout en retenue de Nadal après la balle de match en disait long sur l’écart qui sépare les deux joueurs et l’absence de tout suspense sur le sort du tournoi.

Pas de larmes ni de chute au sol pour l’Espagnol, normalement prompt à accueillir avec force émotion une nouvelle ligne majeure à son palmarès. Cette victoire lui permet pourtant d’asseoir sa place au panthéon de son sport. Avec désormais seize titres en tournois du Grand Chelem, le Majorquin n’est dépassé que par Roger Federer, qui compte trois majeurs de plus.

Les deux joueurs se sont partagé les quatre tournois les plus importants de l’année (Open d’Australie et Wimbledon pour le Suisse ; Roland-Garros et US Open pour l’Espagnol), ce qu’ils n’avaient plus réalisé depuis 2010.

« L’une des meilleures saisons de ma carrière »

Ce retour de Nadal au sommet du tennis mondial intervient après qu’il a erré plusieurs saisons à la recherche de son meilleur niveau, entre pépins physiques et défaillances psychologiques.

Mai 2016 : les yeux embués et l’avant-bras emprisonné dans une attelle, l’actuel numéro un mondial annonce la mort dans l’âme son retrait de Roland-Garros. Qualifié pour le troisième tour à coup d’anti-inflammatoires, il s’incline devant l’avis des médecins, qui ne donnent pas cher de son poignet gauche s’il se maintient dans le tableau.

« Cela fait partie de la vie, de ma carrière, lâche alors l’Espagnol. Je vais essayer de revenir pour tenter de gagner de nouveau Roland-Garros. » Une promesse de retour au plus haut niveau qui, à l’époque, ne suscite que doute et scepticisme.

Cette année-là, Nadal boucle une seconde saison d’affilée vierge de titres en Grand Chelem. Touché et stoppé par des blessures à répétition, il ne parvient plus à bousculer les Djokovic, Murray ou Wawrinka, qui règnent alors sur le tennis.

Aux atteintes physiques s’ajoute une perte de confiance chez celui que l’on qualifiait de « rouleau compresseur » pour sa capacité à prendre l’ascendant psychologique au fil des rencontres. Nadal, qui multiplie les contre-performances face à des adversaires largement à sa portée, confie alors souffrir d’une « angoisse ». Une mauvaise passe impensable au vu de ses résultats cette année.

En remportant l’US Open, Rafael Nadal assied encore plus sa place au panthéon du tennis. / Julie Jacobson / AP

A 31 ans, l’Espagnol a rallié cette saison trois finales en Grand Chelem (sur quatre), s’imposant sans véritable résistance à Roland-Garros et New York. « C’est l’une des meilleures saisons de ma carrière, se réjouit le désormais triple vainqueur de l’US Open. C’est une année spéciale, à tous les aspects, émotionnels aussi, après plusieurs saisons sans gagner de titres en Grand Chelem : 2014 et 2016 ont été difficiles à cause des blessures, tandis que 2015 était une année difficile, pas à cause d’une blessure, mais d’un point de vue psychologique. »

« Rafa » dispose désormais de près de 2 000 points d’avance – l’équivalent d’un tournoi du Grand Chelem – sur son nouveau dauphin au classement ATP : Roger Federer. Les meilleurs ennemis du circuit n’ont plus occupé les deux premières places mondiales depuis 2011.

S’il affirme ne pas « voir la vie ou [sa] carrière en [se] comparant avec les autres » et ne se soucier guère de ce que son aîné « en gagne un, deux ou 24 de plus », l’Espagnol continue sa poursuite de Federer dans la hiérarchie des joueurs les plus titrés du tennis. Une quête qu’il devra mener sans son coach et oncle Toni, qui a choisi de se consacrer exclusivement à leur académie ouverte par la famille à Majorque.