La résolution 2375 prévoit une suspension des exportations textiles de la Corée du Nord et impose un plafond aux importations de pétrole brut à destination du pays. | STEPHANIE KEITH / REUTERS

Le Conseil de sécurité des Nations unies (ONU) a adopté, lundi 11 septembre, à l’unanimité, une résolution (la 2375) instituant de nouvelles sanctions contre la Corée du Nord. Ces mesures ont été prises en réaction au sixième essai nucléaire du régime, dimanche 3 septembre. Elles viennent s’ajouter à une liste déjà longue.

Le Conseil de sécurité de l’ONU a multiplié les résolutions à l’encontre du régime de Pyongyang après que celui-ci s’est retiré du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (en 1993) et a développé son arsenal nucléaire et, surtout, à partir du premier essai nucléaire nord-coréen, en 2006 : pas moins de 17 résolutions ont ainsi été adoptées, dont sept assorties de sanctions.

Donald Trump et Kim Jong-un sur un écran dans le métro de Séoul, le 10 août 2017. | Ahn Young-joon / AP

Que prévoient les nouvelles mesures décidées par l’ONU ?

Le texte adopté « est le fruit d’un compromis pour avoir tout le monde à bord », a souligné François Delattre, le représentant français à l’ONU. En l’occurrence, pour obtenir la signature de Pékin et de Moscou, plus proches alliés du régime nord-coréen, Washington a accepté de revoir ses demandes à la baisse. Le texte interdit les exportations de textile et instaure un embargo partiel et progressif sur le pétrole et ses produits dérivés et total pour le gaz naturel. Ce dernier point a été accepté par la Chine, ce qui constitue une première.

Quelle a été la nature des sanctions votées ces dernières années ?

  • Résolution 1718 du 14 octobre 2006 : elle fait suite au premier essai souterrain réalisé par la Corée du Nord, le 9 octobre 2006. Le texte, rédigé par Washington, décide d’un embargo sur les armes de destruction massive du régime et des sanctions visant à punir ses dirigeants. La résolution appelle les Etats à inspecter le fret nord-coréen et à geler ses fonds voués aux armes nucléaires, biologiques ou chimiques. Elle demande par ailleurs le gel des actifs financiers détenus à l’étranger par toute personne ou organisation liée au programme nucléaire ou de missiles balistiques de la Corée du Nord.
  • Résolution 1874 du 12 juin 2009 : le Conseil de sécurité condamne un essai nucléaire survenu le 25 mai. Le texte impose des sanctions économiques et commerciales et exige que le gouvernement nord-coréen reprenne immédiatement les pourparlers et renonce à son annonce de retrait du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.

  • Résolution 2087 du 22 janvier 2013 : cette résolution fait suite au tir d’une fusée le 12 décembre 2012. Le Conseil de sécurité « exige » de la Corée du Nord qu’elle « ne procède à aucun nouvel autre tir nucléaire ou tir recourant à la technologie des missiles balistiques ». Il « se déclare résolu à prendre des mesures décisives » en cas d’infraction. A l’issue du vote, l’ambassadrice américaine, Susan Rice, affirme que la Corée du Nord « paierait un prix de plus en plus élevé » si elle choisissait la confrontation.

  • Résolution 2094 du 7 mars 2013 : cette résolution est votée après l’essai nucléaire du 12 février 2013 à l’issue de trois semaines de négociations entre les Etats-Unis et la Chine. Elle s’efforce de tarir les sources de financement utilisées par Pyongyang pour nourrir ses ambitions militaires et balistiques.

  • Résolution 2270 du 2 mars 2016 : elle fait suite au 4e essai nucléaire (le 6 janvier) et au tir d’un missile longue portée, capable de mettre sur orbite un satellite, le 7 février. Cette résolution est adoptée à l’unanimité après des négociations entre Washington et Pékin. Elle renforce les sanctions, avec des restrictions au commerce maritime et à l’exportation de minerais ainsi que l’interdiction de se procurer du carburant pour avions et fusées.

  • Résolution 2321 du 30 novembre 2016 : après un essai nucléaire le 9 septembre, le Conseil de sécurité adopte cette résolution qui plafonne les ventes nord-coréennes de charbon à 400,9 millions de dollars (ou 7,5 millions de tonnes) par an à partir du 1er janvier 2017, soit une réduction de 62 % par rapport à 2015. La Chine, seul débouché pour le charbon nord-coréen, vote en faveur de la résolution.

  • Résolution 2371 du 5 août 2017 : elle vise à pousser Pyongyang à la négociation après le premier tir d’un missile intercontinental, le 4 juillet, jour de la fête nationale américaine, puis à nouveau le 28 juillet. La résolution vise les revenus tirés des exportations nord-coréennes, notamment dans les secteurs du charbon, du fer et de la pêche. Les navires nord-coréens qui violeront les résolutions de l’ONU sont menacés d’être bannis des ports de tous les pays. Avec ce texte, Washington parvient à convaincre la Chine et Moscou de renforcer la pression internationale.

Les nouvelles sanctions peuvent-elles faire fléchir Pyongyang ?

Toutes les résolutions et sanctions votées ces dernières années ne sont pas parvenues à empêcher la Corée du Nord de développer son arsenal nucléaire. Et peu de monde pense que les nouvelles mesures décidées le 11 septembre y parviendront.

Ces sanctions devraient avoir un impact important sur les rentrées de devises de la Corée du Nord et plus largement sur son économie, souligne Antoine Bondaz, chercheur à la Fondation pour la recherche stratégique. Mais elles ne pousseront toujours pas, selon le chercheur, la Corée du Nord à se dénucléariser.

« Les membres du Conseil de sécurité, y compris la Chine et la Russie considèrent qu’il est indispensable de prendre des sanctions, pour freiner les développements du programme nucléaire de la Corée du Nord », relève M. Bondaz. Mais, ajoute-t-il, si les différents acteurs disent « oui aux sanctions », celles-ci « seules ne suffisent pas ».

Le président russe, Vladimir Poutine, considère, pour sa part, que les sanctions sont « inefficaces » : selon lui, les Nord-Coréens « mangeront de l’herbe mais ne renonceront pas au programme » nucléaire.

Les sanctions sont un outil de la « diplomatie coercitive », rappelle M. Bondaz, soulignant que dans cette expression il ne faut pas oublier « diplomatie ». A ce propos, il faut souligner que le président chinois Xi Jinping a eu un entretien avec Emmanuel Macron, vendredi 8 septembre, pour contribuer à l’apaisement de la crise avec la Corée du Nord.

La chancelière allemande, Angela Merkel, se dit, quant à elle, prête, dans une interview à la Frankfurter Allgemeine Sonntagszeitung, à participer à une initiative en vue de mettre un terme au programme nucléaire et balistique de Pyongyang sur le modèle des discussions sur le nucléaire iranien.