Une manifestation contre la réforme du droit du travail, le 3 mai 2016, à Toulouse. / REMY GABALDA / AFP

La première manifestation de rentrée contre la réforme du code du travail s’ouvre, mardi 12 septembre, sur des dissensions. Une mobilisation qui a valeur de test pour la CGT, qui a appelé au rassemblement ; mais aussi pour Emmanuel Macron, qui affiche sa détermination à réformer, en ce début de quinquennat. Les syndicats, tout en se montrant très critiques face au contenu des ordonnances, sont divisés sur la riposte à adopter.

Un an quasiment jour pour jour après la toute dernière mobilisation contre la loi travail, la CGT, la FSU, Solidaires et l’UNEF appellent à protester contre le nouveau texte, qu’ils qualifient de « loi travail XXL ». Des grèves sont attendues à la SNCF, RATP, Air France, France Télévisions… Fonctionnaires, étudiants, lycéens sont aussi appelés à participer.

La réforme du code du travail, vue par les syndicats comme une « remise en cause » des droits des salariés, sera le fil rouge de la mobilisation. Mais d’autres réformes annoncées inquiètent, comme la baisse des aides personnelles au logement (APL) ou la hausse de la CSG, mais aussi, dans la fonction publique, le gel du point d’indice (qui sert aux calculs de la rémunération des fonctionnaires), les réductions d’effectifs ou le rétablissement du jour de carence.

  • Solidaires, FSU et l’UNEF se joignent à la CGT

Seuls Solidaires, la FSU et l’UNEF ont décidé de se joindre aux cortèges de la CGT. « Il n’y aura pas que la CGT dans la rue », a promis son secrétaire général, Philippe Martinez, dimanche, dans Le Parisien. « Plus de 180 lieux de manifestations ont été recensés » et « on va dépasser les 4 000 appels à la grève sur tout le territoire », a précisé le secrétaire général de la CGT. Il y voit le signe d’« une effervescence et d’un très fort mécontentement ».

  • FO et la CFDT se désolidarisent

FO s’est désolidarisée de la CGT, alors que les deux organisations avaient présenté un front uni contre la loi El Khomri. Jean-Claude Mailly, son secrétaire général, estime qu’il ne faut pas « user » les forces maintenant, car « on en aura peut-être besoin demain ». En ligne de mire, les discussions imminentes sur la réforme de l’assurance chômage.

Ne comprenant pas la position de Jean-Claude Mailly, plus de la moitié des unions départementales FO, soit une cinquantaine, et au moins sept de ses fédérations ont décidé de passer outre, et de défiler aux côtés de la CGT. « Beaucoup de camarades se sont laissés porter par la CGT qui a fait de la retape partout, car ils ne sont pas sûrs de leur coup », regrette un dirigeant de FO.

La CFDT ne défile pas non plus, malgré la « profonde déception » et même la « colère » face aux ordonnances, de même que la CFE-CGC, qui voit pourtant des « zones de risques vers le dumping social ».

Pour autant, le dialogue n’est pas rompu entre les cinq confédérations représentatives. Leurs leaders se sont retrouvés, le 5 septembre, au siège de la CFDT, pour faire le point. « Les analyses sont beaucoup moins divergentes que lors de la loi El Khomri, souligne Fabrice Angei, membre du bureau confédéral de la CGT. Nous pensons que la jonction pourra se faire dans le temps. »

  • La France insoumise, concurrente de la CGT

La CGT devra aussi composer avec La France insoumise (LFI) qui organise une manifestation, le 23 septembre à Paris, contre ce qu’elle qualifie de « coup d’Etat social ». Une initiative qui a crispé encore un peu plus des relations déjà compliquées entre Philippe Martinez et Jean-Luc Mélenchon. Les deux hommes se sont entretenus, le 6 septembre, à l’Assemblée nationale. Le chef de file de la CGT a fait savoir qu’il ne serait pas présent à la marche de LFI, le 23 septembre, quand le député des Bouches-du-Rhône, lui, a coché la date du 12 dans son agenda. Tous les membres du groupe parlementaire LFI seront présents, a-t-il fait savoir.

Pour contrer la concurrence du mouvement de M. Mélenchon, la CGT a annoncé une nouvelle journée de mobilisation, le 21 septembre, à la veille du conseil des ministres au cours duquel doivent être présentées les ordonnances – et deux jours avant la manifestation de LFI…

  • Différentes lignes au PS

La mobilisation pourra compter sur le soutien de personnalités politiques, dont Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, David Cormand, secrétaire national d’EELV, mais aussi l’ex-candidat socialiste à la présidentielle, Benoît Hamon. Mais le Parti socialiste est divisé entre ceux qui souhaitent participer à la manifestation du 12 septembre, et ceux qui considèrent qu’ils ne sont « ni syndicalistes ni insoumis ».

« Le Parti socialiste respecte l’indépendance syndicale (…) et soutient toutes les démarches syndicales qui iront contre les ordonnances Macron-Pénicaud », a explicité, dans un premier temps, un des porte-parole du parti, Karim Bouamrane. Avant de préciser, mardi 5 septembre :

« Le PS soutient (…) toutes les démarches de mobilisation, mais il ne sera pas pour autant co-initiateur de la manifestation du 12 septembre. »

La formation adoube ainsi ses militants souhaitant y participer. Tout en laissant place à l’interprétation de chacun quant au degré de mobilisation du parti ce mardi-là.

Une posture qui ne fait pas l’unanimité en interne. Olivier Faure, le patron des députés socialistes, était même allé dans le sens inverse, lors d’une conférence de presse : « Nous ne serons pas présents le 12, nous ne serons pas présents le 23 », date de la manifestation organisée par La France insoumise. La sortie du chef de file des députés a suscité quelques agacements chez ceux qui avaient déjà fait savoir qu’ils rejoindraient les rangs des cortèges syndicaux.

Par ailleurs, dans ses statuts, le parti « encourage » ses membres à appartenir à une organisation syndicale. A défaut de cortège estampillé PS, d’aucuns entendent défiler mardi avec le Mouvement des jeunes socialistes (MJS), qui a annoncé samedi sa participation à la manifestation.