Infographie / Le Monde

Alors que la désormais tempête Irma est en Géorgie, aux Etats-Unis, le défi de la reconstruction s’impose à tous les territoires dévastés par l’ouragan. Le président Emmanuel Macron est attendu mardi 12 septembre dans les Antilles françaises, où la dépression, au plus fort de sa puissance, a ravagé les îles de Saint-Barthélemy et Saint-Martin la semaine dernière. Il devra répondre à la détresse et à la colère des habitants, ainsi qu’aux mises en cause sur la gestion de la catastrophe par le gouvernement.

L’ouragan Irma ne s’est pas dissipé mais a été rétrogradé en tempête tropicale, et évolue en direction de l’Alabama après avoir tué trois personnes en Géorgie. Les vents ont faibli à 85 km/h mais des inondations sont encore à craindre. Une quarantaine de personnes avaient déjà perdu la vie dans les Caraïbes après le passage de l’ouragan.

  • A Saint-Martin et Saint-Barthélemy, reconstruire des îles presque entièrement détruites

L’île de Saint-Martin a été dévastée à 95 % par Irma, toutes les écoles ou presque ont été rasées. / Carlos Giusti / AP

« L’investissement est complet, et la reconstruction le sera, rassurez-vous », a affirmé lundi Emmanuel Macron, relayé par le premier ministre Edouard Philippe : « La reconstruction doit sans attendre mobiliser toute notre énergie », a-t-il déclaré à l’issue de la première réunion du comité interministériel pour la reconstruction des deux îles à Matignon. Un délégué interministériel sera par ailleurs nommé dans les prochains jours afin de coordonner la reconstruction.

Après les critiques de l’opposition sur sa gestion de l’ouragan en amont, le chef du gouvernement a fustigé des « polémiques politiciennes ». « Pas une heure n’a été perdue, a certifié le ministre de la transition écologique, Nicolas Hulot, dans Le Parisien de mardi. L’Etat a fait tout ce qu’il pouvait faire. »

Le président de la République fait le déplacement avec ses ministres de l’éducation et de la santé, alors que la plupart des écoles ont été rasées, et les hôpitaux endommagés. Ces derniers ayant « beaucoup souffert », le premier ministre a annoncé la mise en place d’un « centre de soins sous tente de grande capacité » pour les victimes de l’ouragan au stade de Marigot de Saint-Martin, et ce dès mardi. Le Tonnerre, un navire de la marine française, devrait également arriver prochainement et servira d’hôpital flottant.

Alors que la rentrée des classes n’a pas pu avoir lieu, M. Philippe a déclaré que l’objectif était « d’assurer la reprise des cours dans des conditions normales à la rentrée des vacances de la Toussaint ». Sur les 21 écoles que compte Saint-Martin, seules « trois restent entières ». Le coût des dégâts dans les Antilles françaises est estimé pour l’heure à 1,2 milliard d’euros.

  • Des habitants de Saint-Martin pressés de quitter l’île

Dans un paysage de ruines et privé d’eau potable – au moins trois mois seront nécessaires pour reconstruire les systèmes de distribution –, les secours, militaires et forces de l’ordre sont désormais 1 500 et passeront bientôt à 2 000.

A l’aéroport de Saint-Martin Grand-Case, les dégâts sont limités selon son gestionnaire, mais il est trop tôt pour déterminer la date de la reprise du trafic commercial. Sur place, les ponts aériens et maritimes ont repris pour évacuer les plus vulnérables dans un sens, et acheminer du fret et des vivres dans l’autre. Environ 85 tonnes de nourriture, un million de litres d’eau et 2,2 tonnes de médicaments ont déjà été transportés.

Des habitants de Saint-Martin attendant à l’aéroport de Grand-Case Esperance pour quitter l’île. / MARTIN BUREAU / AFP

Les habitants, qui sont nombreux à insister sur le manque de soutien de la métropole, se pressent à l’aéroport pour quitter l’île. Une cellule d’accueil et d’orientation a été mise en place à l’aéroport de Pointe-à-Pitre. Des listes de tous ceux qui veulent partir seront « constituées », avec une priorité donnée « aux personnes les plus fragiles et dont les logements seraient inhabitables, notamment les personnes âgées, les familles avec de jeunes enfants », a précisé le premier ministre.

Après les scènes de pillage observées à la suite de l’ouragan, le ministre de l’intérieur, Gérard Collomb, a évoqué « 23 arrestations depuis le 7 septembre ». Il a toutefois tenu à distinguer les « vols que nous pourrions presque qualifier de nécessité (…) de denrées », commis par des personnes « qui ont tout perdu, qui ont peur, (…) faim et soif », et de l’autre « des vols (…) d’opportunité », concernant de la « hi-fi, de la bijouterie, de l’électroménager », qui peuvent faire l’objet de gardes à vue. « L’ordre public a été rétabli », a soutenu M. Collomb.

Le couvre-feu interdisant toute circulation entre 19 heures et 7 heures reste en vigueur à Saint-Martin jusqu’à mercredi.

  • La Floride moins touchée que prévu

Selon les premières estimations, le passage de l’ouragan en Floride pourrait avoir été moins destructeur que prévu. Le passage de la dépression a malgré tout laissé des millions de personnes sans électricité et des routes impraticables, compliquant le retour chez eux des évacués. Les dégâts sont estimés entre 20 et 60 milliards de dollars, selon plusieurs experts en assurance.

Le bilan humain a été actualisé lundi à deux victimes, contre trois auparavant, qui ont perdu la vie dans des accidents de la route. Deux autres personnes ont perdu la vie en Géorgie, et une en Caroline du Sud.

Les destructions sont particulièrement lourdes dans l’archipel des Keys, « dévasté » selon le gouverneur de Floride, Rick Scott, qui a survolé lundi le chapelet d’îles, où Irma a frappé dimanche matin en ouragan de catégorie 4 avec des vents de plus de 215 km/h.

Des habitations endommagées après le passage d’Irma dans l’archipel des Keys, au sud de la Floride. / Matt McClain / AP

Le gouverneur de Floride a averti les 6,3 millions de personnes évacuées que le retour à la normale serait long, notamment en raison des dégâts sur le réseau électrique, qui ont privé de courant plus de 6 millions de Floridiens. Le président américain, Donald Trump, qui a proclamé dimanche l’état de catastrophe naturelle en Floride, a annoncé qu’il se rendrait « très vite » dans l’Etat.

  • A Cuba, un bilan plus lourd qu’annoncé

Un quartier de La Havane, où l’eau a pénétré sur plus de 500 mètres à l’intérieur des terres et s’est retirée en laissant un paysage dévasté. / YAMIL LAGE / AFP

A Cuba en revanche, à seulement 150 km de la Floride, le bilan est beaucoup plus grave : au moins 10 personnes sont mortes dans plusieurs provinces. Electrocution, chute d’un balcon sur un autobus, noyade ou effondrement d’habitations : les causes sont diverses, souligne la défense civile, qui estime que certaines des victimes n’ont « pas observé les consignes » en « refusant d’être évacuées ».

Avec des rafales atteignant 256 km/h au moment de l’impact, dans la nuit de samedi à dimanche, selon les médias d’Etat, Irma est le plus puissant ouragan dont l’œil ait touché directement Cuba depuis 1932. Des vagues atteignant jusqu’à 7 mètres ont été observées sur la côte nord par le service de météorologie cubain, Insmet.

Irma a provoqué d’importantes inondations dans l’île, et l’interruption de l’alimentation électrique à La Havane. Le Venezuela a annoncé lundi l’envoi de 10 tonnes d’alimentation, d’eau potable et d’effets de première nécessité à son allié cubain.

Outre le Venezuela et la France, les Etats-Unis, le Royaume-Uni et les Pays-Bas ont déployé des moyens (fonds, forces de l’ordre, bateaux, avions…) pour venir en aide à leurs ressortissants dans les îles des Caraïbes, les plus touchées par l’ouragan.

Après Irma, Cuba lourdement endommagé