Une fois Paris sélectionné, un logo olympique sera dévoilé sur la place du Trocadéro à Paris. / LUDOVIC MARIN / AFP

Jour J pour les JO. Mercredi 13 septembre à 20 heures (13 heures à Lima), Paris sera — sauf fort improbable retournement de situation — officiellement désigné pour accueillir les Jeux olympiques de 2024, cent ans pile après ses derniers jeux. Une victoire sans suspense pour le comité de candidature français, la 130e session du Comité international olympique (CIO) ne faisant qu’entériner à main levée la double attribution des JO de 2024 et de 2028 aux deux seules villes encore en lice, la capitale française et Los Angeles. La métropole californienne ayant annoncé à la fin de juillet sa candidature pour l’édition 2028, la voie est libre pour Paris. Mais cette ascension vers les sommets de l’olympisme n’a pas été une promenade de santé pour Paris. Chronologie d’une campagne.

  • 6 juillet 2005 : la désillusion

13 h 49 à Singapour, coup de Trafalgar. Par 54 voix à 50, Londres obtient l’organisation des Jeux olympiques de 2012 face à Paris. Dans la salle, pour Marie-Jo Pérec, Jackson Richardson, Tony Parker et David Douillet — ainsi que pour Bertrand Delanoé, maire de Paris, et le ministre des sports Jean-François Lamour —, la chute est vertigineuse. Après les échecs de ses précédentes candidatures pour les JO de 1992 (obtenus par Barcelone) et de 2008 (organisés par Pékin), la capitale française est sûre de la supériorité technique de sa candidature, qui pavoise jusqu’aux colonnes de l’Assemblée nationale. Face à elle, Londres — qui postule pour la première fois depuis 1948 — ne présente-t-elle pas un budget surdimensionné là où le CIO requiert de réduire la voilure ? Mais voilà, comme le soulignera l’ex-secrétaire d’Etat américain Henry Kissinger deux mois plus tard : « Les Français n’ont pas compris ce qu’est le CIO », et ils ont été vaincus par le lobbying anglais auprès des membres du CIO, porté par Sebastian Coe et le premier ministre Tony Blair. De cette « immense déception », Anne Hidalgo, alors première adjointe à la mairie de Paris, et le comité olympique français tireront des leçons en vue d’une prochaine candidature.

Lire notre enquête de 2006 : Comment Paris a perdu les JO 2012
  • 6 novembre 2014 : Hollande prend position
« Je suis favorable à ce que la ville de Paris, si elle en décide, présente sa candidature pour les Jeux olympiques. C’est très important, car ce sera un moment de ferveur, et surtout ce sera plein d’équipements avant, plein d’emplois, plein d’industries qui pourront se montrer. »

Intervenant « Face aux Français » à la télévision, François Hollande effleure la possibilité d’une candidature pour la « capitale française, mais capitale culturelle du monde. » Le président reconnaît alors qu’il faudra convaincre Anne Hidalgo, récemment élue maire de Paris et « pas vraiment favorable » à une nouvelle candidature lors de sa campagne électorale. Dès le lendemain, la maire tempère les propos du président, assurant que « rien ni personne ne [la] fera changer de calendrier », attendant notamment la remise d’un rapport sur une éventuelle candidature, prévue pour le début de 2015. « Pas question d’avoir une candidature de témoignage, martèle-t-elle, en rappelant les trois échecs passés. Je sais ce qui se passe quand le rêve se fracasse. »

  • 23 juin 2015 : Paris se prend aux Jeux

Après avoir cheminé vers une candidature au début de l’année 2015, notamment après la remise d’une étude de faisabilité à la maire de Paris, la capitale française officialise sa candidature en juin par une formule d’époque : « 3… 2… 1… Tweetez ! » Porté par Bernard Lapasset, maître de la diplomatie sportive, et Tony Estanguet, triple champion olympique de canoë-kayak, le projet se veut mené par les athlètes. Paris ayant « retenu les leçons du passé, déclare alors Guy Drut, c’est le mouvement sportif qui porte la candidature. »

  • 16 septembre 2015 : les adversaires connus

« Nous accueillons cinq villes exceptionnelles, aux qualités indéniables. » Au lendemain de la clôture du dépôt des candidatures, le président du Comité international olympique (CIO), Thomas Bach, se félicite des cités candidates. Face à Paris, qui fait figure de favori, Rome, Budapest, Hambourg et Los Angeles sont en lice ; la dernière ayant remplacé Boston, désignée initialement par le comité olympique américain, qui a jeté l’éponge faute de soutien populaire. Hambourg prévoit alors de faire valider sa candidature par un référendum deux mois plus tard, et des sondages plus que positifs.

  • 22 février 2017 : Budapest, Rome et Hambourg jettent l’éponge, place à un duel

Entre le dépôt des candidatures et le début de l’année 2017, trois des cinq villes en lice quittent l’arène. Hambourg, d’abord, dont la population dit « Nein » par référendum (51,7 %) en novembre 2015 à la question de participer à la course ; puis Rome, dont la nouvelle maire, Virginia Raggi, du mouvement Cinq Etoiles, estime la candidature « irresponsable » sur le plan économique et refuse de soutenir des « Jeux du béton ». En février 2017, Budapest renonce à son tour. Petit poucet face aux mastodontes Paris et Los Angeles, la capitale hongroise cède à une forte opposition locale (une pétition contre les Jeux regroupant près de 300 000 signataires). Seule Los Angeles se dresse encore sur la route de Paris.

  • 7 juin 2017 : la possibilité d’une double attribution se dessine

Tous ces renoncements, auxquels s’ajoutent les révélations du Monde sur des soupçons de corruption dans l’attribution des JO de 2016 et de 2020, incitent le CIO à réformer le processus d’attribution des Jeux. Dès mars, Thomas Bach évoque la possibilité d’attribuer lors de la 130e session du CIO l’organisation des JO de 2024 et de 2028, afin de conserver « les deux excellentes candidatures » de Paris et de Los Angeles, et charge un groupe de travail de se pencher sur le sujet. A ce moment, ni Paris ni Los Angeles ne semblent prêts à accepter de se rabattre sur 2028.

Face à l’inflexibilité de Paris, soutenu par le nouveau président français Emmanuel Macron, qui ne parle que de « 2024 ou rien » — insistant notamment sur l’aspect symbolique du centenaire des Jeux de 1924 —, le maire de L.A., Eric Garcetti, ouvre la porte, à la fin du mois de mai, à des Jeux en 2028 dans la Cité des anges : « Si le CIO décide de changer les règles, toute ville devra regarder ce qu’avoir les JO en 2028 veut dire, notre comité de candidature se penchera sur la question. » Quelques jours plus tard, Casey Wasserman, le président du comité de candidature de Los Angeles, fait passer le même message, de façon très claire : « La candidature de Los Angeles 2024 ne concerne pas que 2024. »

  • 11 juillet 2017 : la double attribution votée, Paris aura les Jeux

Afin d’éviter que la course aux JO ne fasse « trop de perdants », le comité exécutif du CIO recommande en juin le principe d’une double attribution. Ce qui est entériné à l’unanimité par les membres du CIO un mois plus tard, quelques jours après le passage de la commission d’évaluation du CIO dans les deux villes candidates. Seule condition, que les deux villes s’entendent sur les dates avant la session de Lima, sans quoi on reviendrait à la procédure initiale. La commission exécutive du CIO est alors chargée de « conclure un accord tripartite » qui conviendra à Los Angeles, à Paris et donc à l’institution. A Paris, Anne Hidalgo salue « une décision qui permet trois gagnants ».

  • 31 juillet 2017 : Los Angeles postule pour 2028

A un mois et demi de la fin de la course, Paris se retrouve seul en lice. Los Angeles annonce à la fin de juillet avoir trouvé un accord avec le CIO qui lui permet d’accueillir les Jeux olympiques de 2028, offrant ainsi quasi définitivement la victoire pour 2024 à la capitale française. Il ne reste aux membres du CIO qu’à entériner la décision mercredi à Lima. Et pour Paris, la véritable organisation des Jeux olympiques commencera alors.