L’avis du « Monde » – on peut éviter

Mother ! sanctionne l’effondrement specta­culaire du « système » Darren Aronofsky (The Wrestler, Black Swan), qui fonctionnait ­jusqu’alors comme un amalgame plus ou moins digeste de scénarios conceptuels, de formalisme à l’épate et de mysticisme new age. Ce nouveau film qui plonge ­Jennifer Lawrence, la star de la saga Hunger Games, dans un improbable Survivor domestique, pousse la formule à son dernier degré de grandiloquence, de laideur plastique et de vanité satisfaite.

Jennifer Lawrence et Javier ­Bardem forment donc à l’écran un couple jamais nommé, vivant ­reclus dans un grand manoir. Lui est un écrivain en quête d’inspi­ration, et elle retape cette maison rescapée d’un précédent sinistre. C’est alors que s’invite un couple de visiteurs envahissants et excessivement indiscrets (Michelle Pfeiffer et Ed Harris), qui indisposent la jeune femme mais rencontrent l’inexplicable complaisance de son époux. Leur présence provoque bientôt une série de ­dégradations, d’accidents et de ­catastrophes en chaîne.

La caméra ne décroche jamais du point de vue de l’héroïne, qu’elle accompagne dans ce huis clos cauchemardesque

La caméra ne décroche jamais du point de vue de l’héroïne, qu’elle accompagne dans ce huis clos cauchemardesque comme en immersion dans une sorte de psychose conjugale. Frustration sexuelle, phobie du monde extérieur, paranoïa, angoisse de la maternité, tout s’engouffre dans la lessiveuse thématique d’Aronofsky, qui se mesure ici à des classiques de l’horreur domestique, tels que ­Rosemary’s Baby (1968), ou Carrie au bal du diable (1976). Il y avait pourtant une belle idée dans tout ce salmigondis : celle d’un personnage faisant corps avec son habitat. Car non seulement la jeune femme découvre que les parois de son foyer saignent, mais elle en vient à éprouver physiquement ces détériorations.

Oppositions grossières

Malheureusement, Darren Aronofsky ­privilégie la piste de la maison comme simple espace mental et métaphore à gros sabots de la créativité foisonnante de l’artiste. Dès lors, le film se dirige vers la confrontation pesante entre deux types de puissances créatrices : celle de l’homme, d’essence artistique, et celle de la femme, d’essence biologique. Alors que son champ psychique lui permettait toutes les audaces, Aronofsky s’en remet à des oppositions grossières – l’éternelle dialectique du Bien et du Mal –, comme le tout-venant du cinéma hollywoodien. En somme, rien de plus faussement novateur que ce film-ci.

MOTHER ! - Bande-Annonce Officielle (VOST) [au cinéma le 13 septembre 2017]
Durée : 02:07

Film américain de Darren Aronofsky. Avec Jennifer Lawrence, Javier Bardem (2 h 01). Sur le Web : www.facebook.com/Mother.lefilm, www.paramountpictures.fr/film/4306-2 et www.facebook.com/OfficialMotherMovie