A Guatemala, le 20 septembre. / JOHAN ORDONEZ / AFP

L’ancien comique Jimmy Morales ne fait plus rire. Après avoir promis de pourfendre la corruption, le président du Guatemala est désormais soupçonné d’avoir été élu grâce à un financement illégal. Des milliers de manifestants se sont mobilisés dans les principales villes, mercredi 20 septembre, pour demander sa démission. Ils étaient 80 000 dans la capitale Guatemala et 148 000 dans tout le pays. Les syndicats, les organisations paysannes et la société civile avaient lancé un mot d’ordre de grève. Malgré l’absence de consigne du patronat, des commerces et des restaurants de la capitale ont fermé leurs portes.

Les protestataires demandent aussi la purge du Parlement, parce que 107 des 158 députés avaient voté en urgence une loi pour éviter aux dirigeants politiques des poursuites pour financement illégal. Le 15 septembre, les élus ont été assiégés pendant huit heures, jusqu’à ce qu’ils acceptent d’annuler leur texte. Les manifestants demandent désormais une réforme électorale et une modification du statut des partis politiques.

Débandade

La crise avait été déclenchée, fin août, lorsque le parquet et la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (Cicig), un organisme sous l’égide des Nations unies, avaient demandé la levée de l’immunité du chef de l’Etat, à cause des soupçons sur sa campagne électorale de 2015. Jimmy Morales avait réagi en ordonnant l’expulsion du Colombien Ivan Velasquez, à la tête de la Cicig. Cette décision avait provoqué les premières protestations, avant d’être annulée par la Cour constitutionnelle. Cependant, les parlementaires ont refusé la levée de l’immunité présidentielle.

« Jimmy Morales a conclu un pacte avec les mafias », assure Alvaro Montenegro, un des fondateurs du mouvement #JusticiaYa (Justice tout de suite), qui avait obtenu, en 2015, le départ de l’ancien président, le général Otto Pérez Molina, impliqué dans une gigantesque fraude douanière. Son successeur, comédien réputé de la télévision, a reconnu avoir touché des milliers de dollars des militaires, compromis dans tous les trafics.

Le scandale provoque une débandade au sein du gouvernement. Quatre ministres, plusieurs vice-ministres et hauts fonctionnaires ont envoyé leur lettre de démission. Le chef de l’Etat lui-même avait renvoyé son ministre des affaires étrangères. Ce dernier l’avait averti que la communauté internationale n’accepterait pas la dissolution de la Cicig, créée pour pallier les défaillances institutionnelles d’un Etat infiltré par le crime organisé. Mercredi, Jimmy Morales est allé présenter ses doléances à l’Assemblée générale de l’ONU.