Le directeur général d’Air France, Franck Terner, lors du lancement de Joon, la filiale à bas coût de la compagnie, le 25 septembre 2017, à Paris. / LIONEL BONAVENTURE / AFP

Représenter une machine de guerre contre les compagnies du Golfe. Tel est l’objectif assigné par Air France à Joon, sa nouvelle « petite sœur », une compagnie aérienne à coûts réduits. Lancée lundi 25 septembre, elle doit prendre son envol le 1er décembre. D’abord avec quatre destinations : Barcelone, Berlin, Lisbonne et Porto. Sa mission : partir « à la reconquête du marché », a déclaré Franck Terner, directeur général d’Air France.

En pratique, les avions de Joon seront placés sur les routes qu’Air France a dû abandonner faute de rentabilité ou sur celles où elle perd de l’argent. « Joon nous permettra d’ouvrir ou de rouvrir des routes où il y a des concurrents agressifs », a souligné le directeur général, visant, sans les nommer, les compagnies Emirates, Qatar Airways et Etihad.

Joon ciblant une clientèle jeune, Air France promet des vols « à des tarifs très attractifs ». Ainsi, « les prix de lancement » des quatre premières destinations sont fixés à 39 euros l’aller simple. Ces tarifs bas seront également mis en place pour les vols long-courriers de la compagnie. Ainsi, il en coûtera 249 euros pour rejoindre Fortaleza (Brésil) ou 299 euros pour se rendre à Mahé (Seychelles).

Séduire les « millennials »

Sur la durée, Air France « ne veut pas que Joon s’engage dans une guerre tarifaire » avec ses concurrents, mais « s’adaptera aux prix du marché », confie son directeur général Jean-Michel Mathieu. En pratique, après les prix « symboliques » du démarrage, calés sous les 40 euros, les tarifs devraient s’établir de « 40 à 45 euros », poursuit-il.

Cette politique commerciale a pour but, selon M. Terner, de séduire en priorité les « millennials », les jeunes nés au tournant du XXIe siècle. Joon veut aussi les séduire en cassant les codes des compagnies régulières. Au placard les uniformes un peu guindés des personnels navigants commerciaux (PNC) d’Air France. Hôtesses et stewards porteront des baskets et des vestes sans manches, près du corps, aux couleurs criardes.

Joon, qui se revendique « mi-low cost, mi-compagnie classique », mise sur la « décontraction, le numérique » avec une touche « écolo-responsable », précise M. Mathieu. Le Wi-Fi sera généralisé à bord et les passagers pourront acquérir des boissons bio, comme du jus de baobab, et des plats issus du « commerce équitable ».

La montée en puissance de Joon sera progressive et limitée. En vertu d’un accord négocié pied à pied avec les pilotes d’Air France, la compagnie ne comptera, en 2020, qu’une flotte de vingt-huit appareils, dont dix-huit moyen-courriers et dix long-courriers. Elle ne devrait donc pas cannibaliser l’activité de Transavia, l’autre filiale low cost d’Air France.

« Laboratoire d’innovations »

Tous les avions de Joon seront dirigés vers la plate-forme de Roissy-Charles-de-Gaulle pour alimenter en passagers les vols d’Air France, tandis que Transavia, qui vise principalement une clientèle « loisirs », est, elle, établie à Orly. Pour éviter tout conflit avec les pilotes, « il n’y aura pas de vols Joon et Air France vers une même destination », prévient M. Terner.

Avant de décoller, Joon a recruté 140 PNC. Elle prévoit d’en embaucher mille d’ici à 2020. Des hôtesses et stewards payés bien moins chers que leurs homologues d’Air France. Une variable d’ajustement, comme disent les syndicats de la compagnie aérienne. Indispensable pour tenir l’objectif fixé de coûts de fonctionnement inférieurs de 15 % à 18 % à ceux d’Air France.

Avec le lancement de Joon, explique M. Terner, « Air France se dote d’un outil plus compétitif grâce à des coûts réduits ». L’idée est de se servir de la petite nouvelle comme d’un « laboratoire d’innovations ». Au bénéfice des passagers d’abord, mais, redoutent certains syndicats, au détriment des salariés d’Air France.