L’usine Alstom de Belfort, le 12 septembre 2016. / SEBASTIEN BOZON / AFP

C’est un mariage qui suscite de nombreuses craintes auprès des salariés français. Les deux groupes industriels Alstom et Siemens ont annoncé mardi 26 septembre la fusion de leurs activités d’équipementier ferroviaire, à l’issue du conseil d’administration du constructeur français et du conseil de surveillance du conglomérat allemand. Les constructeurs ferroviaires ont déclaré dans un communiqué commun la « signature d’un protocole d’accord qui garantit l’exclusivité de rapprocher leurs activités de mobilité dans une fusion entre égaux ».

Le groupe sera coté en France et son siège sera installé en région parisienne. La direction du groupe sera assurée par le PDG d’Alstom « avec 50% du capital de la nouvelle entité détenu par Siemens », indiquent les deux entreprises. L’Etat français, qui siège actuellement au conseil d’administration d’Alstom via des actions prêtées par Bouygues, « confirme mettre fin au prêt de titres (...) au plus tard le 17 octobre 2017 et qu’il n’exercera pas les options d’achat données par Bouygues », indique encore ce communiqué.

Les formes envisagées de la fusion, révélées par Le Monde, le 22 septembre, sont à peu près dessinées. Siemens détiendrait la moitié du capital du nouvel ensemble constitué de l’actuel ­Alstom et des activités matériel roulant, signalisation et systèmes ferroviaires de Siemens. Selon Les Echos, le siège de Siemens-Alstom (15 milliards d’euros de chiffre d’affaires, plus de 1 milliard de résultat d’exploitation) serait fixé à Saint-Ouen, et l’actuel PDG d’Alstom, Henri Poupart-Lafarge en prendrait la direction opérationnelle.

« Contexte difficile »

Patron français mais pouvoir réel allemand, compte tenu du poids que prendrait Siemens dans le capital, notent plusieurs observateurs. Cette situation préoccupe les représentants des salariés français. « Nous allons militer pour une montée de l’Etat au capital si l’opération se fait », note un syndicaliste. La puissance publique a en effet à sa disposition une clause qui lui permet d’acquérir 20 % d’Alstom auprès de Bouygues.

Un an après le choc de la fermeture annoncée puis annulée de l’usine de Belfort, l’inquiétude revient parmi les salariés. « Ils sont meilleurs que nous en signalisation, en automatismes, dans le tramway, dans les locomotives diesel… », énumère un membre du conseil d’administration d’Alstom SA. De fait, une partie des activités des deux entreprises se recoupent. Parmi les fleurons de Siemens, le train rapide ICE est un concurrent redoutable du TGV. L’avance allemande dans l’automatisation et la signalisation ferroviaire de pointe – des activités très rentables – lui permet d’ailleurs d’afficher une marge opérationnelle supérieure de trois points à celle d’Alstom (8,7 % en 2016 contre 5,8 %).

Géographiquement, en revanche, les deux groupes sont plutôt complémentaires. Seule l’usine allemande Alstom de Salzgitter (Basse-Saxe) se retrouve en situation frontale face aux sites d’assemblage européens de Siemens, presque tous situés outre-Rhin. Salzgitter (2 500 salariés) est le plus grand site industriel d’Alstom dans le monde. Et c’est un fleuron. Il produit les prototypes des trains Coradia à hydrogène, dans lesquels Alstom a pris une avance notoire sur ses concurrents.