Des membres du Front national dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, dont Marine Le Pen à gauche, le 12 juillet 2017. / ALAIN JOCARD / AFP

Des amendements de la droite et du Front national pour expulser les étrangers fichés pour radicalisation ont envenimé les débats à l’Assemblée nationale, jeudi 28 septembre, lors de l’examen du projet de loi antiterroriste.

Le ton a monté quand la ministre Jacqueline Gourault, en réponse à une question d’Eric Ciotti (Les Républicains), a précisé que « 15 % » des 16 à 18 000 personnes inscrites sur le fichier de traitement des signalés pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) sont de nationalité étrangère.

« Question de bon sens »

« Pourquoi ces personnes restent-elles sur le territoire français ? », a lancé Valérie Boyer (LR). « Leur expulsion est une évidence », pour l’UDI Mayer Habib, « une question de bon sens dans le contexte actuel » pour Eric Ciotti. Pour le FN Sébastien Chenu, il faut expulser ces étrangers « au nom du principe de précaution ».

Mme Gourault, qui supplée le ministre de l’intérieur Gérard Collomb, a appelé la droite et le FN « à ne pas tout mélanger ». Ce fichier « de renseignement » extrêmement large est « constitué à partir d’un numéro vert » à l’attention des proches de personnes radicalisées, ainsi que par les signalements des services de l’Etat (police, éducation nationale, hôpitaux...), a-t-elle rappelé.

« Vous proposez d’expulser quelqu’un sans jugement, c’est une logique folle, une victoire idéologique de Daech, on sort de l’Etat de droit », s’est indigné Eric Coquerel (LFI). L’ancien premier ministre socialiste Manuel Valls, apparenté LRM, a soutenu la même argumentation : « Dans les fichiers, ce sont des informations, pas des jugements, alors oui ce serait la République des suspects » si une telle disposition était votée.

« Islamo-gauchistes »

Le FN Bruno Bilde s’en est alors pris aux « islamo-gauchistes de la France si soumise », se faisant traiter de « pagano-fasciste » en retour par Alexis Corbière (LFI). Sébastien Chenu (FN) a qualifié de « Bisounours » le MoDem Erwan Balanant.

La communauté de pensée entre les Insoumis et Manuel Valls n’a pas duré longtemps. Alexis Corbière a reproché à l’ex-premier ministre de « parler comme le FN quand il s’agit de taper sur La France insoumise dans les médias ». Manuel Valls a alors dénoncé des « liens » selon lui entre LFI et « ceux qui représentent un danger dans les quartiers ».

Les députés ont par ailleurs rejeté un amendement de Marine Brenier (Constructifs) sur l’information des maires de la présence de fichés S sur leur commune. « Ce renseignement, qu’est-ce qu’un maire en fera ? Il va le porter lourdement tout seul », a jugé Joaquim Pueyo (Nouvelle Gauche), disant s’être posé la question lorsqu’il était maire d’Alençon (Orne).

Ils ont également rejeté des amendements de droite pour interdire le retour en France de Français partis combattre en Syrie, jugés par le rapporteur Raphaël Gauvain (LREM) contraires à la Convention européenne des droits de l’Homme.

Marine Le Pen a également suggéré, en vain, d’autoriser les anciens policiers et gendarmes à porter une arme. En réponse au FN, Mme Gourault a par ailleurs assuré que « plus aucune personne » fichée n’avait un permis de port d’arme.