L’annonce a violemment fait réagir Wall Street. Le président américain, Donald Trump, a évoqué, mercredi 4 octobre, la possibilité d’effacer la dette de Porto Rico, dévasté par l’ouragan Maria il y a deux semaines. M. Trump s’y était rendu mardi pour rencontrer des sinistrés.

« Vous savez, ils doivent beaucoup d’argent à vos amis de Wall Street et nous devrons éliminer ça. On peut dire au revoir à ça », a-t-il déclaré à Fox News, sans préciser si Washington effacerait tout ou partie de la dette et par quel mécanisme.

« Nous allons faire quelque chose. Nous allons faire en sorte de remettre [Porto Rico]sur pied », a dit M. Trump. « Nous devons regarder la structure de la dette dans son ensemble », a expliqué le président américain, qui avait été vivement critiqué pour la lenteur de la réaction de Washington après le passage de l’ouragan dans l’un de ses territoires.

Mardi, Donald Trump avait minoré la situation de Porto Rico par rapport à une « vraie catastrophe », comme Katrina en 2005 à La Nouvelle-Orléans, et il avait ajouté que la situation sur l’île avait « un peu chamboulé le budget » des Etats-Unis.

Sans revenir sur les annonces du président, des responsables de la Maison Blanche ont déclaré mercredi que M. Trump envisageait de demander 29 milliards d’euros au Congrès afin de venir en aide à Porto Rico.

Chute des prix des obligations

Cette annonce a été très mal accueillie sur les marchés financiers : le prix des obligations de Porto Rico a chuté de plus de 25 %, notamment celles à échéance pour 2035. Parallèlement, les taux de ces mêmes obligations ont considérablement augmenté, passant de 18,475 % à 35,44 %.

Au début de mai, le gouverneur de Porto Rico avait demandé que le territoire soit déclaré en situation de faillite, afin de pouvoir restructurer sa lourde dette, estimée à 73 milliards de dollars.

Autrefois prospère, l’île de 3,5 millions d’habitants a connu ses premières difficultés économiques en 2006 avec la fin des exonérations fiscales massives qui avaient attiré de grandes multinationales et dopé l’activité. La récession économique et la chute des recettes ont ensuite gonflé la dette du territoire.

L’ouragan Maria aura encore augmenté les difficultés. Deux semaines après son passage, le courant n’a été rétabli que dans 7 % de l’île, plus de 9 000 personnes vivent dans des refuges et seuls 40 % des moyens de communication ont été rétablis, selon l’Agence fédérale des situations d’urgence. Une grande partie des habitants ne dispose toujours pas d’eau potable ni de carburant.

Porto Rico : quel statut par rapport aux Etats-Unis ?

  • Un statut flou d’« Etat libre associé »

Malgré plusieurs référendums organisés à Porto Rico plébiscitant le statut d’Etat américain pour ce territoire – le dernier ayant eu lieu en juin –, l’île n’est qu’un « Etat libre associé » depuis les années 1950.

Concrètement, ses relations avec les Etats-Unis sont complexes. Les Portoricains ne paient pas d’impôts fédéraux, mais ils contribuent à la Sécurité sociale, au système Medicare (assurance santé pour les plus de 65 ans, notamment) et paient les taxes à l’import et à l’export. En outre, l’intégralité des amendements de la Constitution ne s’applique pas à Porto Rico.

  • Les Portoricains, des citoyens américains

Les 3,4 millions d’habitants nés à Porto Rico sont des citoyens américains, et ce depuis le Jones-Shafroth Act de 1917. Ils peuvent circuler librement dans les 50 autres Etats américains sans passeport et sont protégés par le Bill of Rights (les 10 premiers amendements de la Constitution) des Etats-Unis.

Mais, selon un sondage publié dans le New York Times, seuls 54 % des Américains savent que les habitants de Porto Rico sont des citoyens américains.

  • Le droit de vote seulement pour les primaires

La citoyenneté ne leur accorde pas pour autant le droit de vote aux élections nationales. Les Portoricains votent pour les primaires présidentielles destinées à désigner le candidat de chaque parti, mais ils n’ont pas de représentants dans le collège électoral. Leurs voix ne sont donc pas représentées lors de l’élection présidentielle.

Porto Rico a également un délégué à la Chambre des représentants – Jenniffer González-Colón –, mais il ne peut voter qu’en commission. Si Porto Rico était un Etat, étant donné sa population, deux sénateurs et cinq représentants portoricains devraient siéger au Congrès. Après le référendum de juin, le gouverneur de l’île, Ricardo Rosello, a désigné ces sept élus fictifs pour qu’ils aillent réclamer leur siège à Washington. Jusque-là, le Congrès n’a pas accepté.