Le chef de l’Etat a inauguré les travaux de rénovation du campus de l’Ecole d’application aux métiers des travaux publics (ETAP) d’Egletons, qui forme des étudiants et des apprentis aux professions du BTP. / LUDOVIC MARIN / AFP

C’est le deuxième étage prévu de la réforme Macron du travail. Le président de la République s’est rendu mercredi 4 octobre en Corrèze pour présenter le futur grand chantier gouvernemental après la refonte par ordonnances du code du travail : la réforme de la formation professionnelle, de l’apprentissage et de l’assurance-chômage.

La visite présidentielle intervenait avant les rencontres du gouvernement avec les syndicats et le patronat, le 12 octobre à l’Elysee. Accompagné des ministres Muriel Pénicaud (travail) et Jean-Michel Blanquer (éducation nationale), le chef de l’Etat a inauguré les travaux de rénovation du campus de l’Ecole d’application aux métiers des travaux publics (ETAP) d’Egletons, qui forme des étudiants et des apprentis aux professions du BTP.

« Ici commence une bataille pour arrêter avec le défaitisme français », a lancé Emmanuel Macron qui veut en finir avec « la vision de l’apprentissage comme la filière de ceux qui ont échoué dans les filières générales ».

Négociations compliquées

Ce deuxième volet des réformes du marché du travail doit compléter le plan global d’investissements pour la formation du gouvernement présenté par le premier ministre le 25 septembre, d’un montant de 15 milliards d’euros sur cinq ans. Mais l’impossibilité de recourir, cette fois, aux ordonnances pourrait compliquer les négociations à venir avec les partenaires sociaux, alors que l’exécutif espère présenter son projet de loi devant le Parlement au printemps, pour une adoption à l’été prochain.

Pour l’instant, l’exécutif reste évasif sur le contenu de la réforme de l’apprentissage, se contentant de formules globales. Quant à la réforme de la formation professionnelle, sujet épineux à négocier avec les syndicats, elle doit aller dans le sens « d’une plus grande transparence, d’une plus grande efficacité et d’une plus grande simplicité ».

Le discours volontariste présidentiel a été brouillé mercredi par un cas particulier local, celui des salariés de l’entreprise GM & S. Le chef de l’Etat n’a pas voulu profiter de sa visite à Egletons pour rencontrer les ouvriers de cet équipementier automobile, deuxième employeur privé de la Creuse, placé en liquidation judiciaire en juin et repris en septembre par le groupe GMD, mais avec seulement 120 emplois conservés sur 277.

Manifestation des GM & S

Mercredi, une centaine de personnes ont manifesté à Egletons, derrière des banderoles de La France insoumise et de la CGT. Soutenu par plusieurs maires de communes voisines postés au premier rang avec leurs écharpes tricolores, le mini-cortège a été maintenu à l’écart de la visite présidentielle par un impressionnant service d’ordre.

« Le déplacement du président est centré sur la formation et l’apprentissage, pas sur la situation de GM & S », a indiqué l’Elysée qui a précisé que « les syndicats ont refusé la rencontre qu’on leur a proposée avec le secrétaire d’Etat à l’économie et aux finances, Benjamin Griveaux, en charge du dossier GM & S à Bercy ».

La situation difficile de l’équipementier dissone avec la partition sociale jouée la veille à Amiens par le chef de l’Etat lors de sa visite de l’usine Whirlpool, sauvée in extremis. « Macron est allé voir les Whirlpool. Pourquoi ne vient-il pas nous voir ? Nous sommes des ouvriers qui ne comptent pas ? », s’agace ainsi un manifestant à Egletons.

« Le président est très attentif aux attitudes républicaines », explique l’Elysée pour justifier sa distance du jour sur le dossier GM & S. Pour la présidence, les syndicats comme les élus qui soutiennent les licenciés de GM & S sont « allés trop loin » dans la contestation et leurs méthodes sont « un antimodèle » par rapport au dossier Whirlpool.

Visitant une classe d’apprentis avec à ses côtés Alain Rousset, le président de Nouvelle-Aquitaine, qui se plaint de ne pas trouver de candidats pour des emplois dans une entreprise de fonderie de la région, Emmanuel Macron répond : « Il y en a certains, au lieu de foutre le bordel, ils feraient mieux d’aller regarder là où ils pourraient avoir des places. » Une phrase qui, par son ton, peut rappeler la sortie du chef de l’Etat sur « les fainéants », et dont son entourage sur place s’est empressé de préciser qu’il « ne faisait pas référence aux manifestants de GM & S ».

Mais quelques heures plus tard, profitant d’une nouvelle table ronde avec des apprentis, Emmanuel Macron a cette fois évoqué le cas de l’équipementier automobile pour illustrer sa politique de « libération » et de « protection » de l’emploi. « Protéger, ce n’est pas dire aux gens que, quoi qu’il advienne, on va protéger leurs emplois. On connaît ici la situation de GM & S, il y a des situations où on ne peut pas protéger tous les emplois. On s’est battus pour protéger le maximum d’emplois, mais c’est une mauvaise politique que de protéger tous les emplois, y compris ceux qui n’ont plus de destin économique », a expliqué le chef de l’Etat.