Mounir Mahjoubi, ex-président du CNNum, devenu secrétaire d’Etat au numérique, en juillet 2017. / Charles Platiau/Reuters

Où va le Conseil national du numérique ? Cette commission consultative créée par Nicolas Sarkozy et censée éclairer les choix de l’Etat sur toutes les questions relatives au numérique n’a plus de président depuis janvier, après la démission de Mounir Mahjoubi, parti rejoindre l’équipe de campagne d’Emmanuel Macron. Une vacance doublée d’un long silence, qui inquiète les membres de son collège. « Nous attendons toujours un décret définissant le nouveau fonctionnement du conseil. Je suis le premier à regretter ce manque d’information », se désole Guy Mamou-Mani, vice-président du CNNum, à qui M. Mahjoubi avait promis cet été des nouvelles sous « dix jours ».

Jusque-là discret sur l’avenir du CNNum, M. Mahjoubi a prévu de venir mettre fin au suspense ces prochains jours. « Nous avons eu plein d’urgences à gérer. Nous devions repenser le rôle du conseil », justifie le secrétaire d’Etat au numérique. Tout d’abord, pas question de supprimer cette instance, qui a notamment produit un avis contre le fichier TES, le méga-fichier réunissant les données personnelles de 60 millions de citoyens ou qui défend le « chiffrement » à l’heure où le gouvernement multiplie les textes sécuritaires. « Maintenant que nous avons un gouvernement plus numérique qu’avant, il nous faut un conseil encore plus stratège, qui identifiera chaque année un à deux sujets à traiter sur le long terme, permettant à l’Etat d’avoir un temps d’avance », détaille le secrétaire d’Etat, qui prend pour exemple la « blockchain », une technologie de stockage de l’information décentralisée, ou l’intelligence artificielle.

Le CNNum, qui compte une trentaine de membres de la société civile et dix élus logés dans un collège indépendant, sera remodelé à la marge. « Nous voulons réinventer la place des élus, qui n’étaient pas informés des travaux du conseil. Il faut qu’ils soient plus proches sans remettre en cause l’indépendance de cette instance », poursuit M. Mahjoubi.

Reste la délicate question du casting. Une partie du conseil sera renouvelée. Problème plus épineux, la nomination du président, un poste pour lequel le cabinet du secrétaire d’Etat a reçu à ce jour une dizaine de candidatures, dont celle de M. Mamou-Mani. « Il y a trois mois, je me suis manifesté. Le CNNum est d’une utilité fantastique, alors que nous allons aborder une année très importante en France », dit le vice-président.

Pas de changement du mode de désignation du président

Autre prétendant, Philippe Rodriguez, à la tête d’Avolta Partners, une petite banque d’affaires spécialisée dans le numérique. Cet ancien soutien de François Fillon a publié des tribunes suggérant des réformes à apporter au CNNum, qui ne doit plus être un « machin ». « Il ne faut pas que le CNNum soit une annexe au secrétariat d’Etat. Il doit revenir aux fondamentaux, en s’occupant des sujets liés aux technologies, au business ou en ayant des discussions sur le financement des écosystèmes », défend le candidat, remettant ainsi en cause le tournant sociétal pris par le conseil.

Las, Mounir Mahjoubi va les décevoir. Son choix est fait. « Ce sera une femme », annonce-t-il, espérant confirmer l’identité de l’heureuse élue ces prochains jours. Le nom de Marie Ekeland circule avec insistance depuis plusieurs semaines. La fondatrice de Daphni, un fonds de capital-risque spécialisé dans le numérique, siège déjà au collège du CNNum. Signe de son implication, c’est elle qui la semaine dernière s’est rendue au sommet numérique de Tallinn en Estonie pour présenter les « digital squads », une initiative européenne des différents conseils du numérique qui ont prévu de mutualiser leurs réflexions et de les défendre ensemble à Bruxelles.

En nommant lui-même le maître de cérémonie du conseil, M. Mahjoubi renonce à changer le mode de désignation du président, comme il l’avait évoqué ces dernières semaines, suggérant de laisser cette prérogative au collège. Ironie de l’histoire, l’actuel CNNum a prévu ce vendredi, à l’occasion de sa prochaine plénière, de voter pour son prochain président.