Les quelque 260 000 auteurs et artistes seraient-ils, parmi les actifs, les grands perdants de la réforme des cotisations sociales ? Alors que le projet de loi de finances de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2018 prévoit de compenser la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) par une diminution des cotisations d’assurance maladie et chômage, ceux – écrivains, compositeurs, scénaristes, traducteurs, plasticiens, photographes, sculpteurs, peintres, dessinateurs, etc. – dont les revenus sont essentiellement ou totalement issus des droits d’auteurs et des ventes d’œuvres, ne bénéficieront pas de cette contrepartie et verront, de fait, leurs rémunérations diminuées.

« Nous sommes tous sur la brèche pour dénoncer ce traitement inéquitable », témoigne Véronique Perlès, directrice en charge des affaires sociales à la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD). Une trentaine d’associations, de syndicats et d’unions professionnelles doivent adresser cette semaine aux ministères de la culture et de l’économie, ainsi qu’au premier ministre et au président de la République une lettre pour s’inquiéter de cette « discrimination » et réclamer une « concertation ».

« La seule catégorie d’actifs perdante »

Les droits d’auteurs n’étant pas pris en compte dans le calcul des droits à indemnité de chômage, les auteurs ne cotisent pas à l’assurance chômage. Résultat : « ils vont subir la hausse de la CSG sans compensation et verront donc leur pouvoir d’achat baisser d’environ 1 % a minima tandis que celui des salariés augmentera de 1,45 %. Les auteurs et artistes seront donc la seule population d’actifs perdante », calcule Geoffroy Pelletier, directeur général de la Société des gens de lettres (SGDL). « Toutes les organisations les représentant sont mobilisées car la coupe est pleine, beaucoup d’auteurs étant déjà dans une situation de paupérisation », souligne-t-il.

Serait-ce un « bug » dans le PLFSS ? Pour l’heure, « le ministère de la culture nous a fait comprendre qu’il n’avait pas trouvé de solution avec celui des affaires sociales », ajoute Geoffroy Pelletier. « Cette discrimination injustifiable semble assumée par le gouvernement qui prend les auteurs pour une quantité négligeable et qui est persuadé que nous sommes trop individualistes pour bouger, s’insurge-t-il. Mais nous descendrons dans la rue s’il le faut ».

Alors qu’Emmanuel Macron, dans son discours du 26 septembre à la Sorbonne consacré à la refondation de l’Europe, a insisté sur la nécessité de « défendre la juste rémunération de l’ensemble des auteurs » considérant que « la défense des droits d’auteurs n’est pas un sujet ringard », Véronique Perlès ne se prive pas de pointer cette contradiction « entre les paroles et les faits ». « Tous les actifs doivent être traités de la même façon. Les auteurs doivent, eux aussi, bénéficier d’une augmentation de leur pouvoir d’achat », insiste-t-elle.

Contactés à plusieurs reprises, ni le ministère de la culture ni celui des comptes publics n’ont donné suite à nos sollicitations.