Les députés européens de vingt pays de l’Union européenne (UE) ont adopté, jeudi 5 octobre, un texte entérinant la création d’un Parquet européen spécialisé dans la lutte contre les fraudes à la TVA et aux subventions européennes d’ici à 2020.

« Les criminels ignorent les frontières et il est grand temps de les stopper en dotant les procureurs des outils qui leur manquent pour agir de manière transfrontalière », ont souligné les commissaires européens chargés de la justice et du budget, Vera Jourova et Günther Oettinger.

Mais cette instance indépendante de lutte contre la fraude ne sera compétente que dans 20 Etats membres, qui ont accepté de participer à une « coopération renforcée ». L’expression désigne une procédure permettant à un groupe d’Etats de l’UE d’adopter des décisions qui ne s’appliqueront qu’à eux, afin de surmonter les oppositions de certains pays ; d’autres Etats peuvent ensuite les rejoindre.

En l’occurrence, des pays comme les Pays-Bas, la Suède ou encore la Hongrie bloquaient toute avancée de ce projet de parquet européen antifraude, prévu dans les traités depuis 2009 et en négociation depuis 2013.

La France figure parmi les Etats qui ont adopté le texte, ainsi que l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne, le Portugal, la Belgique, le Luxembourg, l’Autriche, la Grèce, Chypre, la Bulgarie, la Roumanie, la Croatie, la République tchèque, la Slovaquie, la Finlande, la Slovénie et les trois Etats baltes.

50 milliards d’euros de fraude par an

Le Parquet européen sera doté d’un bureau central à Luxembourg, où seront réunis des procureurs européens – un par Etat membre participant –, ainsi que de « procureurs européens délégués » dans les Etats membres.

En revanche, le projet ne prévoit pas la création de tribunaux pénaux européens : lorsque les magistrats européens auront achevé leurs investigations, ils devront renvoyer les suspects devant des juridictions nationales.

L’instance visera particulièrement les fraudes aux fonds structurels européens, mais aura aussi compétence pour traquer les fraudes à la TVA transfrontalières, dès lors que leur montant dépassera 10 millions d’euros. Selon la Commission européenne, ce sont au moins 50 milliards d’euros de revenus de la TVA qui échappent chaque année aux pouvoirs publics en Europe du fait de ce type de fraudes.

Une « première étape »

Le vote de jeudi « est une première étape », s’est félicitée l’élue française Rachida Dati, ancienne magistrate et ex-ministre de la justice en France. Les Etats qui ont choisi, pour l’instant, de rester en dehors du dispositif « seront convaincus par son efficacité. D’ailleurs, ce Parquet européen a vocation à voir ses compétences élargies à la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée », a-t-elle précisé.

L’idée de telles compétences élargies avait été évoquée le mois dernier par le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, puis par le président français, Emmanuel Macron, dans son discours sur l’avenir de l’Europe à la Sorbonne.