Le projet de loi de finances de 2018, présenté en conseil des ministres à la fin de septembre, a été jugé sévèrement, lundi 9 octobre, par l’ancien ministre de l’économie socialiste, Michel Sapin.

« La musique jouée aujourd’hui [par le gouvernement] est injuste fiscalement, injuste par les économies qui frappent les plus faibles des Français, et qui donne beaucoup, beaucoup aux plus aisés », a accusé M. Sapin sur LCI.

« Pourquoi on dit président des riches” ? Parce qu’il y a deux mesures qui sont extrêmement favorables non pas aux riches (…) mais aux très, très riches, d’une catégorie très particulière de Français qui sont [les détenteurs de] richesse financière, et uniquement cette richesse financière. Et, à ceux-là, il est fait un cadeau l’année prochaine : l’ISF, plus une autre manière d’imposer les revenus de ce capital. »

« Les revenus du capital demain vont être imposés à 12,8 %. La plupart de ceux qui nous écoutent et qui paient des impôts sont imposés c’est la première tranche en France à 14 %. Donc [si] vous êtes héritier financier, vous allez payer des proportions d’impôt inférieures », a détaillé M. Sapin, à la veille de l’examen en commission à l’Assemblée nationale de ce premier projet de budget du quinquennat.

Quant aux contribuables assujettis à l’ISF avant la réforme, si « vous êtes propriétaire immobilier, vous allez payer jusqu’à 45 %. [Si] vous êtes propriétaires d’une fortune qui vous a été donnée par votre naissance, vous allez payer 12,8 % », a-t-il dit.

Un budget « injuste »

De son côté, le président Les Républicains de la commission des finances de l’Assemblée nationale, Eric Woerth, a qualifié lundi le projet de budget « d’injuste ». « C’est un budget injuste, injuste un peu partout », a affirmé M. Woerth sur France 2. « Il est injuste pour les retraités. (…) C’est injuste pour les entreprises, on augmente le coût du travail », a-t-il affirmé, pointant « une baisse du crédit d’impôt ».

Ce budget nuit également aux « collectivités locales et donc [au] citoyen local, pour nous qui consommons des services publics locaux », a ajouté M. Woerth, qui s’exprimait à la veille du début de l’examen en commission à l’Assemblée du premier projet de budget du quinquennat. Le député de l’Oise a, par ailleurs, estimé que « c’est un budget qui fait moins d’économies qu’il aurait dû faire ». « Le budget de l’Etat sera plus en déficit en 2018 qu’il ne l’est en 2017. »

« C’est injuste également pour les locataires de HLM » ou « pour les bailleurs sociaux qui auront bien du mal à entretenir leur immobilier », a-t-il dit à propos de la baisse des APL. 

« C’est un budget d’injustice », a également estimé le secrétaire national du PCF, Pierre Laurent, « c’est un budget qui donne à nouveau des avantages exorbitants à ceux qui ont énormément de fortune et qui ne met pas d’argent au service de la réduction des inégalités, du développement du service public ».

Le Maire ne croit pas au « ruissellement »

Le premier ministre, Edouard Philippe, « conteste évidemment » que les plus riches contribuables soient favorisés par ce projet de loi de finances. « Il y a dans ce budget énormément de mesures qui sont destinées à améliorer et protéger la situation des plus fragiles. (…) Le transfert de pouvoir d’achat qui va être réalisé pour les actifs n’a pas d’équivalent. On n’a jamais fait autant de transfert de pouvoir d’achat pour les actifs. Ça n’a rien de neutre. C’est 7 milliards d’euros au global », a-t-il déclaré lundi sur Europe 1.

« Tous les Français, enfin, tous les actifs, vont pouvoir le constater à partir de la fin du mois de janvier et au cours de l’année avec la mise en place de la suppression progressive de la taxe d’habitation », a ajouté Edouard Philippe.

Le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, a également balayé sur France Inter les accusations de cadeaux faits aux plus aisés. « Ce n’est pas du tout le choix que nous faisons. Le choix que nous faisons, c’est de réinjecter plus de capital dans l’économie française, qui a besoin de mieux se financer », a défendu le locataire de Bercy.

« Depuis des années, on a surtaxé le capital, moyennant quoi nos entreprises n’ont pas pu innover et créer de l’emploi. Nous, nous voulons renverser cette situation-là », a-t-il poursuivi. Le ministre a, par ailleurs, déclaré qu’il ne croyait pas à la « théorie du ruissellement », selon laquelle enrichir les riches profiterait à tout le monde.