A Pékin en août. / NICOLAS ASFOURI / AFP

A l’instant T, le tableau semble particulièrement réjouissant. Une reprise économique qui se poursuit et se conforte dans la plupart des pays du monde ; des marchés financiers toujours confiants ; une amélioration notable du commerce, de l’investissement, de la production industrielle et du climat des affaires… Les bonnes nouvelles égrenées par le Fonds monétaire international (FMI) dans ses dernières « Perspectives économiques mondiales », publiées mardi 10 octobre, tranchent avec la morosité des dernières années.

Le FMI reste pourtant prudent à l’extrême. « A y regarder de plus près, la reprise mondiale pourrait ne pas être durable », a alerté son économiste en chef, l’Américain Maurice Obstfeld, mettant en garde contre toute tentation d’« autosatisfaction » du côté des marchés comme chez les responsables politiques.

  • Une reprise qui se raffermit

Le sursaut de l’économie mondiale, qui a commencé à se faire sentir au premier semestre, se confirme cet automne, avec une croissance mondiale attendue à 3,6 % en 2017 et à 3,7 % en 2018. Le FMI rehausse ainsi son scénario de 0,1 point de pourcentage, comparé à ses prévisions d’avril. Certaines régions sont gratifiées de révisions encore plus franches, telles la zone euro, qui devrait progresser de 2,1 % en 2017 et 1,9 % en 2018 (soit 0,4 et 0,3 point de pourcentage en plus) ou la Chine, dont la croissance devrait atteindre 6,8 % cette année et 6,5 % la suivante (+ 0,2 et + 0,3 point de pourcentage par rapport à avril).

Cette reprise est tirée par une amélioration de l’investissement et de la production industrielle, une demande interne plus ferme en Chine et dans les économies avancées et un commerce mondial qui a fortement accéléré au premier semestre.

Sur les marchés financiers, l’humeur reste au beau fixe. Le lent cycle de resserrement monétaire entamé par la Réserve fédérale américaine (Fed, banque centrale des Etats-Unis) et les promesses déçues d’une grande relance fiscale aux Etats-Unis n’ont pas altéré cet optimisme.

  • Des poches de faiblesse

Le FMI remarque que l’accélération de la reprise concerne 75 % de l’économie mondiale. « Mais cela signifie que le verre est à 25 % vide, ce qui implique un frein à la croissance mondiale », a fait remarquer M. Obstfeld. Le rapport souligne les difficultés persistantes des pays émergents et en développement exportateurs de matières premières, notamment de pétrole, alors que les prix ne se sont redressés que timidement.

Les prévisions ont été abaissées pour le Royaume-Uni, où la croissance devrait atteindre 1,7 % en 2017 (- 0,3 point de pourcentage par rapport à avril). Un ralentissement provoqué par une baisse de la consommation, alors que la livre sterling s’est brutalement dépréciée dans la foulée du Brexit. Le scénario à moyen terme demeure « hautement incertain et dépendra en partie de la nouvelle relation économique avec l’Union européenne », estiment les auteurs du rapport.

Plus généralement, les séquelles de la crise financière ne sont pas totalement effacées : la productivité a diminué, tout comme la croissance potentielle. Malgré la baisse notable du chômage dans les pays avancés, la croissance des salaires reste faible comparé aux précédents épisodes de reprise.

  • Risques et « défis de long terme »

Le FMI souligne enfin les aléas susceptibles de modifier son scénario de croissance. Parmi ces risques, la menace d’une normalisation des politiques monétaires plus rapide que prévu, qui compliquerait la sortie de crise des économies les plus vulnérables. La Chine est un autre point d’interrogation : sa croissance plus robuste que prévu reflète un rééquilibrage plus lent de son économie de l’industrie vers les services et la consommation. Elle est aussi le résultat d’une dette qui s’accroît à toute vitesse, augmentant le risque à terme d’un ralentissement brutal aux répercussions potentiellement graves pour le reste de l’économie mondiale.

Le FMI cite encore la faiblesse de l’inflation, qui complique le travail des banques centrales. La menace d’une montée protectionniste est aussi mentionnée, même si elle semble moins inquiéter qu’un an plus tôt, à la veille de l’élection du président américain Donald Trump.

L’organisation de Bretton Woods appelle les responsables politiques à se saisir des « défis de long terme » afin de pérenniser cet élan. La reprise « offre une fenêtre d’opportunité idéale pour entreprendre les réformes-clés permettant d’accroître la croissance potentielle et de s’assurer que ses bénéfices sont largement partagés », insiste le rapport.