Calypdo Valois a longtemps préféré la musique classique à la chansonnette. / ANTOINE CARLIER

Difficile de ne pas qualifier d’enfant de la balle Calypso Valois, fille d’Elli Medeiros et de Denis Quilliard, alias Jacno (décédé en 2009, à l’âge de 52 ans). Son prénom figurait dans un tube de sa mère, A Bailar Calypso (1987). A l’époque, elle apparaissait même dans le clip (comme dans celui de Toi mon toit, en 1986) en pétulante gamine s’amusant au milieu des danseurs.

A l’heure où sort Cannibale, son premier album en solo, Calypso Valois, 30 ans, dit pourtant ne pas avoir eu conscience de l’effervescence artistique qui entourait ses parents, pionniers punk, dans le groupe Stinky Toys, transformés en duo précurseur de l’électro-pop française avant leur séparation.

« Mon père trouvait la vie d’artiste trop cruelle. »

Plus marquée par leurs multiples absences (« Je me revois appelant maman au téléphone pour lui dire que je n’en pouvais plus ») et leur manque d’encouragements (« Mon père trouvait la vie d’artiste trop cruelle »), elle a longtemps préféré la musique classique à la chansonnette. « A 5 ans, je me demandais comment Chopin, Bach ou Schubert faisaient pour réussir à exprimer tout ce que je ressentais. » Même si la petite fille insomniaque n’arrivait à s’endormir qu’au son de l’album The Velvet Underground & Nico

Le piano, puis le théâtre et la danse… Avant que l’acquisition d’un synthétiseur, l’instrument fétiche des premiers succès de Jacno, ne la réconcilie avec la légèreté pop. En 2014, encouragée par son parrain, Etienne Daho, dont son père avait produit l’album, Mythomane (1981), Calypso Valois chante au sein de son premier groupe, le duo Cinema, le temps de deux EP et d’un album autoproduits. Le succès est mitigé.

Le cinéma fait en revanche les yeux doux à cette fille au regard gris-bleu. A petits pas, celle qui n’a pas lâché ses désirs d’actrice fait des apparitions dans des films d’Olivier Assayas, un ami de la famille (Après mai, Personal Shopper), Michel Gondry (L’Écume des jours), Catherine Corsini (La Belle Saison) et, aujourd’hui, du Britannique Ralph Fiennes, qui lui fait jouer le rôle de la danseuse étoile Claire Motte dans The White Crow, une adaptation de la vie de Rudolf Noureev, encore en tournage.

Des clins d’œil au piano de Gainsbourg

Bien décidée à affirmer aussi sa personnalité de chanteuse, Calypso Valois est retournée derrière un micro. D’abord pour un duo avec Daho lors d’une reprise très « technoïde » d’Amoureux solitaires, hit de Lio coécrit par ses parents (et Jacques Duvall), qui figure dans l’album hommage Jacno Future (2011) – où l’on croise aussi Benjamin Biolay, Alex Beaupain ou Christophe. C’est également à cette occasion que la Montmartroise a rencontré Yan Wagner, chanteur et producteur franco-américain (son deuxième album s’intitule This Never Happened), héritier de la synth-pop, avec lequel elle a réalisé son premier opus.

Clip « Apprivoisé » extrait de l’album « Cannibale ».

Calypso Valois - Apprivoisé (Clip Officiel)
Durée : 05:00

Calypso Valois a planté, dans Cannibale, les intrigants décors de chansons oscillant entre mélodies primesautières et atmosphères menaçantes. On y retrouve le goût de la chanteuse-comédienne pour les musiques de films (celles signées Antoine Duhamel ou François de Roubaix), son admiration pour l’excentricité de Brigitte Fontaine (Le Jour, dont le clip est réalisé par Christophe Honoré), des clins d’œil au piano de Gainsbourg (Cannibales) à l’élégante fragilité de Chamfort et Daho (Tes mots). Sans oublier, comme le montre le titre Méchante fille, la tendre référence au minimalisme synthétique cher à Elli & Jacno.

« Cannibale », de Calypso Valois (Le Label/Pias). En tournée, notamment le 25 novembre au festival Les Inrocks, à la Gaîté-Lyrique, Paris.