Le président Emmanuel Macron avec le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, à l’Elysée, le 12 octobre. / PASCAL ROSSIGNOL / AFP

Emmanuel Macron a lancé, jeudi 12 octobre, la deuxième phase des réformes sociales du quinquennat, celle de la formation et de l’assurance-chômage, en recevant les responsables des syndicats et du patronat dans un climat alourdi par les premiers choix du gouvernement. « Objectif : inventer de nouvelles protections », a tweeté le président de la République à la mi-journée.

Au cours de cette journée marathon, se sont succédé à l’Elysée sept leaders syndicaux et patronaux, dont Jean-Claude Mailly (FO), Philippe Martinez (CGT) et Pierre Gattaz (Medef), en attendant Laurent Berger (CFDT) vendredi matin. Ils ont été reçus chacun environ une heure dans une ambiance « attentive et constructive » selon l’Elysée. Mais, pour l’heure, rien n’a filtré du contenu des réformes, et les syndicats ont principalement commenté la méthode, en posant certaines conditions.

  • Jean-Claude Mailly (FO) veut une négociation syndicats-patronat

« Sur la formation professionnelle, je lui ai demandé une négociation », a déclaré M. Mailly à la presse, en sortant de sa rencontre à l’Elysée avec le président, dans le cadre de la concertation sur les futures réformes sociales. Selon lui, cette négociation aura lieu.

Le numéro un de Force ouvrière a aussi souligné qu’il « serait très vigilant à ce que demain » le salarié ne soit pas seul pour « aller démarcher les organismes de formation, sans accompagnement ». Le syndicaliste a aussi « insisté sur le fait qu’on ne doit pas aller sur une logique d’individualisation » des droits. Il faut « qu’il y ait des droits personnels mais définis collectivement », a-t-il développé, tout en précisant que le président avait été sensible aux deux revendications.

Sur le chômage, il s’est fermement opposé à la gestion tripartite que proposait Emmanuel Macron durant sa campagne.

  • Philippe Martinez (CGT) réclame des « multilatérales »

Méfiant après les ordonnances sur la réforme du droit du travail, le chef de file de la CGT a exigé que les négociations portent sur un texte et ne soient pas de simples discussions.

« J’ai rappelé au président de la République que se voir c’est bien, discuter ça sert toujours, mais que nous n’avons pas des têtes d’alibi, a-t-il déclaré. Si c’est une négociation, cela veut dire qu’on a un texte, qu’on discute d’un texte (…) que notre texte va être versé à la négociation. »

« Il faut un texte, il faut des [réunions] multilatérales », a-t-il répété. Sur le fond, M. Martinez s’est prononcé sur la réforme de l’assurance-chômage en prévenant qu’il n’était « pas question de réduire les droits des privés d’emplois ».

  • François Hommeril (CFE-CGC) craint des effets d’aubaine avec la réforme de l’assurance-chômage

« L’indemnisation des démissionnaires va créer des effets d’aubaine », a-t-il affirmé jeudi en sortant de l’Elysée. « Il suffira qu’un matin ou un après-midi quelque chose se passe mal dans son travail pour [que le salarié] démissionne le soir même (…), il saura qu’il ne prend pas le risque de se retrouver au chômage non indemnisé », a-t-il ajouté, se disant particulièrement inquiet du « surcoût assurantiel ».

Comme Jean-Claude Mailly, M. Hommeril a par ailleurs rappelé une « ligne rouge » à ses yeux en termes d’indemnisation du chômage : « Une étatisation du système (…) qui reviendrait à remettre en question le caractère contributif, assurantiel et solidaire du dispositif actuel ».

  • Gattaz « réservé » sur le financement et la gouvernance de l’Unédic

Selon la méthode testée cet été avec les ordonnances, le président ouvre la concertation, puis passe le relais au premier ministre, Edouard Philippe, et à la ministre du travail, Muriel Pénicaud, qui recevront les partenaires sociaux à Matignon du 17 au 19 octobre. Le ministre de l’éducation, Jean-Michel Blanquer, sera présent pour le volet apprentissage.

Si la majorité des syndicats critiquent ce processus, y voyant « de la communication », Pierre Gattaz, le patron du Medef, estime que cela permet « de discuter, d’avoir des idées » et de « mettre les choses sur la table ».

Autres sujets de friction : le financement et la gouvernance de l’Unédic, le gestionnaire de l’assurance-chômage. Le gouvernement prévoit que, dès 2018, le régime ne soit plus uniquement financé par les cotisations, mais également par l’impôt (CSG), et qu’il passe d’une gestion paritaire par les partenaires sociaux à une gestion tripartite avec l’Etat. Alors que MM. Mailly et Martinez ont vilipendé ce projet, défendant le rôle des syndicats et du patronat, le président du Medef s’est dit « un tout petit peu réservé » sur ce thème.