La décision que Donald Trump doit annoncer vendredi 13 octobre – dire auprès du Congrès si oui ou non l’accord sur le nucléaire iranien représente un enjeu vital pour les intérêts de la sécurité nationale des Etats-Unis – a été précédée par une fracture. Celle qui sépare sur la question iranienne les principaux think tanks de la capitale fédérale.

C’est à l’American Entreprise Institute (AEI), une institution conservatrice, que l’ambassadrice américaine aux Nations unies, Nikki Haley, a esquissé, le 5 septembre, la piste que le président des Etats-Unis devrait emprunter, comme l’a annoncé ces derniers jours la presse américaine sans jamais être démentie : prendre ses distances vis-à-vis d’un accord jugé foncièrement mauvais en confiant au Congrès la responsabilité d’accentuer les pressions sur l’Iran sans remettre en cause immédiatement le compromis. L’AEI héberge un compagnon de route du courant néoconservateur américain, l’ancien ambassadeur aux Nations unies John Bolton, partisan d’une ligne dure avec l’Iran.

Les ambassadeurs européens plaident pour l’accord

Trois semaines plus tard, les trois ambassadeurs à Washington des pays européens cosignataires de l’accord avec l’Iran, le Français Gérard Araud, le Britannique Kim Darroch et l’Allemand Peter Wittig, épaulés par l’ambassadeur de l’Union européenne, David O’Sullivan, se sont exprimés à l’Atlantic Council. Devant ce think tank qui a alimenté en cadres de haut rang les administrations républicaines comme démocrates, ils ont affiché l’unité européenne et la conviction de l’utilité d’un accord jugé globalement respecté par la partie iranienne.

Parmi les détracteurs les plus virulents de l’accord figurent des membres de deux think tanks réputés pour leur positionnement conservateur, l’Heritage Foundation et le Hudson Institute. La bataille contre l’accord nucléaire conclu en juillet 2015 est au cœur de l’activité d’une institution plus modeste, la Foundation for Defense of Democraties, animée par Mark Dubowitz.

Des voix qui comptent en matière de politique étrangère américaine ont au contraire pris position ouvertement en faveur du même accord. Il s’agit notamment de Richard Haass, qui dirige le Council on Foreign Relations, un think tank bipartisan qui a invité à s’exprimer, le 3 octobre, le sénateur de l’Arkansas Tom Cotton, « faucon » assumé sur l’Iran. Richard Haass, ancien pilier d’administrations républicaines, ne cesse au contraire de souligner sur son compte Twitter le risque pour les Etats-Unis de fragiliser un accord qui sans être parfait, admet-il, constitue pour l’instant « la meilleure option » possible.

Expert réputé des questions de sécurité au Moyen-Orient, Anthony Cordesman, du Center for Strategic and International Studies, a publié en août un plaidoyer pour l’accord nucléaire. La Brookings Institution, plus proche des démocrates, en a fait de même du 9 au 11 octobre avec une série d’articles favorables à la poursuite de son application. Une rupture étant, selon Ilan Goldenberg et Mara Karlin, « une invitation à la guerre ».