Les ruines, les drapeaux, les blockhaus : Raphaël Denis n’est assurément pas le premier artiste à se saisir de ces sujets. Mais il le fait avec un sens si juste des proportions et des matériaux qu’il les recharge en puissance symbolique. Les drapeaux sont grandeur nature, mais en plomb, uniformément gris, plis immobiles attachés à des hampes qui finissent en piques. Ils sont accrochés au mur comme pour un Conseil européen – il y en a donc 28 – ou piqués dans un amas de gravats d’où émergent des haches en béton. Les blockhaus sont au centième de leur taille habituelle, petites géométries mortelles qui semblent s’enfoncer dans le sol, comme les fortifications du mur de l’Atlantique aujourd’hui.

« Grand Europa » (2017), de Raphaël Denis, propositions et dimensions variables, acier, plomb, béton. / GALERIE VINCENT SATOR

Sur une paroi sont disposés les éléments d’un autel aux désastres de l’histoire, reliques tantôt presque comiques – massacre de daim aux cornes dorées, blockhaus noir sur lequel une déjection blanche est tombée, vieilles images pieuses –, tantôt tragiques – tableaux spoliés de l’Occupation, hache dont le manche a cassé comme si elle avait trop servi. Cette installation faussement hétéroclite est une réussite.

« Europa », Galerie Vincent Sator, 8, passage des Gravilliers, Paris 3e. Tél. : 01-42-78-04-84. Du mardi au samedi de 14 heures à 19 heures. Jusqu’au 25 novembre. www.galeriesator.com et www.without-link.com