L’avocat général a fustigé une « mascarade ». La défense a obtenu, lundi 16 octobre, le renvoi du procès en appel de Cécile Bourgeon, la mère de Fiona, et de Berkane Makhlouf, son ex-compagnon. Tous deux étaient rejugés depuis le 9 octobre pour coups mortels assenés à la fillette. Fiona, 5 ans, avait d’abord été signalée en mai 2013 comme disparue par sa mère, avant que les enquêteurs soupçonnent le couple, qui finira par reconnaître la mort de la petite fille, se renvoyant mutuellement la responsabilité des coups mortels. La nouvelle audience débutera le 29 janvier devant la même cour d’assises de la Haute-Loire.

La cause de ce renvoi est une passe d’armes des avocats de la défense avec une avocate de la partie civile. Le procès avait été suspendu vendredi après que Mes Renaud Portejoie et Mohamed Khanifar, respectivement avocat de Mme Bourgeon et conseil de M. Makhlouf, eurent quitté le palais de justice avec fracas, estimant que « leur probité » avait été « mise en cause » par l’avocate d’une association de protection de l’enfance, Me Marie Grimaud.

Tandis qu’un témoin de l’entourage du couple était interrogé, cette dernière avait fait remarquer qu’il avait été assisté par Me Khanifar lors d’une garde à vue au début de l’affaire, laissant entendre que l’avocat aurait pu orienter les déclarations du témoins. Elle avait ajouté que Me Portejoie avait, lui, conseillé Berkane Makhlouf avant de défendre Cécile Bourgeon.

Me Marie Grimaud avait ainsi suggéré une connivence sur les bancs de la défense, et ses deux confrères s’étaient estimés accusés de « subornation de témoin et de collusion ». Le président de la cour, Etienne Fradin, avait annoncé que l’audience serait suspendue jusqu’au lundi matin et avait commis d’office les deux avocats de la défense pour s’assurer de leur présence. Mais à la reprise des débats, ceux-ci ont réclamé un renvoi.

« Véritable comédie »

« Il ne s’agit pas d’un coup, il s’agit d’une atteinte extrêmement grave à notre probité, que nous avons fait sanctionner, et la cour d’assises a partagé notre analyse », s’est félicité Me Portejoie après la décision. Pour Me Khanifar, « il n’y a pas de vainqueur, il n’y a pas de perdants, c’est uniquement le droit strict qui a été entendu ».

De leur côté, les parties civiles ont fait part de leur « écœurement », évoquant une décision qui donne selon eux « une image pitoyable » de la justice. « Cette cour d’assises a été prise en otage, c’est une véritable comédie qui était orchestrée depuis de nombreux mois. Je ne comprends pas cette décision, j’estime que nous sommes en plein déni de justice », a dénoncé Me Grimaud.

Pour le père de Fiona, Nicolas Chafoulais, « c’est un nouveau coup qui lui est porté », a déploré son avocat, Me Charles Fribourg, fustigeant une « instrumentalisation ».

Avant de virer au fiasco, ce second procès devait être celui de la seconde chance pour éclaircir les circonstances de la mort de Fiona. En première instance, en novembre 2016 devant la cour d’assises du Puy-de-Dôme, les débats n’avaient pas permis de comprendre pourquoi et surtout de quelle façon la petite fille de 5 ans, dont le corps n’a jamais été retrouvé, avait été tuée.

A l’issue du procès en première instance à Riom, Cécile Bourgeon avait été acquittée des violences fatales à l’enfant, mais condamnée à cinq ans de prison pour avoir menti en 2013 sur sa disparition. Berkane Makhlouf avait été condamné à vingt ans de réclusion. Tous deux resteront en détention jusqu’au nouveau procès.