C’est un nouveau coup porté au dispositif d’encadrement des loyers mis en place sous le quinquennat Hollande. Le tribunal administratif a annulé, mardi 17 octobre, cette réglementation à Lille, la seule ville, avec Paris, qui appliquait le dispositif.

Saisie notamment par l’Union nationale de la propriété immobilière (UNPI) du Nord, le tribunal administratif de Lille a estimé que l’encadrement des loyers, fixé par un arrêté du préfet du Nord, « ne pouvait pas être appliqué dans la seule commune de Lille » et aurait dû concerner « l’ensemble de l’agglomération lilloise ».

Pour le juge, « l’agglomération lilloise, qui comprend 59 communes, doit être regardée dans son ensemble comme constituant une zone tendue pour l’application du dispositif de plafonnement », les textes prévoyant l’encadrement par « zone d’urbanisation » et non par commune. Un raisonnement qui pourrait peut-être aussi remettre en cause le dispositif créé à Paris, selon l’UNPI.

Destiné à protéger les locataires des abus de certains bailleurs, l’encadrement des loyers prévoit que, lors de la signature d’un nouveau bail ou d’un renouvellement, le loyer d’un logement ne puisse pas dépasser le montant d’un loyer de référence fixé par arrêté préfectoral de plus de 20 %, ni lui être inférieur de plus de 30 %.

Ce dispositif n’est appliqué qu’à Paris, depuis le 1er août 2015, et à Lille depuis le 1er février 2017, à la demande des deux maires socialistes : Anne Hidalgo et Martine Aubry.

« Troisième ville la plus chère de France »

Le dispositif, institué par la loi sur l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) du 24 mars 2014, avait déjà été restreint dès la promulgation de la loi. Manuel Valls, alors premier ministre, l’avait limité aux « communes volontaires », et « à titre expérimental », alors que loi devait s’appliquer à 28 agglomérations. Une restriction que le Conseil d’Etat avait, en mars 2017, jugée illégale.

La socialiste Martine Aubry s’était beaucoup battue pour faire appliquer la loi ALUR, avec l’appui de la ministre du logement Emmanuelle Cosse. Conformément à ce texte, un observatoire des loyers avait été créé pour établir des loyers « de référence » par quartier.

Lille est « reconnue comme la troisième ville la plus chère de France », avec une hausse des loyers privés « de 70 % » entre 2000 et 2012 – la moyenne nationale est à 50 % –, avaient expliqué les deux femmes dans un communiqué. Cela concernait « 55 000 loyers », dont « 14 % plus élevés que le loyer de référence majoré », selon Audrey Linkenheld, responsable du dossier à la mairie de Lille.

« L’encadrement des loyers est une nécessité économique et sociale, qui a reçu avec la loi ALUR un fondement juridique. Nous ne comprenons pas la décision du tribunal administratif, on ne s’attendait pas à cette décision », a déclaré Mme Linkenheld à l’Agence France-Presse.

Franche satisfaction, en revanche, à l’UNPI : « C’est un très grand jour pour nous, le résultat d’un combat mené depuis bientôt un an dans l’intérêt des propriétaires », a affirmé son président, Jean-Pierre Berlinet, qualifiant l’encadrement d’« usine à gaz ».

La préfecture du Nord n’a pas encore précisé si elle ferait appel. Théoriquement, le préfet peut aussi prendre un nouvel arrêté soumettant toute l’agglomération lilloise à l’encadrement. « Encore faut-il que les communes s’entendent, ça m’étonnerait que le préfet ait leur aval », a commenté M. Berlinet, président de l’UNPI.