A l’Assemblée nationale, le 17 octobre. / PATRICK KOVARIK / AFP

L’Assemblée nationale votera mardi 24 octobre en première lecture, le volet recettes du projet de loi de finances pour 2018. Les cinq jours et cinq nuits de débats parfois vifs qui se sont achevés dimanche à 2 heures du matin ont permis aux députés d’adopter des mesures qui marqueront le premier budget Macron

  • Impôt sur la fortune immobilière

L’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) est supprimé ; il est remplacé par l’impôt sur la fortune immobilière. Les patrimoines immobiliers dont la valeur est supérieure à 1,3 million d’euros seront taxés de 0,5 % à 1,5 %. L’abattement de 30 % sur la valeur de la résidence principale est maintenu. En revanche, les valeurs mobilières (comme les actions) ne sont plus assujetties à l’impôt sur la fortune et l’ISF-PME est supprimé. Quant à l’immobilier professionnel, il continuera d’échapper au nouvel impôt.

Le gouvernement espère développer l’investissement dans l’activité économique. Mais la mesure provoque des remous, jusqu’au sein de la majorité. L’ISF « est inefficace et injuste car le plus gros des patrimoines français ne le paient pas », a plaidé Bruno Le Maire, ministre de l’économie, devant les députés, le 18 octobre. « En supprimant l’impôt sur la fortune sur le patrimoine financier, nous remettons 3,2 milliards d’euros dans l’économie française », a-t-il ajouté. Mais beaucoup d’économistes demeurent prudents sur ce point.

Pour calmer les esprits, le gouvernement a accepté des amendements alourdissant la taxation des signes extérieurs de richesse (bateaux de plaisance de plus de 30 mètres, voitures de sport, métaux précieux). Les députés ont par ailleurs décidé de la création d’une mission qui accordera « une attention particulière » aux effets de la suppression de l’ISF « en termes d’investissement dans les entreprises et de répartition des richesses ».

  • Prélèvement forfaitaire unique

Un prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30 % est instauré pour les revenus du capital (intérêts, dividendes, plus-values de cession). Là encore, le but est d’inciter les épargnants à investir davantage dans le financement de l’économie nationale. Les contribuables pourront choisir de rester au barème de l’impôt sur le revenu s’il est plus avantageux.

Les revenus du Livret A et des livrets réglementés demeurent exonérés. Les plans d’épargne-logement (PEL) déjà ouverts échapperont aussi au PFU pour les intérêts produits avant douze ans, au contraire des nouveaux contrats, qui seront taxés dès la première année. Les plans d’épargne en actions (PEA), l’épargne salariale et les contrats d’assurance-vie de moins de 150 000 euros (300 000 euros pour un couple) détenus depuis plus de huit ans sont également exonérés.

Un autre amendement prévoit que l’imposition des plus-values professionnelles des artisans, commerçants et agriculteurs ne pourra pas dépasser 30 %.

  • Suppression de la taxe d’habitation

La taxe d’habitation sera supprimée pour 80 % des ménages, en trois ans. La ­mesure sera valable jusqu’à 30 000 euros de revenus annuels (soit 27 000 euros de revenu fiscal de référence, en prenant en compte l’abattement fiscal de 10 %) pour un célibataire, soit environ 2 500 euros de revenu réel imposable par mois. Par ailleurs, l’exonération de taxe d’habitation, dont 360 000 personnes (en grande partie des retraités) bénéficiaient depuis 2014, qui devait prendre fin en 2017, sera maintenue en 2018 pour ceux qui seront dans les 80%.

L’Assemblée nationale a également adopté, sur proposition du gouvernement, une disposition visant à ce que les maisons de retraite, qui payent parfois directement la taxe d’habitation, en répercutent le dégrèvement dans leurs tarifs pour les pensionnaires qui y sont éligibles.

  • Crédit d’impôt transition énergétique

L’efficacité du crédit d’impôt transition énergétique (CITE), visant à favoriser les travaux de rénovation énergétique des habitations, est controversée. Le gouvernement envisageait donc de le remplacer par une prime avec effets en 2019. D’ici là, l’article 8 du PLF prorogeait le CITE d’un an, tout en excluant la rénovation des fenêtres, des volets et des portes du crédit d’impôt, son efficacité étant jugée « faible » compte tenu des montants engagés (38 % du 1,7 milliard d’euros du CITE). Mais, devant la levée de bouclier du secteur, le gouvernement a finalement décidé de supprimer, à ce stade, l’article 8.

La question réapparaîtra lorsque l’Assemblée nationale examinera, en novembre, la deuxième partie du budget (les dépenses et les mesures qui impacteront les finances publiques en 2019). Charge au gouvernement, d’ici là, de préciser quel dispositif il propose pour accompagner le secteur en 2018.

  • Fiscalité du carburant

Le prix du litre d’essence augmentera de 15 centimes d’ici 2022 et celui du gazole de 31 centimes. La taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), en effet, subira d’une part une augmentation de la contribution carbone du carburant et d’autre part une hausse de 2,6 centimes par litre de gazole chaque année pendant quatre ans, pour s’aligner sur la fiscalité de l’essence. Les députés ont bien tenté de faire fléchir le gouvernement. « Vous allez matraquer les ménages ruraux qui ont peu de transports en commun », a dénoncé Valérie Lacroute, députée LR de Seine-et-Marne. « La transition écologique a bon dos, a argué son collègue du Cantal, Vincent Descœur. Nos concitoyens ne rouleront pas moins ; ils rouleront plus cher. » S’en est suivie une bataille de chiffres sur le coût que représentera cette hausse par ménage. Mais le gouvernement n’a pas cédé, rappelant que « les particules fines provoquaient la mort de 45 000 personnes ».