Terry Richardson est connu pour le « porno chic » : des clichés provocateurs au caractère explicitement érotique ou sexuel qui constitue sa marque de fabrique. / Lucas Jackson / REUTERS

Terry Richardson, le sulfureux photographe de mode américain, vient d’être emporté par la même vague qui a fait tomber Harvey Weinstein. Selon The Daily Telegraph il vient d’être banni des publications du groupe d’édition américain Condé Nast International – qui comprend les titres Vogue, GQ, Glamour, Vanity Fair, Rolling Stone ou le site Pitchfork, pour lesquels le photographe a effectué de nombreuses séries de photos de mode et de portraits.

Dimanche 22 octobre, le quotidien britannique Times se demandait pourquoi le photographe était encore fêté par les « fashionistas ». Dans la foulée, James Woolhouse, le vice-président exécutif en charge des opérations de Condé Nast, a envoyé un mail aux responsables des magazines dans les différents pays leur annonçant que « Condé Nast entend cesser de travailler avec le photographe Terry Richardson ». Toute commande déjà passée qui n’a pas été publiée doit être supprimée ou remplacée par d’autres productions, rapporte le Daily Telegraph.

Pétition lancée en 2013

Agé de 52 ans, Terry Richardson est connu pour le style « porno chic » de ses clichés provocateurs, au caractère explicitement érotique ou sexuel. Il a notamment travaillé avec Beyoncé, Lady Gaga et Miley Cyrus, pour laquelle il a réalisé le clip de Wrecking Ball en 2013. Il a aussi photographié Barack Obama.

Mais depuis quelques années, il est accusé par plusieurs femmes d’agressions sexuelles. Rie Rasmussen, Jamie Peck, Emma Appleton : plusieurs mannequins ont dénoncé des agressions commises à l’occasion de shootings. En octobre 2013, change.org avait fait circuler une pétition appelant à boycotter le photographe. En avril 2014, le mannequin britannique Emma Appleton mettait sur son compte Twitter une copie d’écran d’un texto envoyé par Richardson : « Si je peux te baiser, je te mets dans mon shooting du Vogue à New York ». En 2014, sur le site du Huffington Post, Terry Richardson avait dénoncé des « mensonges », assurant avoir le consentement de ses modèles.

Dans un article intitulé « Terry le Terrible », publié en 1994, le Monde écrivait : « Sa notoriété repose aussi sur cette réputation de débauché professionnel qu’il a cultivée. De pervers assumé qui, en dehors de ses activités commerciales, a réalisé des images extrêmement explicites sur lesquelles il apparaît souvent nu et en érection , des clichés que d’aucuns jugent pornographiques et misogynes et qui peuvent déranger. »

Dans un texte envoyé aux sites Daily Beast et BuzzFeed, un représentant du photographe affirme que « Terry est déçu d’apprendre l’existence de ce courrier électronique [du responsable de Condé Nast], parce qu’il a déjà répondu à ces accusations. C’est un artiste qui est connu pour son travail au caractère sexuellement explicite. Les interactions avec ses modèles étaient de nature sexuelle, explicites par nature, mais à chaque fois dans le cadre d’un consentement mutuel ».

En 2015, interrogé par Le Monde, qui lui demandait « Quel regard portez-vous sur la vision libérée et décomplexée de la sexualité que vous véhiculez à travers vos clichés ? », il répondait : « C’est seulement l’un des aspects de mon travail. C’est évidemment un thème qui intéresse tout le monde et qui interpelle. Presque toutes les publicités utilisent le sexe, ou au moins le suggèrent, pour vendre un produit. La différence dans mon travail est peut-être que je suis intéressé par une sexualité libre et désinhibée, plus qu’une vision stéréotypée. »

Terry Richardson n’est qu’un cas parmi d’autres. Après les révélations de l’affaire Weinstein, la modèle et mannequin américaine Cameron Russell a invité ses collègues, via son compte Instagram, à dénoncer les prédateurs dans l’industrie de la mode, en partageant leurs expériences d’agressions sexuelles et de harcèlement en utilisant le hashtag #MyJobShouldNotIncludeAbuse.