L’Assemblée nationale a adopté dans la nuit du jeudi 2 au vendredi 3 novembre, en première lecture, le budget du ministère de la cohésion des territoires qui fait chuter de 1,7 milliard d’euros les financements alloués aux aides au logement (APL) dès l’an prochain.

Parmi les grands perdants du projet de loi de Finances pour 2018, le budget de ce ministère qui regroupe les politiques du logement, de l’aménagement des territoires et de la ville, va chuter de 9,8 % pour passer de 18,3 milliards d’euros en 2017 à 16,5 milliards en 2018.

Le ministre de la cohésion des territoires Jacques Mézard a défendu la volonté du gouvernement de « réinterroger l’efficacité de notre politique en matière d’aides personnelles au logement et de soutien à la construction ». « Nous avons, face à un investissement d’environ 40 ou 41 milliards d’euros, quatre millions de nos concitoyens qui sont mal-logés », a-t-il fait valoir.

Ainsi la « réforme des aides au logement » prévue dans l’article 52 du projet de loi doit-elle « conduire à une réduction des dépenses de l’Etat de 1,7 milliard d’euros en 2018 », dans un « dialogue constant avec les bailleurs sociaux » a assuré M. Mézard, alors que ces organismes exigent un moratoire sur une économie budgétaire qu’ils jugent « mortifère ».

Une mise en œuvre progressive

Adopté, un amendement déposé par le gouvernement doit permettre une « mise en œuvre progressive » de cette ponction financière : les loyers du logement social baisseront de 800 millions d’euros en 2018, 1,2 milliard en 2019, puis 1,5 milliard par an à compter de 2020, pour compenser une baisse des APL équivalente.

Mais l’économie budgétaire annuelle de 1,5 milliard d’euros visée par le gouvernement sera atteinte dès l’an prochain grâce à une hausse, en parallèle, de la cotisation versée par les bailleurs sociaux à la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS). « Le gouvernement fera des propositions visant à préciser ce mécanisme », a indiqué M. Mézard.

Objet d’une douzaine d’amendements de suppression, tous rejetés, l’article 52 a « fait l’unanimité contre lui, tellement il est profondément injuste » a affirmé l’ex-ministre du logement Sylvia Pinel (PRG), stigmatisant « l’improvisation et l’impréparation » de la réforme.

Pour Clémentine Autain, de La France insoumise, cet article « orchestre la mise en péril de tout le système du logement social, avec une perte de recettes considérable » des bailleurs sociaux.

Soutien de l’APL « accession »

« On va casser un modèle HLM que beaucoup nous envient », a estimé Stéphane Peu (PCF) ex-président de Plaine commune Habitat, fustigeant une « politique mûrement réfléchie, cohérente, visant à affaiblir le secteur HLM et renforcer le secteur privé ». « Partout en Europe où une telle politique a été menée, elle a été une catastrophe ».

« Réformer, pourquoi pas ? Mais vous imposez des mesures inadéquates comme la suppression de l’APL accession qui solvabilise les ménages modestes », a jugé de son côté Thibault Bazin (LR). Un « consensus s’est dégagé » dans l’Hémicycle, a-t-il souligné, en faveur du rétablissement de l’APL accession, un dispositif qualifié de « marqueur important » par le secrétaire d’Etat à la cohésion des territoires Julien Denormandie.

Mais ce dernier a semblé juger prématuré ce rétablissement, cette aide publique étant « un élément de la discussion en cours avec les bailleurs sociaux », a-t-il dit. Huit amendements en ce sens ont été rejetés et un neuvième a été retiré par son auteure, Stéphanie Do (LREM).

Vers deux heures du matin, après quatre heures trente de débats, la séance a été suspendue. La discussion sur la seconde partie du projet de loi de finances devait reprendre à 9 h 30 vendredi matin.