Le slogan de campagne de Valérie Plante, qui a été élue mairesse, a fait mouche à Montréal. / Projet Montréal

Comme son prédécesseur Denis Coderre, qui a mordu la poussière lors des élections de dimanche 5 novembre après un seul mandat, la nouvelle mairesse de Montréal n’a pas la langue dans sa poche. Inconnue du grand public il y a six mois, la jeune cheffe du parti d’opposition Projet Montréal a mené sa campagne tambour battant, y compris sur les réseaux sociaux, avec un slogan publicitaire qui a fait mouche. Elle s’y déclarait « l’homme de la situation », pour se moquer de façon « irrévérencieuse et audacieuse », disait-elle alors, de ce « chemin souvent tracé par des hommes » en politique municipale. Cette féministe engagée avait bien l’intention d’en modifier la trajectoire à son avantage.

Valérie Plante, 43 ans, a le rire tonitruant, une énergie débordante et un discours rafraîchissant, qui ont emporté l’adhésion d’une majorité d’électeurs (51 %) face à Denis Coderre, politicien accompli et qui se présentait comme un redoutable adversaire.

Née à Rouyn-Noranda, dans la région la plus occidentale du Québec, elle part à 15 ans étudier l’anglais dans l’Ontario. A 19 ans, parfaitement bilingue, elle poursuit ses études à Montréal et obtient un diplôme en anthropologie, une maîtrise en muséologie et un certificat en intervention multiethnique. Elle consacre ensuite une bonne partie de sa carrière au milieu associatif culturel et dirigera pendant plusieurs années la Fondation Filles d’action, un organisme pancanadien qui vient en aide aux jeunes femmes.

La candidate mise sur l’écoute des Montréalais

Mariée à un économiste de gauche et mère de deux adolescents, elle se lance dans la politique municipale en 2013 sous la bannière du parti d’opposition Projet Montréal. Contre toute attente, déjà, elle bat Louise Harel, politicienne d’expérience, dans un quartier populaire. En décembre 2016, elle remporte la course à la direction de son parti avec seulement soixante-dix-neuf voix de plus que son adversaire.

A moins d’un an de l’échéance des élections municipales et à la tête d’un parti qui n’a que vingt sièges sur soixante-cinq au conseil municipal, la tâche s’annonce rude. Valérie Plante multiplie alors les sorties de terrain, parlant de solidarité sociale, d’amélioration des transports en commun, de vie de quartier. Elle promet « plus de mobilité, plus de logements abordables et de meilleurs services publics ». La candidate à laquelle personne n’aurait prédit la victoire ne ménage pas son temps pour rencontrer des journalistes et s’entoure d’une équipe aguerrie qui travaille à présenter son « côté énergique et son authenticité ».

Pendant que M. Coderre met en avant son bilan de maire, notamment économique et international, elle mise sur l’écoute des Montréalais et de leurs préoccupations. Elle dévoile un programme aux accents sociaux et environnementaux d’envergure. Et n’a cure des critiques qui l’accusent de rêver en couleurs. Elle propose de construire davantage de logements sociaux, de limiter la hausse de taxes municipales (impôts locaux) à celle de l’inflation et surtout de faire de la « mobilité durable » sa priorité.

En finir avec la « classe sardine »

A ce titre, sa première décision, lundi 6 novembre, a été de commander trois cents autobus hybrides pour compléter la flotte actuelle, insuffisante selon elle. L’île de Montréal souffre d’un lancinant problème d’accès par des ponts et des autoroutes où les bouchons sont quotidiens, et de rames de métro bondées à l’heure de pointe. Pour en finir avec « la classe sardine », Valérie Plante veut une nouvelle ligne de métro « rose » qui compléterait le réseau existant, composé de deux lignes, orange et verte. La nouvelle traverserait la ville en diagonale d’est en ouest.

« Je tiens à bouger rapidement » sur ce dossier, a-t-elle dit lundi matin, peu après avoir pris un bain de foule en marchant depuis la sortie d’une station de métro du quartier des affaires jusqu’à l’hôtel de ville, dans le Vieux-Montréal. Evalué à plus de 4 milliards d’euros, le projet pourrait être en partie subventionné par un programme en infrastructures de transport collectif du gouvernement canadien.

Effet Trudeau, effet Macron ? Les électeurs montréalais ont en tout cas choisi de faire confiance à une jeune femme aux idées neuves, misant sur un changement de génération et de style politique. Place, dit-elle, à la responsabilité et à la transparence de l’administration municipale. Place aussi à la parité femmes-hommes au comité exécutif de la ville, comme l’a imposé Justin Trudeau dans son conseil de ministres à Ottawa. La décision est confortée par la forte majorité d’élues que compte désormais Montréal : cinquante-trois femmes sur cent trois postes au conseil municipal et dans les conseils d’arrondissement, tous partis confondus.