Documentaire sur France 2 à 20 h 55

Le 11 janvier plusieurs médias américains révélaient le contenu d’un rapport de 35 pages portant de graves et invérifiables allégations à l’endroit de Donald Trump élu, deux mois plus tôt, 45e président des Etats-Unis. Parmi elles, une supposée Golden shower (pratique sexuelle qui consiste à uriner sur quelqu’un, ou inversement) au Ritz Carlton de Moscou en 2013. Selon une des nombreuses sources anonymes sur lesquelles s’appuyait le document, les services secrets russes (FSB) auraient filmé Trump dans une chambre de cet hôtel avec « un certain nombre » de prostituées, « engagées » pour réaliser précisément « des golden showers devant lui ». Un procédé couramment utilisé et très connue des opposants à Vladimir Poutine, appelé Kompromat. Traduit littéralement par « dossier compromettant ».

Yoann Barbereau témoigne dans « Envoyé spécial ». / FRANCE 2

C’est à cette pratique secrète – Kompromat ayant été inventé par le KGB – mise en place pour compromettre des chefs d’états, grâce à des informations soutirées sur leur oreiller, que se sont intéressés Tristan Waleckx, Guillaume Beaufils et Mikael Bozo, pour cette enquête Sexe, chantage et vidéo, diffusée ce soir dans le magazine « Envoyé spécial ».

Entre autres exemples, les journalistes évoquent le cas Iouri Skouratov, alors procureur de la fédération de Russie qui, à l’automne 1998, avait commandé une enquête pour corruption contre plusieurs membres du clan du président Boris Eltsine. Une affaire qui n’ira pas loin, le Kremlin décidant rapidement d’intervenir avec l’aide du FSB. Résultat : en février 1999, une cassette vidéo est diffusée à la télévision russe, qui montre un homme ressemblant au juge Skouratov en pleine action avec deux prostituées. La carrière de ce dernier s’arrêtera là.

Le Kompromat médiatique

Si le documentaire donne bel et bien la preuve de l’usage historique de cette pratique – grâce notamment au témoignage d’un ancien haut fonctionnaire russe – il démontre aussi que le Kompromat a pris un tout autre tournant avec Vladimir Poutine. Les vidéos, autrefois conservées pour faire pression mais pas divulguées, sont désormais rendues publiques par voie médiatique.

Plusieurs opposants au président russe en ont été victimes. Les ébats sexuels entre Natalia Pelevine, opposante russe membre du parti « Parnas », et Mikhaïl Kassianov, ancien Premier ministre, ont été vus par plus de 10 millions de personnes à la télévision russe. Une dénommée « Moomoo » en a même fait son business, servant d’appât pour compromettre une dizaine de personnalités de l’opposition. Était-elle sous les ordres des services secrets ? « Envoyé spécial » a retrouvé sa trace. Tout comme celle du Français Yoann Barbereau, victime lui aussi d’un Kompromat en février 2015, qui sera présent, ce soir, sur le plateau d’« Envoyé Spécial ».

Ce dernier est alors président de l’Alliance française à Irkoutsk, en Sibérie quand sont piratées des photos personnelles de lui et sa famille. Photos qui se retrouvent très vite sur des forums pour jeunes parents et qui, retouchées et remontées, font passer ce père de famille pour un pédophile. Cette machination aurait été montée de toutes pièces pour annihiler l’influence de cet « Occidental » un peu trop apprécié dans sa ville.

« Envoyé spécial » : Sexe, chantage et vidéo, une enquête réalisée par Tristan Waleckx, Guillaume Beaufils et Mikael Bozo (France, 2017, 58 minutes).