Jean-Luc Melenchon, à Athènes, le 27 octobre. / ANGELOS TZORTZINIS / AFP

Le feu couve entre Jean-Luc Mélenchon et les « insoumis » Corse. Le dirigeant de La France insoumise (LFI) n’accepte pas que le PCF et La Corse insoumise aient constitué ensemble une liste, L’Avvene, a Corsica in cumunu (« L’Avenir, la Corse en commun »), pour les élections territoriales des 3 et 10 décembre. Dans un texte publié sur son blog le 7 novembre, le député des Bouches-du-Rhône fulmine contre ce qu’il appelle « une misérable usurpation de notre sigle ».

« Cette pauvre tambouille, poursuit-il, tourne le dos à toutes les grandes questions qui se posent en Corse à partir du vote des législatives », qui ont vu les électeurs corses porter à l’Assemblée nationale trois députés nationalistes sur quatre. L’alliance formée par les autonomistes de Femu a Corsica et les indépendantistes de Corsica Libera dirige déjà la collectivité territoriale et l’Assemblée de Corse depuis les élections de décembre 2015.

« Divorce déjà consommé »

M. Mélenchon n’hésite pas à prédire, d’une part, que « les électeurs corses sanctionneront cette façon de tenter de les duper » et, d’autre part, que la direction du PCF, qui soutient cette initiative – le secrétaire national du parti, Pierre Laurent, participait jeudi 9 novembre au meeting de lancement de la campagne de la liste conduite par Jacques Casamarta à Bastia –, « aggrave par une nouvelle provocation le divorce déjà consommé entre nous ». D’évidence, le « jacobin » Mélenchon, comme il se qualifie, privilégie aujourd’hui le dialogue avec les dirigeants autonomistes corses, qu’il a l’intention de rencontrer prochainement « pour échanger avec eux et comprendre leur démarche ».

Cette déclaration d’excommunication proférée par le chef de La France insoumise a fait bondir les chefs de file de L’Avvene, a Corsica in cumunu. Sur son site, Michel Stefani, conseiller territorial sortant et numéro trois sur la liste, sur laquelle figurent les quatre candidats désignés par LFI aux législatives, estime que « Jean-Luc Mélenchon a choisi de s’exprimer non pour respecter l’engagement sur place de femmes et d’hommes qui ont fait en Corse sa campagne mais en leur crachant dessus ». « C’est la seconde fois et c’est une fois de trop », poursuit-il.

Le secrétaire régional du PCF ne mâche pas ses mots. « Nous savions que l’humilité n’était pas le fort de Jean-Luc Mélenchon mais, là, il crève le plafond en nous expliquant cela depuis son bureau parisien par l’intermédiaire de son blog, s’insurge M. Stefani. Il se dit que le ridicule ne tue pas. Lui ne risque rien. »

« Coup de poignard »

Lors du meeting de Bastia, M. Laurent a également déploré cette prise de position de M. Mélenchon. « Je ne comprends pas cette polémique, a déclaré le sénateur. Que Jean-Luc Mélenchon ne veuille pas s’associer à ce rassemblement, c’est son choix. Mais pourquoi tenter de le disqualifier ? » Le chef de file de la liste, M. Casamarta, justifie pour sa part le choix de l’alliance : « Quand on voit la situation économique, qu’on se retrouve dans la rue pour manifester, il est important de se retrouver aussi dans les urnes, insiste-t-il. La division aurait été une impasse. »

Les responsables d’Ensemble, Manca alternativa, également partie prenante de la liste, évoquent quant à eux « un coup de poignard dans le dos ». « Pour couronner le tout, notent-ils, Jean-Luc Mélenchon se propose de rencontrer les trois députés nationalistes siégeant à l’Assemblée nationale. C’est son droit mais, dans le contexte actuel, cette rencontre est particulièrement inopportune. Elle apparaît comme un soutien implicite à des gens qui – dans leur majorité – se déclarent pour l’Europe libérale et s’accommodent fort bien du système actuel sous couvert de revendications identitaires. »

Et M. Stefani d’asséner le coup de pied de l’âne. « Jean-Luc Mélenchon pense qu’il incarne à lui tout seul le rassemblement et que tout ce qui peut se faire autrement n’est que “tambouille”, relève-t-il. A ce stade, il ne nous reste plus qu’à lui recommander le Prozac. » Ambiance.