Les habitants dénoncent depuis plusieurs années les conditions d’exploitation de la SNEM (Société nouvelle d’eugénisation des métaux), un sous-traitant des groupes Airbus et Safran, spécialisé dans le traitement chimique de pièces pour l’industrie aéronautique. / MARTIN BUREAU / AFP

« Fermeture de l’usine polluante ! » C’est à ce cri que quelque 300 personnes ont une nouvelle fois manifesté, dimanche 12 novembre à Montreuil (Seine-Saint-Denis), contre une usine de ce quartier résidentiel, qui utilise des produits hautement toxiques, dont du chrome VI, interdit depuis septembre à l’échelle européenne.

Munis de pancartes « zone contaminée », « dépollution » ou « défense des salariés », les opposants à cette usine ont défilé jusqu’à la mairie de cette ville de proche banlieue parisienne. Plusieurs élus étaient présents à la manifestation, dont Alexis Corbière, député La France Insoumise de la circonscription.

Un cas de leucémie

« Locaux vétustes », « écoulement de produits chimiques dans les rues », « odeurs âcres »… Les habitants dénoncent depuis plusieurs années les conditions d’exploitation de la SNEM (Société nouvelle d’eugénisation des métaux), un sous-traitant des groupes Airbus et Safran, spécialisé dans le traitement chimique de pièces pour l’industrie aéronautique.

Située à une cinquantaine de mètres du groupe scolaire, cette installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) est devenue indésirable pour les habitants du quartier depuis qu’un cas de leucémie rare (s’ajoutant à deux autres cas en quinze ans dans la même rue, dont un mortel) a été déclaré chez un élève de CM2 avant l’été.

Depuis, la mobilisation n’a pas faibli, bien que plusieurs séries d’analyses conduites depuis, sous l’égide de la préfecture de Seine-Saint-Denis, aient conclu à « l’absence de risque pour les populations avoisinantes ».

Révision du système d’aération

Selon la préfecture, l’exploitant, qui avait aussi été mis en demeure d’améliorer sa gestion des déchets et son système d’aération notamment, a entrepris les travaux demandés dans les temps impartis.

Des éléments insuffisants pour les manifestants, qui dénoncent des irrégularités dans les analyses. Les résultats de l’étude menée pendant l’été par le laboratoire central de la préfecture de police, auxquels Le Monde a eu accès, montrent que des taux anormalement élevés de chrome VI ont été retrouvés dans l’usine, alors même que son activité était limitée.

Ainsi, une concentration de 3,6 µg/m3 a été mesurée dans l’air intérieur lors d’un prélèvement effectué le 1er août, soit plus de trois fois la limite autorisée. Un dépassement qui n’a pas échappé à l’agence régionale de santé (ARS) qui relève que « concernant le chrome VI, l’attention de l’exploitant est attirée sur un possible dépassement de la VLEP [valeur limite d’exposition professionnelle] sur huit heures fixée à 1 µg/m3. »

Particulièrement prisé dans l’aéronautique pour ses qualités anticorrosives, le chrome VI est classé cancérogène, mutagène et reprotoxique. Le règlement européen Reach interdit définitivement son usage dans l’Union européenne depuis le 21 septembre. Mais Airbus et Safran ont obtenu une dérogation pour continuer à l’utiliser.

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