Le 15 novembre 2017, à Hararé, portrait du président zimbabwéen Robert Mugabe jeune. Aujourd’hui âgé de 93 ans, Robert Mugabe est au pouvoir depuis trente-sept ans. / Philimon Bulawayo/REUTERS

La confusion règne au Zimbabwe, mercredi 15 novembre, après une nuit agitée qui a vu des militaires s’adresser à la télévision nationale dont ils ont pris le contrôle. « Il ne s’agit pas d’un coup d’Etat militaire contre le gouvernement », a assuré le porte-parole de l’armée, le général Sibusiso Moyo. La situation sur place serait calme, des véhicules blindés et des soldats ont bloqué les routes menant aux principaux bâtiments gouvernementaux et encerclé le Parlement.

Des nouvelles de Robert Mugabe

Le président sud-africain Jacob Zuma a annoncé s’être entretenu par téléphone ce mercredi 15 novembre avec le président zimbabwéen Robert Mugabe, 93 ans, qui a dit aller bien et être assigné à résidence. Jacob Zuma, en tant que président de la Communauté de développement d’Afrique australe (CDAA), va envoyer deux émissaires spéciaux au Zimbabwe pour y rencontrer le président Mugabe ainsi que l’armée.

Un étrange voyage en Chine

Le chef d’état-major de l’armée zimbabwéenne a effectué une récente visite en Chine qui, dans le contexte, prend un relief particulier. Le général Constantino Chiwenga a rencontré le 3 novembre à Pékin le ministre chinois de la défense, Chang Wanquan. De retour à Hararé, le général Chiwenga avait adressé lundi 13 novembre un avertissement sans précédent au parti au pouvoir, la Zanu-PF, dénonçant l’éviction du vice-président Emmerson Mnangagwa et prévenant que l’armée n’hésiterait pas à intervenir pour « protéger notre révolution ». Mercredi, c’était chose faite : une partie de l’armée a pris le pouvoir. Les sociétés chinoises sont très présentes au Zimbabwe.

Arrestations dans le clan de Grace Mugabe

Mercredi matin, plusieurs sources font état d’une série d’arrestations. Parmi elles figureraient le ministre des finances Ignatius Chombo, le ministre et commissaire politique Saviour Kasukuwere, le neveu de Robert Mugabe également chargé du programme d’indigénisation Patrick Zhuwayo, le directeur adjoint des services de renseignement Albert Ngulube, ou encore le président de La ligue des jeunes de la Zanu-PF, Kudzai Chipanga.

Retour non confirmé du vice-président

Emmerson Mnangagwa, alias le « Crocodile » en raison de son caractère impitoyable, a annoncé sur Twitter son retour dans le pays mercredi matin. Ancien patron des services de renseignement, il a perdu en octobre son portefeuille de ministre de la justice. Longtemps pressenti comme le dauphin de Robert Mugabe, sa mise à l’écart comme vice-président le 6 novembre, à la suite de laquelle il aurait réussi à quitter le pays, est le déclencheur de la crise actuelle.

Communication nocturne

D’après le communiqué qui a tourné en boucle à la télévision dans la nuit de mardi à mercredi, le président Robert Mugabe et sa femme, Grace, sont « en sécurité », alors que l’armée vise « les criminels qui l’entourent ». « Peu après 2 heures du matin, nous avons entendu environ 30 à 40 coups de feu tirés pendant trois ou quatre minutes en provenance de la maison » de M. Mugabe, a déclaré un résident du quartier à l’AFP.

Des chars dans la capitale

Mardi soir 14 novembre, l’arrivée de blindés dans la capitale a alimenté toutes les spéculations. Selon des témoins, une partie s’est dirigée vers le centre-ville alors que d’autres se sont dirigés vers le complexe de la garde présidentielle, dans le quartier de Dzivarasekwa, à la lisière de la capitale. Plus tard dans la soirée, de fortes explosions ont été entendues dans le centre de Hararé, après que des troupes se sont déployées dans les rues de la ville et se sont emparées du siège de la ZBC, le groupe de radio télévision public du pays.

Un général parle

Lundi 13 novembre, le chef des armées, le général Constantino Chiwenga, a vivement dénoncé le limogeage « humiliant » du vice-président Emmerson Mnangagwa et mis en garde M. Mugabe contre une possible intervention, élevant les tensions d’un cran. Ce geste de défiance de l’armée envers Robert Mugabe, qui, à 93 ans, est le plus vieux chef d’Etat du monde en exercice, est une première depuis l’indépendance en 1980.

Le « Crocodile » écarté

Le vice-président Emmerson Mnangagwa, dit « le Crocodile », a été limogé sèchement lundi 6 novembre. Dans l’une de ses dernières apparitions, à Masvingo, son fief, Emmerson Mnangagwa avait affirmé avoir été victime d’une tentative d’empoisonnement dans un meeting de la Zanu-PF, le parti au pouvoir, qu’il avait animé aux côtés de Robert Mugabe et de son épouse, Grace.

Une femme à la vice-présidence ?

Samedi 4 novembre, Robert Mugabe annonçait qu’il avait l’intention de nommer une femme à la vice-présidence. Et qu’il faudrait changer la Constitution pour l’imposer à la tête du presidium, la structure au sommet de l’Etat. Il n’a pas dit « ma femme », mais cette dernière a aussitôt saisi la perche. Dimanche 5 novembre, elle a déclaré lors d’un rassemblement dans un stade de Hararé : « Je dis à M. Mugabe : vous devriez me laisser prendre votre place. (…) N’ayez pas peur. Si vous voulez me donner votre poste, donnez-le moi librement. » Cela ressemblait à une tentative pour forcer la main du président, qui a répété qu’il compte être candidat à sa propre succession lors des élections de 2018.

Les 10 articles du « Monde » pour comprendre la crise au Zimbabwe

Hararé s’est réveillée, mercredi 15 novembre, dirigée par des militaires qui ont pris le pouvoir dans la nuit, sous la direction du général Chiwenga, et placé le président Robert Mubgabe, 93 ans, en résidence surveillée.

Retour sur les semaines de tension qui ont précédé le coup de force, en quelques articles essentiels.

Zimbabwe : radioscopie d’une folle économie
Durée : 04:05