Gabriel Lacroix a inscrit deux essais face aux All Blacks mardi 14 novembre. / FRANCK FIFE / AFP

Les réservistes du XV de France n’ont pas démérité, mardi 14 novembre, à Lyon face à ceux des All Blacks. Ils n’ont perdu que de cinq points (28-23) quand les titulaires avaient lourdement chuté samedi au Stade de France (38-18). Si l’on peut tout de même continuer à douter de l’intérêt sportif d’organiser au milieu de cette tournée d’automne un match qui n’avait pas le statut de test, on doit reconnaître qu’il a apporté un indéniable vent de fraîcheur.

Pourtant, ce XV de France « bis » n’avait eu le droit qu’à deux vrais entraînements et il comptait au coup d’envoi six joueurs jamais capés : Lacroix, Lesgourgues, Macalou, Tauleigne, Hamadache, Priso. Ils ne le seront d’ailleurs toujours pas puisque World Rugby a refusé de reconnaître le statut officiel de cette rencontre. Certains joueurs ont peut-être forcé leur destin dans le Rhône. Comme André Gide le disait : choisir, c’est renoncer. Et malgré la belle performance du troisième ligne Sekou Macalou, c’est l’ailier Gabriel Lacroix qui a le plus brillé.

Gersois

A 24 ans, le joueur de La Rochelle a marqué ses deux premiers essais internationaux. Le Toulousain, qui a grandi dans le Gers, remet à la mode le profil de l’ailier « poids plume » [1,71 m et 80 kg, tout est relatif] à une époque où ces finisseurs sont souvent bodybuildés. Son premier essai à la 16e minute de jeu est venu conclure une belle action collective menée par Camille Chat, François Trinh-Duc et Scott Spedding. Sur le second, Lacroix a fait preuve de malice et d’à-propos pour intercepter le ballon sur ses 22 mètres avant de conclure victorieusement cette longue course grâce à sa vitesse (28e).

Demi-finaliste du Top 14 la saison dernière pour sa deuxième saison au sein de l’élite avec le Stade rochelais, qu’il a intégré en juin 2015, Gabriel Lacroix n’en finit plus de démontrer ses capacités de marqueur d’essai. En 2016-2017, il en a inscrit dix. Lors de sa première saison, il en avait réussi quatre. Protégé par son casque, qui laisse apparaître une crinière blonde, il a confirmé ce soir au plus haut niveau ses talents de finisseur. A un poste où l’équipe de France ne dispose pas d’un réservoir très fourni, il peut rêver de bousculer la hiérarchie.

Sans complexe, naturellement doué, le jeune homme, qui a perdu son père à l’âge de trois ans, n’a pas eu un parcours linéaire. C’est le « sorcier gersois », Henry Broncan, son entraîneur lors de son passage à Albi, qui raconte à Midi olympique :

« C’était une exception, il faut le signaler tout d’abord. Il venait de Simorre (700 habitants) où le foot est roi. Heureusement, il avait, entre-temps, été attiré à Lombez-Samatan (2 000 habitants à Lombez et 2 300 à Samatan) et s’était consacré au rugby. Nous étions à un championnat UNSS, à Dole, dans le Jura. Ça ne s’invente pas. J’étais manager à Auch et j’accompagnais les élèves du collège. Au premier regard, je me suis rendu compte qu’il était extrêmement doué. Je savais que ça allait être une vedette. »

« Il a fait les quatre cents coups »

Le Stade toulousain attire en premier le talent, mais Gabriel quitte l’institution du rugby français au bout de deux petites années. Il rejoint d’abord Auch, puis retrouve à Albi une vieille connaissance, Henry Broncan. Il débute en Pro D2 en décembre 2011 alors qu’il n’a que 18 ans. Il mettra trois ans à devenir titulaire. « A ses yeux, le rugby est longtemps resté un loisir. Il mordait dans la vie à pleines dents. Il a fait les quatre cents coups et même davantage en dehors du terrain. J’en ai eu quelques cheveux blancs… Mais personne ne lui en voulait. Il était tellement gentil et bien intentionné. En plus, il était assidu aux entraînements et investi sur le terrain. Progressivement, il s’est stabilisé », révèle Broncan, toujours au Midi olympique.

Alors que l’équipe de France dispute samedi face à l’Afrique du Sud son deuxième test-match de cette tournée d’automne, Gabriel Lacroix aura-t-il plus tôt que prévu l’occasion de poursuivre sa progression constante ? Le dernier rendez-vous international face au Japon le 25 novembre constituerait une « vraie » première idéale pour l’ailier de poche.