Lorenzo, étudiant à l’université Paris-Nanterre,  évoque sa « revanche ». / LA ZEP PAR CAMPUS

Voix d’orientation. Le Monde Campus et la ZEP, média jeune et participatif, s’associent pour faire témoigner lycéens et étudiants de leurs parcours d’orientation. Cette semaine, Lorenzo, 21 ans.

Lorsque j’étais en seconde mon prof de maths nous répétait sans cesse : « C’est l’année la plus importante de votre vie, vous ne vous en rendez pas compte ! »

L’état psychique dans lequel je me trouvais ne me permettait pas de me concentrer sur ma seconde. Mon lycée m’a expliqué que je ne pourrais pas intégrer la classe de 1re ES car il fallait que j’améliore mes résultats…

A ces « difficultés de travail » se sont ajoutés des problèmes de comportement qui n’ont pas arrangé la situation. Les profs m’ont signifié que, quels que soient mes résultats à la fin de l’année ou l’orientation choisie, je ne serais pas conservé au sein de l’établissement.

Avant de me pousser vers la porte de sortie, j’ai eu un rendez-vous avec la conseillère d’orientation. Les profs m’ont dit que c’était « la meilleure chose à faire pour moi ». J’avais l’espoir (naïf) que ce rendez-vous règle mes problèmes en un claquement de doigts. Sur le moment je ne me suis pas rendu compte que, dans ce bureau, s’est jouée l’une des plus grandes étapes de ma vie. Une étape qui ne m’appartenait pas.

J’ai fait des petites croix sur une feuille : un test d’orientation dans lequel je devais cocher mes centres d’intérêt. Et abracadabra, mon futur métier est apparu comme par magie ! Selon les résultats du test, j’étais fait pour m’orienter vers un bac professionnel en aménagement paysager. Je n’avais pas la moindre idée de ce que cela représentait… Ça n’a pas empêché la conseillère d’orientation de me persuader que cette voie était faite pour moi. J’ai essayé d’être aussi persuasif pour convaincre ma pauvre mère, en pleurs et tellement déçue, que cela me satisfaisait.

L’été suivant ma mère a décidé que j’allais suivre ma formation en internat. Elle ne souhaitait pas revivre la même sensation d’échec déjà connue avec mon grand frère.

J’ai vite réalisé que la conseillère d’orientation avait fait fausse route en m’envoyant là. J’étais dans une formation qui ne m’intéressait pas. J’avais trois heures par jour de transport et un stage insupportable de deux mois en entreprise m’attendait durant l’été : j’étais perdu. Insupportable, ce stage m’a au moins permis d’ouvrir les yeux. A la fin, j’ai entamé ma terminale avec l’espoir que l’on me propose une nouvelle orientation. J’étais naïf.

Comme j’étais en voie professionnelle, deux choix m’ont été proposées : continuer dans cette filière en poursuivant en BTS ou entrer dans la vie active.

Et pour ceux, comme moi, qui ont été mal orientés et qui souhaitent faire autre chose, que faire ? Aucun enseignant ni ppersonnel administratif n’a été capable de me donner une réponse à la hauteur de mes espérances. Je ne me voyais pas avoir cette vie-là jusqu’à une hypothétique retraite ! J’ai décidé de tout arrêter une fois mon bac pro en poche.

J’ai réfléchi durant plusieurs semaines. J’étais sûr d’une chose : il fallait que j’exerce un métier où je m’épanouirais et, si possible, en lien avec ma passion : le foot.

A 19 ans, j’avais conscience d’avoir laissé passer ma chance de devenir footballeur professionnel. Mais ce n’est pas parce que je n’avais pas « percé » sur le terrain que je ne pourrais pas le faire en dehors. Ayant le goût de l’écriture, j’ai décidé de m’orienter vers des études de journalisme sportif.

J’aurais pu me laisser tenter par la facilité et entrer à la fac dès cette rentrée mais j’avais une revanche à prendre sur mes trois dernières années. Je me suis rappelé avoir vu à la télévision un jour que des adultes passaient leurs bacs des années après avoir arrêté leurs études. Et pourquoi pas moi ?

Je me suis alors inscrit pour passer un bac ES en candidat libre à la fin de l’année. J’ai dû rattraper mes lacunes de seconde et assimiler le programme de 1re et de terminale ES en une année en bossant à la médiathèque tous les jours. En juin 2015 j’ai obtenu mon bac ES ! Je suis aujourd’hui en troisième année de licence humanités à Nanterre.

Comme le rappait Rohff : « Gros on l’a fait, sans assistance / Sans le système j’ai dû violer ma chance / L’éducation nationale n’y est pour rien ! » En route pour le journalisme sportif !

La ZEP / Le Monde

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La Zone d’Expression Prioritaire (la ZEP) est un dispositif media original d’accompagnement à l’expression des jeunes de 15 à 25 ans par des journalistes professionnels. Via des ateliers d’écriture dans des lycées, universités, associations étudiantes, structures d’insertion etc, les jeunes témoignent de leur quotidien et de l’actualité qui les concernent. Tous leurs récits sont à retrouver sur la-zep.fr.