Dans un concert de rap à l’AccorHotels Arena de Paris, il y aura toujours quelqu’un pour dire : « Vraiment le hip-hop, c’était mieux avant !  » Mercredi 22 novembre, le spectacle proposé par PNL, soit les deux frères Ademo et N.O.S a certainement fait s’arracher les cheveux à quelque parent de la génération NTM accompagnant leur adolescent ou à quelques invités venus en curieux juger sur pièce le duo phénomène qui clôturait là une tournée de quelques dates, donnée à guichets fermés. En effet, sur scène, pas de représentants des autres disciplines de la culture hip-hop : pas de DJ pour un scratch, pas de danseurs, pas de graffiti en fond de scène. Encore moins de musiciens. Non que du rap chanté au travers d’un vocodeur. Pourtant rarement un groupe ou artiste actuel n’aura été autant en phase avec son époque, autant incarné finalement la culture hip-hop.

Un cœur géant

Les deux frères issus de la cité des Tarterêts à Corbeil-Essonnes ont autoproduit leurs trois albums, refusent les rencontres avec les médias, entretiennent une proximité rare avec leur public, qui connaisse la moindre de leurs rimes. Il suffit de voir N.O.S emprunter les téléphones portables de ses fans et filmer pour eux le spectacle vu de la scène et leur rendre les appareils respectueusement via la sécurité. Quand Ademo, visiblement ému, prend pour la première fois la parole après le titre Oh La La, il bafouille un : « On est super heureux d’être là. » La scénographie est soignée comme dans leurs clips vidéos qui ont fait leur succès. Sur scène, la sculpture géante d’un cœur, le même qui figurait sur leur premier album, fait face à un arbre qui se couvre de temps en temps de son feuillage et que le groupe rejoint via un chemin sinueux. Les vidéos projetées en mapping sur le cœur donnent l’impression au public qu’il bat réellement, rien à voir avec les effets kitsch de Soprano ou les vidéos abêtissantes de Maître Gims dans cette même salle, il y a quelques mois. L’ensemble avec l’éclairage tout aussi léché offre des clichés magnifiques aux écrans de téléphone de leurs fans.

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Sur scène, les deux frères, d’un calme impressionnant et au jeu de scène plus que minimaliste, déroulent leur répertoire sans accro, allumant cigarette sur cigarette. Leur manière à eux d’évacuer le trac. Au diable la loi Evin. Quand ils chantent Dans La Légende, les écrans projettent un jeu vidéo, où les deux frères, en personnages dignes de Mortal Kombat dégomment leurs concurrents dans un parcours intitulé : « Combats les dealers ! » Dans leurs textes, go fast et règlements de compte sont trop, souvent, malheureusement au menu. Les titres Abonné ou Béné sont l’occasion de jolis moments de communion avec des fans qui leur envoient sur scène le drapeau algérien et celui de la Corse, les couleurs de ceux des origines de leur mère et de leur père, N.O.S adresse un fédérateur : « Tous les drapeaux sont bons, la famille : Algérie, France, toutes les nationalités… On est tous ensemble : les Africains, les Chinois, les Noirs, les Blancs, les Arabes… Tous, ensemble, la famille. » Pas de communautarisme chez eux, juste un cœur qui bat caché sous des montagnes d’attitude, de muscles et de testostérone. Celui d’une culture hip-hop fédératrice, sans cesse renouvelée, actualisée.