Le président kényan, Uhuru Kenyatta, a été investi, mardi 28 novembre, pour un second et dernier mandat à la tête de son pays, lors d’une cérémonie marquant la fin d’une saga électorale à rebondissements qui a rappelé au Kenya ses profondes divisions ethniques, géographiques et sociales.

Réélu lors de la présidentielle d’octobre boycottée par l’opposition, M. Kenyatta a prêté serment sous les vivat des 60 000 personnes rassemblées dans un stade de la capitale, Nairobi. Mais la fanfare militaire et la présence de treize chefs d’Etat, principalement africains, dans ce stade bondé où le président a scellé son maintien à la tête du pays pour cinq années supplémentaires sont l’arbre qui cache la forêt.

Cette prestation de serment signale certes la fin d’une saga électorale marquée notamment par l’invalidation en justice de la présidentielle du 8 août, mais le pays sort meurtri de cet exercice démocratique, qui lui a rappelé ses profondes fractures ethniques, géographiques et sociales. Sur fond de déploiement sécuritaire important dans Nairobi, la police a bouclé mardi un terrain du sud-est de la ville où l’opposition entendait organiser son propre rassemblement. A coups de gaz lacrymogène et de tirs de semonce, les forces de l’ordre ont joué au chat et à la souris avec des groupes de partisans de l’opposant Raila Odinga, environ 200, qui tentaient de se rendre sur les lieux, selon un journaliste de l’Agence France-Presse (AFP).

Le chaos a également été au rendez-vous autour du stade de Kasarani, où la police a tiré des gaz lacrymogènes sur des partisans du président qui tentaient de pénétrer dans le stade déjà rempli. Ces échauffourées ont fait plusieurs blessés.

« Désobéissance civile »

Depuis plusieurs semaines, l’opposition répète ne pas reconnaître la victoire de M. Kenyatta et a promis de poursuivre une campagne de « désobéissance civile » suivie jusqu’à présent de manière inégale par ses partisans. Selon un comptage de l’AFP, les violences ayant accompagné le processus électoral ont fait au moins 56 morts depuis le 8 août, principalement dans la brutale répression des manifestations de l’opposition par la police. Loin toutefois du millier de morts des violences politico-ethniques ayant suivi l’élection de 2007.

Cette crise politique avait paradoxalement débuté par une décision historique de la Cour suprême, le 1er septembre : saisie par l’opposition, elle évoquait des irrégularités dans la transmission des résultats et invalidait la présidentielle du 8 août. Une première en Afrique. Le jugement fut salué comme une opportunité pour les hommes politiques kényans de renforcer la démocratie, mais ces derniers n’ont redoublé d’efforts que dans leurs violentes invectives. C’est dans un climat politique délétère que M. Kenyatta, 56 ans et au pouvoir depuis 2013, a été proclamé vainqueur de la nouvelle présidentielle, organisée le 26 octobre.