Le président français, Emmanuel Macron, à son arrivée à l’aéroport d’Alger, le 6 décembre. / POOL / REUTERS

Après une visite « de travail et d’amitié » en Algérie, mercredi 6 décembre, Emmanuel Macron devait se rendre au Qatar jeudi, son premier déplacement officiel dans l’émirat gazier depuis son élection à la présidence de la République. Le chef de l’Etat devait néanmoins n’y rester qu’une poignée d’heures, le temps de rencontrer les forces françaises présentes sur la base d’Al-Oudeid, engagées en Syrie et en Irak, et de s’entretenir avec le cheikh Tamim Ben Hamad Al-Thani.

« Cette visite sera très dense », assure-t-on néanmoins à l’Elysée, où l’on se félicite du « dialogue constant » engagé avec Doha, notamment en matière de lutte contre le terrorisme. Les deux chefs d’Etat présideront d’ailleurs une « réunion pour la coopération bilatérale en matière de lutte contre le terrorisme, le financement du terrorisme et la radicalisation », qu’ils vont s’engager tous les deux à renouveler régulièrement. « Ce sera aussi l’occasion de préparer la conférence internationale organisée sur le sujet à Paris en janvier », assure l’entourage du président français. Pierre Bousquet de Florian, coordinateur national du renseignement et de la lutte contre le terrorisme, accompagnera M. Macron lors de sa visite.

Ce déplacement au Qatar intervient après celui effectué le 8 novembre aux Emirats arabes unis, où Emmanuel Macron était venu inaugurer le musée du Louvre d’Abou Dhabi, mais surtout après sa rencontre avec Mohammed Ben Salman, le prince héritier et nouvel homme fort d’Arabie saoudite. Cette visite impromptue à Riyad, effectuée dans la foulée du déplacement aux Emirats, pour débloquer la crise née de la démission du premier ministre libanais, Saad Hariri, a été très mal perçue par l’Iran, l’autre puissance régionale, engagée dans un bras de fer avec le royaume wahhabite. Paris et Téhéran n’ont toujours pas trouvé de date pour une venue en Iran de Jean-Yves Le Drian, le ministre des affaires étrangères, qui est censée préparer le terrain à un déplacement ultérieur du chef de l’Etat dans ce pays.

En se rendant rapidement au Qatar, Emmanuel Macron entend apaiser ce début de tension avec Téhéran et « montrer que la France ne choisit pas un camp contre un autre », explique-t-on à l’Elysée. Depuis le 5 juin, le Qatar fait l’objet d’un blocus économique et diplomatique de la part de ses voisins sunnites du Golfe, principalement l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis, qui l’accusent de soutenir des groupes extrémistes et d’être trop proche de l’Iran chiite.

« Tous les pays de la région sont des amis et des alliés de la France, qui est une puissance d’équilibre et tient un discours d’apaisement », souligne l’entourage de M. Macron, où l’on rappelle que « les monarchies du Golfe ont besoin de stabilité pour être attractives ». Officiellement, Paris, qui s’est prononcé pour une levée du blocus frappant le Qatar mis en place par ses voisins, soutient toujours la médiation engagée par le Koweït, le seul émirat avec Oman à n’avoir pas pris partie dans le conflit du Golfe, même si celle-ci n’a guère eu de résultat pour le moment.

Au lieu d’enclencher un début de solution, le sommet du Conseil de coopération du Golfe, le club des pétromonarques de la péninsule Arabique, qui s’est tenu à Koweït-City mardi, a encore avivé ce schisme. L’émir Tamim y a été ostensiblement snobé par ses pairs d’Arabie saoudite, des Emirats arabes unis et de Bahreïn, qui ont envoyé à leur place des membres de leur gouvernement, et les discussions, censées durer deux jours, ont tourné court au bout de quelques heures.

Faire avancer quelques dossiers économiques

Dans la droite ligne de ses prédécesseurs Nicolas Sarkozy et François Hollande, Emmanuel Macron devait également profiter de sa visite à Doha pour faire avancer quelques dossiers économiques. Sa venue devrait réconforter les entreprises françaises implantées sur place, qui commençaient, pour certaines, à s’inquiéter d’un affaiblissement de la relation Paris-Doha, notamment le groupe Vinci, qui vient de perdre un gros contrat de construction de bases militaires.

Un protocole d’accord devait notamment être signé jeudi matin, accordant l’exploitation du futur métro automatique de Doha à un consortium composé des français Keolis (filiale de la SNCF) et RATP Dev. Ce métro, dont l’exploitation pourrait rapporter quelque 3 milliards d’euros en vingt ans à l’opérateur, devrait être opérationnel fin 2019.

Des avancées étaient également attendues concernant l’achat au français Nexter de plusieurs centaines de véhicules blindés VBCI, dont ce serait le premier succès à l’exportation. L’industriel et l’émirat discutent depuis plusieurs années à ce sujet mais « le bout du tunnel se rapproche », veut croire une source au sein de l’exécutif. De la même façon, l’émirat pourrait lever l’option qu’il détient sur l’achat de douze Rafale, qui viendrait compléter une commande de vingt-quatre avions de combat effectuée en 2015 et dont le premier exemplaire doit être livré fin 2018, selon le groupe Dassault. Un partenariat devrait enfin être signé avec la Bibliothèque nationale de France pour la numérisation des archives qataries