Vladimir Poutine / Le Monde

Une brève clameur, et quelques mots ont suffi. « La Russie continue d’aller vers l’avenir et personne, jamais, ne l’arrêtera. Oui, je vais présenter ma candidature » à l’élection présidentielle, a annoncé, mercredi 6 décembre, Vladimir Poutine devant les employés de l’usine automobile GAZ de Nijni-Novgorod, qui fêtait, sur les bords de la Volga, son 85e anniversaire. Artiom Baranov, le contremaître chargé de poser la question au président, le savait bien. « Je n’avais aucun doute, comme tous ceux dans la salle », a-t-il commenté devant les caméras.

La mèche avait été allumée quelques instants plus tôt dans la gigantesque patinoire Megasport Arena de Moscou. Devant plusieurs milliers de jeunes réunis pour une convention de « volontaires bénévoles », le chef du Kremlin avait déjà fait le premier pas. « Est-ce que vous me soutiendrez ? », avait-il lancé. « Ouiiiii », lui avait répondu l’assistance, enthousiaste.

Depuis un bon moment en effet, les Russes ont bien compris que Vladimir Poutine, 65 ans, briguerait un quatrième mandat à la tête du pays. D’une durée de six ans (depuis 2012), son nouveau bail s’achèvera en 2024. Car personne ne doute, non plus, de sa victoire. Au pouvoir depuis dix-sept ans, il a déjà dépassé Brejnev en devenant le dirigeant à la plus longue longévité au Kremlin après Staline.

Mauvaises relations avec l’Occident

Cette fois encore, le dirigeant russe n’affrontera aucune concurrence périlleuse pour le scrutin prévu le 18 mars 2018 – jour anniversaire de l’annexion de la Crimée par la Russie. Son principal opposant, Alexeï Navalny, condamné pour des malversations financières qu’il nie, ne pourra pas participer au scrutin.

Poutine IV n’est cependant plus tout à fait le même que Poutine I, lorsque l’ancien officier du KGB avait pris les rênes du pays en 2000. La Russie est redevenue un acteur de premier plan sur la scène internationale. Elle est en passe de gagner sa guerre en Syrie en soutien à son allié Bachar Al-Assad.

A contrario, les relations avec l’Occident, et en particulier les Etats-Unis, n’ont jamais été aussi mauvaises depuis la fin de la guerre froide. A cause des sanctions occidentales et de la chute des cours du pétrole, le revenu par tête a baissé et le PIB a dégringolé pour retrouver son niveau de 2009.

Depuis ce 5 décembre, la Russie est aussi devenue la première nation bannie des Jeux olympiques pour dopage institutionnalisé. Un camouflet, une nouvelle sanction. Au lendemain de la décision du Comité international olympique d’exclure la délégation russe des JO d’hiver de Pyeongchang (Corée du Sud) en février, en n’autorisant que les sportifs « propres » à participer sans leur drapeau ni leur hymne, Vladimir Poutine a donc tenté de reprendre la main. « Nous sommes en partie responsables [de la situation] car nous avons fourni un prétexte », a-t-il admis, pour ajouter aussitôt : « Même si je considère que ce prétexte a été utilisé de manière pas tout à fait honnête. »

A Nijni-Novgorod, mercredi, la candidate Ksenia Sobtchak, fille de l’ancien mentor en politique de Vladimir Poutine, inaugurait au même moment son local de campagne, tandis que le bras droit d’Alexeï Navalny y est toujours emprisonné pour appel à un rassemblement illicite. Le principal opposant du pays avait tenu dans cette ville une réunion publique avant d’être condamné à vingt jours de prison. Poutine IV s’en est bien souvenu.