Laurent Wauquiez en meeting à Saint-Priest, dans la métropole de Lyon, le 7 décembre 2017. / ROBERT PRATTA / REUTERS

Laurent Wauquiez a franchi une nouvelle étape dans son rêve de conquête du pouvoir. Dimanche 10 décembre, le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes a été élu président du parti Les Républicains (LR) dès le premier tour. L’homme de 42 ans a obtenu 74,64 % des voix, devant Florence Portelli (16,11 % des voix) et Maël de Calan (9,25 %). Alors que les dirigeants s’attendaient à une participation famélique, entre 50 000 et 80 000 votants, 99 597 militants se sont exprimé sur les 234 556 adhérents à jour de cotisation, soit 42,46 % de participation. Une mobilisation tout de même très inférieure aux 176 608 votants du congrès de 2012 ou des 155 851 participants du scrutin de 2014 à l’issue duquel Nicolas Sarkozy avait repris les rênes de l’UMP avant de la transformer en LR.

Suivez la soirée avec nos journalistes présents aux côtés des candidats :

C’est à cette époque que Laurent Wauquiez avait commencé à imaginer prendre un jour les commandes de la formation de la rue de Vaugirard. Nommé par l’ancien président de la République au poste stratégique de secrétaire général, il a minutieusement sillonné les fédérations avant de voir sa principale rivale, Nathalie Kosciusko-Morizet, s’éloigner du parti et lui laisser la place de vice-président. Pendant la campagne de la primaire de M. Sarkozy, il est devenu président par intérim. Mais le vainqueur de la primaire, François Fillon, a préféré confier le parti à un de ses proches, Bernard Accoyer. Au moment du rassemblement du Trocadéro, alors que la campagne de M. Fillon battait de l’aile à cause des affaires, M. Wauquiez était revenu à la charge en promettant au candidat esseulé de faire du parti une « machine de guerre ». Peine perdue, M. Fillon se méfiait trop de l’ambition du quadragénaire…

Plus de 70 déplacements, un slogan remobilisateur

Au cœur d’une droite dont tous les anciens leaders sont tombés à la primaire puis à la présidentielle, Laurent Wauquiez a vu un boulevard s’ouvrir devant lui avant l’été. Ses principaux adversaires (Valérie Pécresse, Xavier Bertrand) ont renoncé à l’affronter. Seuls Florence Portelli et Maël de Calan ont réussi à obtenir leurs parrainages. Deux candidats avec des lignes bien définies – l’une filloniste, l’autre juppéiste – mais trop peu connus pour contester l’ascension de M. Wauquiez.

Ce dernier n’a pourtant rien négligé. Depuis le jour de sa déclaration de candidature, le 3 septembre au Mont-Mézenc (Haute-Loire), le président de la région Auvergne - Rhône-Alpes a méticuleusement organisé sa prise de pouvoir : plus de 70 déplacements, un slogan remobilisateur – « La droite de retour » – et des meetings ciblés sur le noyau dur partisan qui rêve d’une « droite qui ne s’excuse pas d’être de droite »… Lors de ses réunions publiques, il a sans cesse ciblé Emmanuel Macron en reprenant beaucoup des arguments de Nicolas Sarkozy pendant la campagne présidentielle de 2012 : ode à la « majorité silencieuse », vision assimilatrice de l’immigration – « C’est à l’étranger de s’adapter à la France » – et évocations multiples des racines face à un président de la République qui aurait la « haine de la province », selon les termes de M. Wauquiez dans une tribune publiée dans Le JDD, dimanche 29 octobre.

Mises en garde

Une campagne qui a flatté le cœur des militants. Mais qui a irrité une partie de la droite modérée. A plusieurs reprises, M. Wauquiez a subi des mises en garde. Depuis le mois de juin, Valérie Pécresse et Xavier Bertrand ont dénoncé à plusieurs reprises les risques d’une dérive droitière et répété qu’ils voulaient continuer à peser à l’avenir. Opposés au candidat sur de nombreux sujets (l’Europe, l’identité), Alain Juppé et ses héritiers qui ne sont pas encore partis à Matignon hésitent toujours entre un attrait pour le macronisme et une volonté d’exister dans le futur parti. En publiant ses lignes rouges, notamment l’incompatibilité avec le Front national, le maire de Bordeaux a choisi de mettre sous pression le candidat et a même évoqué la possibilité d’un rapprochement avec Emmanuel Macron lors des prochaines élections européennes en 2019.

Jeudi 16 novembre, dans un entretien au Figaro, Laurent Wauquiez a montré qu’il reste soucieux du rassemblement. Pour tranquilliser les modérés, il a donné des gages sur son identité européenne : « Je rejette l’étiquette d’eurosceptique ; je suis un Européen convaincu. Face à la mondialisation et pour que la France pèse et se protège, il est indispensable de s’adosser à l’Europe. » Pour mobiliser ses partisans, il s’est dit adepte d’une « union des Etats-nations » et d’un « traité de refondation » soumis à un référendum afin que « la France retrouve la souveraineté sur sa politique migratoire ».

Le plus dur commence peut-être

Un exercice de funambulisme qui donne un avant-goût du chemin escarpé qui l’attend dans les mois à venir. Car le plus dur commence peut-être maintenant pour Laurent Wauquiez. Depuis le mois de juin, la droite est écartelée et atone. En nommant des ministres de droite et en attirant des députés attirés par sa politique économique, Emmanuel Macron a réussi à déstabiliser LR qui se retrouve avec un nouveau parti sur son aile gauche, Agir fondé par Franck Riester et une vingtaine d’autres élus. Le nouveau président de LR aura donc la lourde tâche de rassembler les élus tout en ne décevant pas le noyau dur de la droite. Avant la fin du mois de décembre, il devrait annoncer la nomination d’une douzaine de personnalités pour diriger le parti. En janvier, il mettra en place une sorte de Shadow cabinet avec des élus chargés de travailler sur des thématiques particulières. A plus long terme, son défi sera de faire exister à nouveau la droite par des déclarations et des propositions susceptibles d’interpeller les déçus du FN et de remobiliser l’électorat de la droite dure tout en n’effrayant pas les personnalités modérées. S’il échoue, LR pourrait se recroqueviller et se marginaliser durablement.